Accueil Lifestyle Culture Geek Interview de Cesare Mainardi, gérant du distributeur Atalia !

Interview de Cesare Mainardi, gérant du distributeur Atalia !

Cesare Mainardi Atalia

Interview de Cesare Mainardi, gérant du distributeur de jeux de société Atalia

 

Bien le bonjour Cesare, et sincèrement merci d’avoir accepté de répondre à quelques questions pour vous présenter la société de distribution et de traduction de jeux de société Atalia aux lecteurs de Vonguru !

 

Pour commencer, pourriez-vous commencer par présenter votre parcours jusqu’à la création d’Atalia ?

Bonjour, j’ai une formation d’ingénieur en chimie acquise quand j’habitais encore en Italie, mon pays de naissance. Je suis en France depuis 22 ans et j’ai laissé la chimie pour faire carrière dans les achats et la supply chain. J’ai réveillé la passion qui vivait en moi pour les jeux au cours des années… Risk quand j’étais encore ado, Dungeon & Dragons, Magic… puis j’ai osé en créer moi même : Racing, Robotroc et plus récemment Spywhere. J’ai découvert le marché du jeu en France et à l’étranger en cherchant un distributeur pour les deux premiers jeux, que j’avais autoédités. Étant arrivé à un moment de ma carrière où j’avais un peu fait le tour, j’ai décidé de changer de vie et de profiter de mes acquis professionnels et de ma connaissance du marché international du jeu pour lancer ma propre société dans le domaine du jeu de société.

 

 

Pourquoi avoir créé Atalia ? Cela répondait-il à votre avis à un besoin, une lacune dans le paysage socioludique francophone ?

Vouloir changer de vie c’est facile, mais pour quoi faire ? J’ai passé une année entière à réfléchir, à préparer mon business plan… Lors de mes échanges internationaux avec des professionnels du jeu, j’avais constaté que la distribution en France ne fonctionnait pas comme à l’étranger. J’étais surpris qu’en France, un distributeur puisse être aussi éditeur de ses propres jeux. J’avais aussi découvert plein de bons jeux qui, bien que traduits en français, n’étaient pas arrivés en France et d’autres que les distributeurs français, à mon sens, n’avaient pas poussé comme ils l’auraient mérité. J’ai donc mis mes acquis professionnels et ma connaissance du marché du jeu à profit pour la création d’une société de distribution qui fonctionne sur nouveau modèle.

 

 Quelles sont les missions d’Atalia ?

Justement, contrairement à la plupart de nos confrères, en tant que distributeurs, nous avons décidé de ne pas éditer nos propres jeux. Nous investissons donc notre trésorerie en communication pour les jeux qu’on distribue, plutôt qu’en édition. Ainsi, nos éditeurs partenaires sont assurés qu’on ne privilégie pas nos jeux au détriment des leurs. À chacun son métier, que chacun fasse ce qu’il sait faire le mieux. De plus, depuis sa création, Atalia a toujours voulu se concentrer sur un catalogue volontairement à taille humaine afin que notre communication ne se dilue pas sur un trop gros nombre de jeux.

 

 

Combien de personnes œuvrent à leur accomplissement ? Comment vous répartissez-vous les tâches ?

Aujourd’hui, l’équipe est composée de 6 professionnels et moi-même qui suis le gérant de la société. Nous sous-traitons la partie préparation de colis pour plus de flexibilité.

Les membres de l’équipe, dont je suis particulièrement fier, sont tous en télétravail. Dans l’ordre d’arrivée dans l’entreprise : Fred, qui habite près de Saint-Étienne, s’occupe de la communication et de l’événementiel ; Jérémie, dans le Var, s’occupe du SAV ; Morgane, en Bretagne, est notre comptable ; Sandrine et Hélène, respectivement près de Bordeaux et d’Angers, sont nos chargées de clientèle ; enfin, Thibault, en Loire-Atlantique qui vient de nous rejoindre, s’occupe d’animer notre chaîne Youtube et les réseaux sociaux.

