Interview de Vincent et Fabien, fondateurs de Ludum

Sommaire

1. D’où vous est venue l’idée de l’abonnement Ludum ? Que pensiez-vous apporter aux propositions concurrentes ? Vous envisagiez-vous d’abord comme une boutique en ligne ou comme une offre de box surprise ?
Fabien :  À l’origine (mais au moins 4-5 ans avant la création de Ludum), on voulait monter un bar à jeux avec Vincent, mais à ce moment-là on avait des engagements professionnels et personnels qui nous ont empêchés de nous lancer.
En 2018, les planètes se sont alignées et on s’est retrouvé tous les deux disponibles pour travailler un projet commun. On a finalement rapidement abandonné l’idée du bar à jeux, car entre-temps de nombreux avaient ouvert un peu partout.
L’idée de travailler dans le monde du jeu de société est restée par contre, et on a voulu réfléchir à une offre qui pourrait permettre aux néophytes de franchir facilement les portes du jeu de société moderne, en partant du principe qu’il était parfois compliqué pour un joueur n’ayant connu que le Uno et le Monopoly de franchir la porte d’une boutique spécialisée. L’idée des box est venue assez naturellement. On s’est beaucoup inspirés du Petit Ballon (une box de découverte de vins) pour la création de notre concept et on n’avait absolument pas conscience qu’il y avait déjà une autre offre de box sur le marché (on s’en est rendus compte quelques mois après notre lancement), du coup on pensait juste amener une concept de découverte innovant dans le monde du jeu de société.
Et du coup, à l’époque l’idée était vraiment de se concentrer à 100% sur notre offre de box de jeux, la partie boutique était secondaire avec une sélection de 200-300 jeux max et avait surtout été créée pour nous permettre de proposer notre garantie zéro doublon avec un peu de choix de jeux d’échange.
Vincent : Notre volonté profonde était surtout d’apporter un regard nouveau et différent sur le monde du jeu. Montrer patte blanche, à l’image du site, créer un endroit accueillant et réconfortant pour plonger dans le monde ludique, même avec des connaissances limitées ou inexistantes. L’évolution du site s’est faite dans cette logique : les abonnements, la boutique et le développement blog ou plus récemment de notre guide d’achat.
Au-delà de l’idée des abonnements ou d’une boutique, Ludum.fr c’est surtout la matérialisation d’une envie commune de monter un projet entre potes autour d’un sujet passionnel et de pouvoir le partager au plus grand nombre.
2. Votre concept central est donc de proposer des jeux de société surprise dans une catégorie choisie par l’acheteu.se.r, accompagnés d’une revue, le tout pour un prix légèrement inférieur à ce que coûterait l’achat volontaire de ces jeux séparément dans une boutique. À qui diriez-vous que vous vous adressez ? Qu’est-ce que vous répondriez à celleux qui estiment que le risque n’en vaut pas la chandelle, par exemple par rapport aux Mystery Box de Matagot bien plus « rentables » ?

 

