Critique à 4 mains : Obi-Wan Kenobi, LA mini-série Disney+ du moment ?
Disponible dans un format de 6 épisodes sur une saison depuis le 27 mai dernier sur la plateforme Disney+, Obi-Wan Kenobi était une mini-série très attendue par la communauté et les fans de Star Wars. Pour vous resituer, l’histoire se déroule dix ans après La Revanche des Sith et neuf ans avant Un nouvel espoir, dans une galaxie dirigée d’une main de fer par l’Empire galactique.
Côté personnages et acteurs, on retrouve Ewan McGregor et Hayden Christensen, qui reprennent leurs rôles respectifs d’Obi-Wan Kenobi et Anakin Skywalker (devenu Dark Vador) qu’ils avaient tenus dans la prélogie vingt ans plus tôt, tandis que Leia, âgée ici de dix ans, est incarnée par Vivien Lyra Blair.
Voici maintenant le synopsis, suivi de la bande-annonce :
« À la suite de la chute de l’ordre Jedi, l’Empereur Sith Palpatine a installé son régime de fer sur la galaxie, et dix ans après l’exécution de l’Ordre 66, Obi-Wan Kenobi mène une vie d’ermite sur la planète Tatooine en accomplissant sa mission : veiller discrètement sur le jeune Luke Skywalker face à la menace que représente l’Empire, et en particulier son ancien apprenti, devenu le bras armé de l’Empereur, Dark Vador, qui est aussi le père de Luke. Kenobi va être amené à quitter sa cachette pour partir à travers la galaxie afin de secourir la sœur jumelle de Luke, la princesse d’Alderaan Leia Organa, âgée de dix ans, qui a été enlevée. La Troisième Sœur Reva Sevander est à la poursuite d’Obi-Wan et son objectif obsessionnel est de le capturer et de le livrer à son maître Dark Vador. Les chemins de ce dernier et du Jedi vont se croiser… »
Lucile « Macky » Deloume : le pouvoir de l’amitié + fan service = ?
Voilà une série que j’attendais avec impatience, mais qui m’inquiétait également tant j’avais peur d’être déçue. Si je l’ai binge watchée, j’ai cependant eu du mal à m’y mettre, et c’est pour cela que la critique arrive quelques semaines après sa sortie. Au final, ce fut un vrai plaisir du début à la fin. J’ai toujours imaginé cette période de Star Wars, ce trou béant dans la trilogie, que je pensais si sombre avec l’Empire qui gangrène petit à petit la galaxie.
J’aime également beaucoup Ewan McGregor et j’avais hâte de le retrouver dans ce rôle phare. Après, il faut dire que je suis une personne très « facile », qui se contente facilement. Je sais par exemple que je vais très vite oublier cette série, qui n’a rien de mémorable, et qui tire trop sur « le pouvoir de l’amitié ». Cette mini-série m’a donné l’impression d’être une quête secondaire dans un RPG. C’est une quête importante, certes, mais qui ne marquera pas forcément les esprits. On ne sera ni surpris, ni étonné, ni angoissé, puisque l’on connaît la suite, bien naturellement. Ou alors vous ne connaissez pas Star Wars et, mais que faites-vous ici du coup ?
Fan de l’univers, j’ai aimé. C’était donc avec plaisir que j’ai visionné l’intégralité de la série, sans en attendre grand chose. Je la recommande donc à ceux qui aiment et connaissent Star Wars, et souhaitent ajouter une nouvelle pierre canon à cet ensemble. Je doute cependant fortement qu’elle devienne LA série phare qui restera gravée dans votre mémoire.
Siegfried « Moycoyani » Würtz : un morne gâchis
Une nouvelle promesse
La rumeur d’une fiction exclusivement consacrée à Obi-Wan Kenobi court peut-être depuis la fin de la prélogie, et si l’on a beaucoup entendu parler d’un film voire d’une trilogie, il n’est pas surprenant qu’en 2022 elle prenne plutôt la forme d’une mini-série de prestige. Et au fond, le temps pris par le projet est une bonne nouvelle, permettant à Ewan McGregor de mûrir en termes de jeu et physiquement, et donc de paraître plus marqué par les tragédies de La Revanche des Sith, tout en faisant davantage la transition entre son jeune alter ego d’alors et l’Alec Guinness d’Un Nouvel Espoir.