Tous participent à la sélection des jeux à distribuer et à l’animation dans les festivals de leurs régions.

 

 

Pourriez-vous nous faire un rapide historique d’Atalia, des moments-clef de votre développement ?

2015 : Création de l’entreprise en février.

2016 : Début de la distribution de Limite Limite, suivi par le premier recrutement.

2017 : Nomination au Spiel des Jahres de Magic Maze et victoire dans la catégorie enfants pour ICECOOL.

2018 : As d’Or Enfants avec Nom d’un renard.

2019 : Arrêt brutal des relations commerciales de la part de l’éditeur de Limite Limite (condamné par la suite par le Tribunal de Nanterre à nous indemniser) qui a contribué à la mise en redressement d’Atalia avec une grosse perte de notre chiffre d’affaire d’un coup !

2020 : Sortie du redressement grâce, d’une part, aux lancements de jeux à succès lors du deuxième semestre 2019 comme Punto, Dreamscape, Les Gens Qui, Je n’ai jamais et Magic Maze On Mars (les « Big 5 ») et, de l’autre, à l’implication de l’équipe que je remercie encore pour son dévouement dans cette période de doute.

 

 

Quels sont les titres et les partenariats qui ont permis à Atalia de se faire vraiment remarquer ?

Je dirais tous les éditeurs des différentes « locomotives » qui se sont succédé dans le temps. Une « locomotive » est un titre particulièrement attrayant, motivant les boutiques à passer commande. La première fut Loup Garou Pour Une Nuit, à l’époque édité par Bézier Games, avant qu’il ne revende la licence à Ravensburger qui nous en a laissé la distribution. Splash de Lifestyle nous a bien tiré pendant un moment et fait désormais partie de nos classiques. Limite Limite, dans le bien et dans le mal a été indéniablement un jeu marquant. Les autres sont Nom d’un Renard de Game Factory, Magic Maze de Sit Down, puis « les big 5 » que je mentionnais plus haut qui nous ont sorti de la période de galère de 2019.

 

En quoi consiste concrètement le métier de distributeur de jeux de société ?

Un distributeur est une sorte d’intermédiaire entre les éditeurs et les revendeurs (boutiques, grands magasins). L’éditeur développe et fait fabriquer les jeux. Au delà des savoir-faire assez différents, pour l’éditeur d’un jeu, assurer seul la logistique et garder le contact avec tous les revendeurs lui reviendraient trop cher alors que le distributeur peut mutualiser les coûts sur plusieurs titres.

 

En plus de jeux francophones, vous distribuez également des jeux étrangers. En assurez-vous vous-même la traduction ? Comment les choisissez-vous ?

De plus en plus, oui, car c’est difficile pour un éditeur non francophone d’en vérifier la qualité. Nos jeux sont soigneusement sélectionnés grâce à plusieurs étapes qui se succèdent, pas forcément toujours dans le même ordre : des tests en ludothèque ; les avis des « Amis d’Atalia », un groupe privé d’experts qui nous sont fidèles ; les tests hebdomadaires au siège au Plessis Robinson (ils sont ouverts au public : tout le monde peut venir, pour cela il suffit de me contacter) ; l’aval des membres de l’équipe et de leur entourage.

Vous devriez regarder aussi ça :
Test - Yaourtière MultiDelices Express & Végétal 12 pots de Seb

 

 

Vous avez parfois un impact créatif sur le développement de certains jeux. Pouvez-vous nous expliquer comment un distributeur parvient à négocier la transformation d’un titre ?

Nous donnons nos avis aux éditeurs lorsqu’ils nous impliquent en amont. Nous sommes souvent à l’origine du choix du titre, qui doit « parler » aux français. Nous mettons en garde les éditeurs lorsque le développement du jeu les porte à créer un matériel inutilement cher et parfois nous reformulons les règles, bien au-delà d’une simple traduction. Plus rarement cela nous est arrivé de demander de rajouter ou de modifier des règles.