Fabien : Pour le coup, même si nos box offrent en effet la possibilité de faire une légère économie par rapport au prix d’achat en ligne, nous n’avons jamais imaginé nos abonnements comme une offre discount qui permet d’avoir des jeux moins chers. Nos box s’adressent à ceux qui découvrent, ou qui veulent explorer le monde du jeu de société. On teste chaque trimestre plus d’une centaine de nouveautés et on essaye dans chacune de nos sélections de proposer les meilleures sorties et de faire découvrir des mécaniques innovantes au fil des saisons. En gros, c’est l’offre parfaite pour commencer à se constituer sa ludothèque et voir quels jeux sont à notre goût et quels jeux ne le sont pas ou pour continuer à rester à la page sans avoir nécessairement besoin de suivre toute l’actu ludique.
Du coup à l’inverse, si vous jouez depuis longtemps et que vous avez chez vous plus de 300 jeux dans votre ludothèque, nos abonnements ne seront certainement pas adaptés pour vous (sauf si vous aimez les surprises) car vous savez déjà ce que vous aimez et n’avez pas besoin de nous pour vous proposer des nouveautés. On pousse d’ailleurs régulièrement certains de nos abonnés déçus de ne pas avoir reçu tel ou tel jeu dans leur box à mettre fin à leur abonnement et à se tourner plutôt vers notre Pass Ludovor. En gros pour nous, nos box sont une offre découverte (autant pour découvrir le monde du jeu que pour découvrir Ludum), elles se veulent qualitatives avec un gros travail de sélection, mais elles se veulent généralistes aussi avec une volonté de trouver des thèmes et des mécaniques qui plairont au plus grand nombre.
Vincent : D’une manière générale, on s’intéresse peu à ce que font le reste des acteurs, nous n’avons jamais cherché à récupérer des clients chez untel ou untel. Sur l’ensemble des sujets, on essaye d’apporter ce que nous ne réussissons pas à trouver ailleurs. Nous ne sommes liés à aucun distributeur ou éditeur, on ne fait pas nos choix en fonction de conditions commerciales ou d’offres de déstockage, on essaye juste de proposer les meilleures nouveautés du trimestre dans un format pour un tarif contenu et surtout de partager le pourquoi de nos choix dans le magazine.
3. Pouvez-vous me dire combien de boîtes de chaque vous avez vendues par exemple lors de l’édition précédente ? Ou au moins me dire lesquelles vous vendez le mieux et lesquelles le moins (que l’on se rende compte du public des box, si les familles sont plus intéressées que les experts par exemple) ? Cela correspond-il aux attentes que vous aviez initialement ?
Fabien : Alors je n’ai pas encore les chiffres pour l’édition de juillet (on fait pas mal d’envois en décalés avec les vacances de certains abonnés), mais voilà ceux de la box d’avril 2023 :
  • Party Box : 200 abonnés
  • Easy Box : 300 abonnés
  • Discovery Box : 390 abonnés
  • Discovery Plus : 160 abonnés
  • Marmots Box : 80 abonnés
  • Junior Plus : 50 abonnés
Pour un total d’environ 800 abonnés (ne cherchez pas un compte rond avec les chiffres du dessus, de nombreux clients sont abonnés à plusieurs box).
En termes de chiffre, on est bien en dessus de ce que l’on attendait initialement. On a d’ailleurs pendant un moment eu plus de 1200 abonnés mais on s’est confrontés à ce moment à un problème que nous n’avions pas anticipé. On s’est retrouvés en effet à demander plus de 600 exemplaires pour notre Discovery Box et on s’est heurtés au refus de nous servir de certains distributeurs sur des jeux avec des petits tirages (3000 exemplaires) par peur de ne pas pouvoir servir toutes les boutiques. C’est une des raisons qui nous a poussés à nous concentrer aujourd’hui plus sur le développement de notre boutique que sur la promotion de notre offre de box.
Vincent : Clairement on ne compte pas sur les box pour faire vivre l’équipe, nous n’avons donc plus d’objectif de volume, qu’on en fasse 300 ou 30 000 ça ne changerait finalement pas grand chose. En revanche, c’est maintenant un des brins principaux de notre ADN et c’est l’expression de notre expertise et de notre passion. Ce qui nous ravit dans cet exercice c’est principalement le retour des abonnés qui généralement dépasse de loin nos attentes.
 4. Comment choisissez-vous vos jeux ? Avez-vous des partenariats privilégiés avec des éditeurs/distributeurs, qui vous enverraient par exemple les jeux qu’ils jugent pertinents pour que vous fassiez vos choix, ou vous arrive-t-il de prospecter de nouveaux éditeurs/distributeurs quand un jeu vous plaît ? Auriez-vous une anecdote à ce sujet ?
 