Et disons-le franchement, un tel projet ne pouvait pas échouer. Imaginez un peu, Obi-Wan apprenant qu’Anakin est vivant et sert Palpatine, les débuts de l’Empire traquant les derniers Jedi, Dark Maul dont on apprenait dans Solo qu’il était toujours en vie, la protection dans l’ombre d’un Luke inconscient de son héritage et du danger qu’il court constamment. Tout cela dans un univers encore assez vide dans le nouveau canon, et donc assez facile à enrichir, porté par un acteur dont le talent est indéniable et qui avait déjà prouvé à quel point il était formidable dans ce rôle, avec tous les moyens de Disney, et dans une série aussi longue qu’une trilogie…
Difficile de ne pas être vendu d’avance.
Aussi la série mérite-t-elle sans doute le déferlement de haine qui s’est abattue sur elle, non parce qu’elle serait catastrophique, mais parce qu’elle est honteusement et incroyablement moyenne, tellement moyenne qu’il faut la voir pour le croire après des promesses si fortes d’une qualité aussi évidente.
Notez que ma critique ne portera pas sur les supposées invraisemblances de la série par rapport au canon, notamment ce que les personnages sont supposés ignorer dans la trilogie originale alors qu’ils le savent dans la série. Il y a trop à dire déjà pour ne pas se focaliser sur des épiphénomènes qu’en plus un fan hardcore saura assurément défendre.
Déjà Ben Kenobi
Dès les premières minutes, on sent qu’il y a un problème. Le seul fait qu’Obi-Wan soit déjà reclus dans une grotte m’a gêné : s’il commence là où il est supposé commencer la trilogie, on imagine le peu d’évolution qu’il va connaître tout au long de la série. N’aurait-il pas été infiniment plus percutant que, dépêché par la Résistance pour protéger Luke, il mette à contribution des moyens assez développés, un vaisseau furtif, des droïdes, peut-être même des espions en ville, comprenant au fur et à mesure de la série que le renoncement dans une forme de monachisme Jedi reste paradoxalement la meilleure manière de protéger le fils de Dark Vador, celle qui lui coûte le plus mais aussi celle qui lui permet de rester le plus efficace sans mettre personne en danger ?
Au lieu de cela, le voilà presque miséreux, laissant mourir ses pouvoirs par manque complet d’entraînement, alors même que la série nous fait croire qu’il prend sa mission à cœur, ce qui paraît pourtant… assez incompatible, pour le dire poliment. D’autant qu’apprenant l’enlèvement de Leia, certes après quelques tergiversations, il quitte simplement Tatooine plutôt que de rappeler au très puissant sénateur Organa qu’il a une armée à disposition, autrement plus utile qu’un vieux Jedi déchu, moins dangereuse aussi que de faire appel à un « traître à l’Empire », ce qui permettrait en outre d’être près de Luke dans le cas (fort probable) où la menace pesant sur Leia menace aussi son frère. Sans même parler du fait que la disparition de la fille unique d’un sénateur ne peut passer inaperçue, de sorte que les autorités compétentes ne peuvent que trouver fort suspect qu’il ne demande par leur aide.
Et si vous vous arrachiez les cheveux à voir Obi-Wan si faible, rassurez-vous, quand le scénario l’exigera, il saura à nouveau repousser plus de lasers que les maîtres surentraînés du Temple Jedi. Parce que c’est comme ça que ça se passe chez les Jedi, on vous fait croire que le pouvoir vient du sacrifice, de la paix intérieure et d’un entrainement martial, alors que vous pouvez ne rien faire du tout pendant 10 ans et retrouver toute votre jeunesse juste parce que c’est écrit dans les étoiles du scénario, sans du coup donner l’impression qu’Obi-Wan mérite réellement ce réveil.
J’aurais naïvement beaucoup aimé le voir s’en vouloir de tant d’années de négligence, s’apercevoir qu’il a négligé les enseignements et ne sait plus protéger ses proches, et commencer un entraînement très intense pour retrouver la forme dont il a besoin pour servir à nouveau le Bien. Mais vous comprenez, c’est une série prévue pour une plateforme de streaming, donc un format qui rend impossible l’addition de cinq minutes particulièrement cool + judicieuses en termes de développement de personnage à un épisode. J’imagine.
Bon, au moins est-il amusant de voir Obi-Wan comme découpeur de viande, ouvrier allant tous les jours au boulot dans le bus de l’usine, une manière de subvenir à ses besoins tout en se fondant dans la masse, et acceptant même le spectacle de l’injustice pour ne pas se trahir. Bon, c’est déjà ce que faisait Cal dans Fallen Order, et c’était infiniment plus impressionnant dans le jeu vidéo, à la fois parce qu’on voyait pour la première fois une véritable usine titanesque, impliquant des créatures de toutes les races, une idée remarquable en termes de world-building dont la comparaison avec ce qu’en fait Obi-Wan Kenobi n’est décidément pas à l’avantage de ce dernier, et parce qu’on sentait le bouillonnement intérieur de Cal, sa sagesse dans son renoncement aux avantages des Jedi et en même temps sa souffrance à ne pas aider ses pairs.