 

Vous avez publié en octobre un intéressant article sur la concurrence d’Amazon, invitant à faire fonctionner plutôt le commerce de proximité, et rappelant que vous avez refusé de vendre vos jeux sur la plate-forme états-unienne. Diriez-vous qu’Amazon représente un danger dans le paysage socioludique ?

Merci de le mentionner. En effet, nous animons un blog sur notre site, avec du contenu qui va au-delà de la simple présentation des jeux et je suis ravi que tu nous suives. Je crois avoir tout dit dans l’article. Le danger n’est pas forcément Amazon mais le fait de le préférer de plus en plus à l’achat en boutique car ces dernières sont l’un des premiers contributeurs à la richesse ludique du moment. Sans eux, on vendrait toujours les mêmes jeux. À l’époque de l’article [octobre 2019], c’était juste une théorie, notre humble avis. Aujourd’hui, en regardant les best-sellers des magasins qui font de la vente par correspondance en cette période de confinement, c’est une certitude…

 

Récemment le groupe Hachette rachetait à grand bruit le distributeur Blackrock. Face à de grands groupes (Hachette, Asmodee) ou à de grands éditeurs avec une certaine force de frappe en termes de distribution (iello), y a-t-il encore de la place pour des distributeurs à échelle humaine ? Que peuvent-ils apporter de plus ou de différent ?

Si je pensais le contraire, je ne me battrais pas au quotidien pour développer Atalia. Nous apportons de la diversité. À titre d’exemple, Nom d’un renard ne serait probablement pas arrivé en France sans nous ; Loup Garou Pour Une Nuit serait arrivé bien plus tard ; Punto, Gravity Superstar, Team3, qui fonctionnent bien en boutique, seraient probablement sans distributeur en France, comme c’est le cas en Italie, par exemple, au point que certaines boutiques italiennes nous en commandent bien qu’ils soient en français uniquement.

 

 

Trois ans après votre longue interview pour Jeudéclick, diriez-vous que le monde du jeu de société a évolué dans le bon sens, vers plus de variété dans les propositions, de diversité dans les représentations, de stabilité pour les éditeurs et de protection pour les auteurs ou n’êtes-vous pas aussi optimiste ?

Le distributeur leader en France semble avoir également pris conscience de l’importance des boutiques et ne les a pas écrasées comme je le craignais. Il faut dire que celles–ci s’organisent et se défendent à leur tour : d’une part, en se regroupant (par exemple, le GBL, Groupement des Boutiques Ludiques, compte désormais 150 membres) et, d’autre part, en diversifiant leur offre, avec les jeux de distributeurs plus petits mais également qualitatifs.

 

Si la sélection Atalia est relativement éclectique, vous semblez avoir particulièrement mis en avant ces derniers temps des jeux d’ambiance à tendance « trash », ou du moins assez franche (Les gens qui et Je n’ai jamais après Limite, limite) et des jeux simultanés extrêmement nerveux (Magic Maze on Mars, House Flippers, Space Bowl après Magic Maze). Pourquoi ces choix ?

En réalité, il n’y a aucune logique de choix éditorial allant plus vers un type de jeux plutôt qu’un autre. Nous avons proposé également des jeux pour un public plus expert, comme Lorenzo ou Rajas of The GangesNom d’un renard ou Punto n’ont rien à voir non plus avec les titres que tu mentionnes. Nous ne faisons que sélectionner tout ce qui nous semble particulièrement bon et qui apporte quelque chose de nouveau par rapport aux titres déjà en France, peu importe le type de jeu.

 

Parmi les prochaines sorties d’Atalia, y en a-t-il que vous souhaiteriez déjà nous présenter rapidement ?