Fabien : Alors on travaille aujourd’hui avec 99% des distributeurs français qui proposent 99% des jeux de société modernes édités en France (en version boutique, je mets Kickstarter à part). Du coup, chaque trimestre on se pose pour identifier toutes les sorties à venir et faire une première shortlist. On exclut ceux pour lesquels le prix de vente public est trop élevé pour pouvoir être intégrés en box et ceux pour lesquels le thème est trop clivant. Une fois cette première liste réalisée, on prend contact avec les distributeurs afin de confirmer les dates de sortie et que le jeu sera bien en stock à temps pour notre prochaine box et on en profite pour leur demander si on n’est pas passés à côté d’une future pépite 🙂 Et ensuite, tout au long du trimestre, les distributeurs nous envoient des démos ou proto des différents jeux que l’on a demandés ou parfois pas, pour que l’on puisse les tester.
Il arrive parfois que des éditeurs indépendants nous contactent pour nous présenter leur jeux, mais c’est des cas plutôt à la marge. Par contre, on sait rester à l’écoute des joueurs et voici du coup une petite anecdote, plutôt récente 🙂
Lors du dernier festival de Cannes, nous avons eu l’occasion de tenir un petit stand afin de présenter notre Pass Ludovor et nos box de jeux. Le hasard a fait que notre stand s’est retrouvé juste à côté du celui de Aspic Games, l’éditeur de Brigands, qui est distribué par Jeu Délire avec qui on ne travaillait pas. Tout au long du festival, on n’a pas arrêté d’entendre des joueurs et de voir de nombreux clients dire du bien de Brigands. Tellement que l’on a décidé à un moment de fermer notre stand pendant 1 heure pour pouvoir aller le tester ! On a immédiatement été conquis… et quelques mois plus tard on faisait découvrir le jeu à tous nos abonnés dans notre box d’avril 🙂
Et pour finir pour la partie sélection des jeux dans la box, après que l’on a réussi à tester toutes les nouveautés du trimestre il reste une dernière phase très importante pour nous : c’est de confronter les jeux que l’on a shortlisté suite à nos tests à un public plus large. On organise alors des soirées de découverte dans des bars à jeux, ludothèques et avec des associations de joueur afin de pouvoir confirmer que notre sélection pourra plaire au plus grand nombre.
5. Ludum s’est immédiatement lancé avec beaucoup de professionnalisme, un site très propre, une offre solide qui n’a pas tant changé dans le fond… Quel est votre background ? Combien de temps vous a-t-il fallu pour préparer Ludum et décider que le moment était venu de vous lancer ?
Fabien : On a un double avantage avec Vincent, c’est que l’on vient tous les deux à l’origine du monde du web et de la relation client dans nos anciennes expériences professionnelles. C’est d’ailleurs dans le cadre du travail que l’on s’est connus initialement avant de devenir amis. Donc en lançant une offre d’abonnement sur internet on savait ce que l’on faisait et en plus, on savait que l’on travaillait bien ensemble et que notre association avait de grandes chances de bien se passer.
Une fois que l’on a validé le concept de Ludum, après de nombreuses réunions autour de nombreuses bières, tout est allé très vite. Globalement je dirais qu’on a confirmé notre concept global en novembre 2018, en février 2019 on allait au festival de Cannes pour la première fois pour nouer des partenariat commerciaux avec les distributeurs du secteur et en avril la société était officiellement créée. Ensuite, on a travaillé pendant 3 mois sur la création de notre site (Vincent principalement sur le côté technique et moi sur le côté contenu) et en juillet 2019 on ouvrait officiellement la boutique et on commençait à communiquer sur notre première box qui a été expédiée en septembre.
Tout s’est enchaîné assez vite et naturellement, le déclic n’a pas vraiment eu lieu sur le côté mise en place de Ludum, où on maîtrisait déjà tous les deux de nombreux aspects techniques à mettre en place. C’est la définition de l’idée globale de ce qu’était Ludum qui a été plus longue, une fois qu’on a été convaincu tous les deux de la pertinence de notre idée, on a « déroulé ».
Vincent : Nous ne sommes plus tout jeunes (surtout moi) et en effet on pas mal roulé notre bosse pour le compte de grosses marques. Au fil des années, on a acquis du savoir technique, mais surtout on s’est réconfortés autour de valeurs fortes. Valeurs souvent portées par nos anciens employeurs mais étrangement jamais appliquées complètement. Globalement en tant que professionnel, j’estime qu’il est essentiel d’offrir à son public l’expérience que l’on souhaiterait avoir soi-même en tant que client. Nous, on aime les gens passionnés, accessibles et attentionnés, donc depuis le début on travaille en ce sens et on persévère pour que cela se ressente le plus possible.
6. Règles audio, vraie partie blog du site, Pass Ludovor, jeux « + »  à ajouter aux box… Vous semblez fourmiller d’idées pour apporter toujours un petit quelque chose de plus. Une nouveauté que vous pourriez nous teaser ?
Fabien : Alors, ce n’est pas vraiment une exclu mais on a refait entièrement graphique le magazine pour la dernière box de juillet : https://ludum.fr/pdf/MAG16.pdf 🙂 Une nouvelle patte graphique pour le rendre plus moderne après 4 ans d’existence ! Par contre, fini les règles audio… c’était une bonne idée mais cela demandait un temps fou à Vincent pour les enregistrer et les monter, pour au final très peu d’écoutes. Pour la suite, on a pas mal d’idées mais on n’a pas encore fixé exactement ce sur quoi l’on a envie de bosser, potentiellement ça pourrait être de la vidéo, le développement d’un média, une refonte de notre offre de box, l’édition de nos propres jeux…
Vincent : Pour le moment, on est surtout concentrer sur la refonte complète de notre site, qui a besoin d’un petit coup de frais comme notre magazine 🙂 On espère pouvoir lancer ça début 2024 !
7. Quels sont vos jeux préférés de ces derniers mois, que vous ayez ou non pu les inclure dans les box ?

Fabien :  Alors, je vais volontairement ne pas citer de jeux qui pourraient être dans la box d’octobre pour éviter de spoiler 😉 Mon gros coup de cœur de ce trimestre c’est Expéditions (https://www.ludum.fr/jeux-de-societe-strategie/expeditions-4395), le nouveau jeu de Stonemaier dans l’univers de Scythe qui va sortir en septembre prochain. Parmi les sorties depuis le début de l’année, j’ai comme beaucoup été complètement et définitivement séduit par Earth. Et sinon je prends toujours beaucoup de plaisir, surtout l’été à jouer à des petits jeux malins comme Trio, Mind Up…

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Vincent : En termes de mécaniques et de plaisir de réflexion et de jeu j’ai été définitivement conquis par Revive, même si j’adhère vraiment pas du tout à la direction artistique du jeu. J’ai aussi passé pas mal de temps sur la réédition de El Dorado, j’étais passé à coté de la première version et j’adore ce jeu, tactique, simple, accessible facile à partager avec tout type de joueur. Pagan a aussi bien marqué mon début d’année, très friand de jeu de duel avec ma compagne, je trouve que celui fait particulièrement honneur aux joueurs. Et pour finir, en tant qu’admirateur de Bruno Cathala, j’ai un peu honte d’avouer que je n’avais jamais pris le temps de jouer à Five Tribes, ben maintenant c’est fait, résultat je n’ai envie de jouer qu’à ça !
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