L’occasion d’ailleurs de souligner mon désespoir de voir une fiction Star Wars encore à ce point humaine. Franchement, à part le droïde-coccinelle qui n’est là que pour vendre des jouets, et les inquisiteurs qui ne sont guère que des humains sans compétence en cosplay, sauriez-vous me citer un seul être non-humain au rôle un tant soit peu notable dans toute la série ? Cet anthropocentrisme de ce qui est supposé être la plus grande saga science-fictionnelle témoigne quand même d’un manque de créativité flagrant… et peut-être d’un manque de moyens.
Star Wars, morne plaine
Bon, voilà un sujet sur lequel j’ai littéralement entendu tout et n’importe quoi, de 10 à 25 millions de dollars par épisode, de 90 à 275 millions en tout, bref des articles bien renseignés en font la production Star Wars la plus cheap de l’histoire et d’autres se disant tout aussi renseignés la présentent tout de même comme quelque chose de sérieux. Cependant, toute personne ayant vu la série sera plutôt tentée de prendre en compte la fourchette la plus basse, et même de se demander où seraient passés ces fameux 10 millions minimum par épisode.
C’est que Obi-Wan Kenobi est assez étonnamment cheap, limitant le nombre d’environnements différents par épisode, offrant même régulièrement de grandes pièces vides aux longs dialogues ou des arènes désertiques aux affrontements, bref faisant preuve d’une avarice inattendue quand même le très moyen Book of Boba Fett avait au moins le mérite d’une certaine générosité, dont on n’avait pas pris la peine de le féliciter tant elle paraît évidente pour une production Star Wars. Et si beaucoup ont loué ces affrontements, où au moins les combattants utilisent à la fois leurs sabres et la force, je n’ai jamais tant eu l’impression dans un Star Wars que l’on se tapait juste dessus avec des barres de néons.
L’Inquisitrice Scénarium
L’autre personnage central de la série, c’est Reva. Étant donné que le parcours d’Obi-Wan est déjà connu, il fallait de nouveaux protagonistes créant des incertitudes et générant donc un peu plus de tension dramatique. Dans l’idée, en faire une inquisitrice était même extrêmement judicieux, puisque l’occasion de voir un corps de l’armée impériale inconnu, logique dans le prolongement de l’Ordre 66, et par essence redoutable.
Enfin redoutable comme on peut l’être auprès d’enfants auxquels on veut juste vendre des jouets, en leur épargnant tout spectacle désagréable – eh oui, je ne pensais pas non plus que ce serait le public premier d’une telle série.
Ainsi le Grand Inquisiteur adresse-t-il un discours menaçant à des civils pour qu’ils lui dévoilent où se terre un Jedi. Bon, la cinématographie échoue lamentablement à lui conférer quoi que ce soit d’effrayant, mais soit. Reva, qui l’accompagne, joint les actes aux paroles en menaçant de tuer un civil, ce qui force le Jedi à se dévoiler. Normal, pas vrai ? Eh bien le Grand Inquisiteur lui tombe dessus, expliquant que cette violence est intolérable. Oui vous avez bien lu, le Grand Inquisiteur, en charge du massacre des Jedi pour un Empire autoproclamé venant de renverser la République, et qui lui-même se montrait menaçant, estime qu’il ne faut pas menacer les civils pour obtenir des informations.
Si l’objectif de cette brimade avait été d’établir que, sur des planètes n’appartenant pas encore à l’Empire, les Inquisiteurs sont aussi des diplomates, cherchant à donner de l’Empire la meilleure vision possible auprès des populations, j’aurais trouvé le projet passionnant. Mais non, cette écriture désastreuse est juste destinée à manifester les tensions entre Reva et ses collègues, alors même que ce qu’elle fait paraît complètement banal pour des agents de l’Empire, a fortiori parés du titre d’Inquisiteurs.
De même, peu après, alors qu’elle semble sur le point d’arrêter Obi-Wan, le Grand Inquisiteur l’empêche d’achever sa « traque personnelle ». Mais appréhender l’un des plus grands chevaliers Jedi encore en vie ne devrait-il pas être une priorité pour l’Inquisition ? Cette attitude étrange suffit en tout cas à Reva… pour tuer son supérieur, espérant sérieusement que Vador lui donnera sa place, comme si un acte de violence aussi gratuit vis-à-vis de son supérieur hiérarchique ne devrait pas plutôt la condamner dans une structure attachant autant d’importance à l’ordre. L’honnêteté nous forcera à admettre qu’une explication viendra, très tard, quand vous aurez déjà subi moults arrachages de cheveux, et expliquant davantage les tensions que la décision totalement irréfléchie et un peu absurde de Reva, enfin sachons nous satisfaire des semblants de twists, ce n’est pas comme si la série se montrait souvent capable ou même intéressée à nous surprendre.