Coté joueurs confirmés (mais restant tout de même accessibles aux familles joueuses), nous avons Catalyst et Mystic Vale qui sortent en juin. Ce dernier, en particulier, bénéficie d’une mécanique unique qui permet d’améliorer ses cartes au fur et à mesure de la partie. Je conseille de surveiller aussi Roméo et Juliette, un jeu coopératif pour 2 joueurs à communication limitée qui sort en septembre.

Coté jeux familiaux : Gold qui sortira en juillet dans le format Punto, il renouvelle le genre des jeux de mémoire dans une ambiance « ruée vers l’or » ; Dive, en octobre, vous surprendra, j’invite tout le monde à suivre notre page ainsi que celle de Sit Down qui, encore une fois, a déniché une perle ludique unique.

Enfin, coté jeux pour enfants, City Blox sortira fin mai et ravira les plus petits et replongera dans l’enfance leurs parents grâce aux petites briques encastrables, façon Lego, sur lesquelles se base le jeu.

 

 

Quels ont été vos jeux préférés en 2019, parmi ceux distribués par Atalia ?

J’ai déjà mentionné plus haut Gravity Superstar et « les big 5 ». Comment ne pas apprécier ces titres qui ont suscité l’intérêt du public et qui ont contribué à sauver notre entreprise ? Parmi tous, j’avoue avoir un faible pour Punto, un jeu que j’ai toujours sur moi et qui plait à tout le monde, qu’ils soient joueurs ou pas du tout.

Merci pour toutes ces réponses. Pour conclure, je tiens sincèrement à vous féliciter pour votre vitalité après le redressement judiciaire de l’année passée, et à vous souhaiter une année 2020 stimulante malgré les circonstances !

 

 

Les jeux Atalia déjà présentés sur Vonguru :

Architectura

Bad Bones

Catalyst

City Blox

Dreamscape

Gravity Superstar

Gugong

House Flippers

IceCool 2

Je n’ai jamais

Les Gens qui

Magic Maze et son extension Hidden Roles

Magic Maze on Mars

Mystic Vale [VG Award]

Penny Papers Adventures : La Vallée de Wiraqocha

Punto

Space Bowl

Team3

Wendake

WormLord

Futures sorties :

City Blox (mai)

Dreamscape : extensions (mai)

Underwater Cities : extension New Discoveries (mai)

Catalyst (juin)

Mystic Vale (juin)

Gold (juillet)

Dexterity Jane (août)

Ragusa (septembre)

Roméo et Juliette (septembre)

Rush out ! (septembre)

Dive (octobre)

Fiesta Mexicana (octobre)

Rajas of the Ganges : The Dice Charmers et la Goodie Box 1 (octobre)

Venice (octobre)

Pioneer Days (janvier 2021)

Master of Renaissance (février)

Age of Dirt (février)

Skytopia (février)

2 Commentaires

  1. Bonjour,

    Quel sympathique article. J’aimerais néanmoins informer les lecteurs qui si jamais ils achètent un jeu distribué par Atalia, ceux-ci n’assurent pas le SAV. Je pourrais comprendre que le manque de moyens d’un éditeur qui n’est pas Asmodé puisse l’expliquer, ce que je trouve inacceptable c’est de ne même pas répondre aux demandes. Je me serais contenté d’une réponse du type « Nous n’assurons pas de SAV sur nos jeux par manque de moyens humains pour gérer ce service ». Mais traiter les gens par le silence est une forme de mépris qui contraste avec la belle image qu’ils essayent de donner.

    Un joueur, apparemment juste bon pour payer son jeu et ne pas demander quoi que ce soit à l’éditeur.

    • Merci pour le témoignage d’appréciation de l’article, et bien désolé pour cette mauvaise expérience… En effet, Atalia n’est pas Asmodee, et j’imagine qu’ils assurent le SAV sur certaines de leurs gammes mais ne peuvent pas le faire pour toutes… Les avez-vous bien contactés sur leur site et sur facebook, voire en taguant directement Cesare dans une publication – le dernier recours bien sûr, mais il est assez actif sur ce réseau social ? Désolé encore et belles parties !