Et globalement, tout ce qui a trait au personnage de Reva est assez catastrophique. On n’en détaillera rien ici parce que ce serait s’aventurer clairement en terres de spoiler, mais sa motivation profonde semble en complète contradiction avec ses actes, et ses ultimes agissements n’ont pratiquement aucun sens, ou du moins un sens si tordu que l’on ne ressent aucune tension à la voir débarquer sans du tout comprendre ce qu’elle prétend faire.
Vador au secours d’Obi-Wan
Aussi triste que cela soit, la seule vraie raison de voir la série – éventuellement hein, même pour un fan de Star Wars, cela reste dispensable – est Vador. Encore une fois, sa mise en scène n’est souvent pas bonne, comme lors de sa première apparition, dont on sent qu’elle se veut imposante mais ne sait juste pas prendre son temps, pressée qu’elle est de passer à autre chose comme à chaque fois que figer la caméra trois ou quatre secondes pourrait créer une majesté dont vraiment la réalisatrice Deborah Chow ne veut pas – quelle tristesse de se souvenir que c’est Stephen Daldry qui avait sérieusement été rattaché au projet initialement…
De même, quel frisson on commence à ressentir en voyant Vador débarquer et sans hésitation ou effort retenir un vaisseau qui prenait son envol. « Commence » parce qu’encore une fois, on nous montre sa puissance mais on ne s’attache pas à nous la faire ressentir, faisant de ce qui aurait pu être un grand moment du paysage sériel de 2022 un joli moment de cette série en particulier.
Malgré cela, il y a un plaisir indéniable à voir les débuts de Vador, alors qu’il est encore une boule de haine surpuissante sans l’espèce de maturité qui lui viendra avant l’épisode IV. Sa marche est vraiment impériale, massacrant d’un petit geste de la main qui a le malheur de passer près de lui, déployant avec une maîtrise impressionnante des pouvoirs non moins impressionnants. On sent ENFIN pourquoi il était « l’Élu », ce qu’il a de plus que tous les autres Jedi et Sith de ce monde, et quel gâchis monumental constitue sa chute du côté obscur.
Alors bien sûr, il pourrait être écrit plus finement – écrit tout court même pourrait-on dire avec juste une pointe de mauvaise foi – ses interactions, avec Obi-Wan notamment, étant surtout fortes pour leur importance dans notre imaginaire, bien que pas poussées aussi loin dans l’émotion qu’elles auraient pu l’être. Mais voilà enfin Vador – comme dans Fallen Order, encore une fois -, ne laissant de place à personne d’autre, et surtout pas à Reva que l’on tente de nous dépeindre comme une espèce de miroir de Vador, alors qu’elle est une pure fonction au lieu d’être pleinement un personnage, et que chaque confrontation avec son seigneur et maître rappelle davantage qu’elle n’a aucune présence à l’écran à nous offrir.
Il faut bien rentabiliser son abonnement Disney+…
Si cela vous suffit à regarder une série aussi longue qu’une trilogie entière parce que vous n’avez plus grand-chose d’autre à voir (vous avez donc déjà coché Bojack Horseman, Dark Crystal, The Hollow Crown, Twin Peaks, The Leftovers, Legion et Samouraï Jack de votre liste), ma foi libre à vous, mais sachez que vous vous exposez à une pure parenthèse, à une série dont le seul but est de revenir au statu quo sans même avoir pris la peine d’enrichir vraiment son univers ou d’explorer tant que cela ses personnages.
Pour finir sur une note positive malgré tout, je dois vous prévenir que si vous avez tenu jusqu’à la fin du troisième épisode, je vous enjoins quand même à tenir : l’épisode 4 est de loin le meilleur de la série, la fin de l’épisode 5 est très sympathique, bref le meilleur est à venir, malgré tous les problèmes de la conclusion, et sans du tout du tout que cela suffise à recommander l’ensemble.
Très bonne critique et je suis assez d’accord avec tout ça.
De toute façon,que ce soit Boba-fett (power ranger en avant !!), Mandalorian (Petit Yoda ne sert à rien à part nous faire perdre 3h de plans répétitifs sans intérêt) ou ObiWan (Dark Vador cheaté à mort), pour moi c’est de la bouse.
C’est divertissant mais c’est vide et blindé d’incohérence…
Trop de série, tue les séries.
Depuis Disney, à part Rogue One, l’univers Star Wars s’éteint de jour en jour.