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League of Legends, un vrai sport ?

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Au crépuscule de la quatrième saison compétitive de League of Legends, il est intéressant de voir si l’on peut qualifier la pratique intensive de ce divertissement comme un sport.

 

Pour bien savoir de quoi nous parlons, une définition du Larousse s’impose. Et même deux définitions :

 

– Activité physique visant à améliorer sa condition physique.
– Ensemble des exercices physiques se présentant sous forme de jeux individuels ou collectifs, donnant généralement lieu à compétition, pratiqués en observant certaines règles précises.

 

 

Difficile de parler d’amélioration de la condition physique quand on reste assis devant son ordinateur. Néanmoins, cette activité vidéoludique stimule l’activité cérébrale avec notamment une amélioration de la perception des mouvements spatiaux et des connexions neuronales mémoire ainsi qu’une stimulation du centre de la décision. Malgré les croyances populaires, on observe également que les batailles en ligne ne s’effectuent pas sans engagement physique et les parties à haut niveau épuisent psychologiquement et physiquement les joueurs. Confrontées à ce problème, les structures n’hésitent pas à gérer l’emploi du temps de leurs joueurs dans le but de maintenir une hygiène de vie saine et équilibrée et les nuits contrôlées (particulièrement vrai en Corée). Engagé contre les stéréotypes, Riot Games (qui gère League of Legends) n’hésite pas à diffuser des documentaires sur ce sujet afin de promouvoir son jeu mais également pour tenter de faire évoluer les mentalités face à l’eSport.

 

La deuxième définition en revanche est plus intéressante puisqu’elle colle tout à fait à League of Legends. Sans plus attendre, entrons dans la problématique qui nous intéresse : League of Legends peut-il être considéré comme un sport ?

 

[divider]La comparaison avec le football[/divider]

 

Pour commencer, nous pouvons tenter de comparer League of Legends au sport universel par excellence: le football.

On peut trouver beaucoup de points communs entre les deux disciplines.

 

Peu de moyens nécessaires

Si le football est si populaire, c’est que les enfants du monde entier n’ont pas besoin de beaucoup d’argent pour s’amuser toute une après-midi. Deux sacs pour faire les buts, un ballon en plastique pour une dizaine de gamins et la partie peut commencer. Tout le contraire d’autres sports plus coûteux comme le golf, le tennis ou l’équitation. À l’heure de la next-gen et des processeurs de plus en plus puissants pour faire tourner les dernières sorties, League of Legends ne demande pas un ordinateur trop gourmand pour entrer dans la Faille de l’Invocateur. De plus, le jeu est un Free-to-play et le Pay-to-win est limité (il n’est pas possible d’acheter des bonus grâce à de l’argent si ce n’est les pages de runes supplémentaires pour davantage de confort).

Vous n’avez donc besoin que d’un ordinateur correct, une connexion stable, un bureau et une chaise pour accéder à vos parties et vous mesurer aux meilleurs joueurs de votre région.

 

 

Un jeu d’équipe

Tout comme au football, vous ne pourrez pas exploiter pleinement les capacités de League of Legends sans jouer en équipe. C’est ce qui fait le charme du jeu mais qui crispe aussi énormément les utilisateurs. On parle beaucoup de toxicité, de trolls et d’abus dans la Faille de l’Invocateur. C’est pourtant grâce à ça que le jeu marche aussi bien : League of Legends prend une dimension supplémentaire avec la formation d’équipes. Jouer seul en partie classée ou SoloQ devient rapidement un réel calvaire si on est émotif, retrouver les mêmes personnes et jouer en vocal après une dure journée de travail est un bonne façon de décompresser, de la même façon que de se retrouver au terrain de foot tous les dimanches après-midi.

À l’instar d’une équipe de football, il vous sera même capable d’intégrer des teams voire des structures plus sérieuses afin d’enchaîner entraînement, ladder et compétitions. Tout ceci dans le but de parvenir au niveau le plus haut de la compétition européenne voire mondiale. Riot gère pour l’instant les compétitions régionales ainsi que le tournoi mondial de mi-saison et de fin de saison qui peuvent s’apparenter aux compétitions importantes du ballon rond (Coupe du monde, Euro, Copa America, CAN etc…).

 

 

Relayées par Twitch.tv, Youtube ou Dailymotion, les parties de League of Legends sont très populaires en stream et les audiences ne cessent de progresser. Riot annonçait des records pour la finale de la Saison 3 avec plus de 32 millions de viewers (contre 8,2 millions pour la finale de la Saison 2), on ne connaît pas encore les chiffres pour la Saison 4 mais avec le succès de la compétition en Corée, nul doute qu’ils seront excellents pour un jeu vidéo. Là encore, la comparaison avec le football est judicieuse puisque les règles de LoL sont simples : détruire le Nexus adverse. Beaucoup de néophytes ont donc pu regarder la compétition sans même avoir joué au soft avec intérêt. De plus, les combats sont dynamiques et les couleurs vives, ce qui attire l’œil et donne envie aux spectateurs de suivre la partie en cours, grâce aux très bons commentateurs professionnels.

 

[divider]Vers une professionnalisation de League of Legends[/divider]

 

La scène professionnelle de la Ligue des Légendes a bien changé depuis la Saison 1. Entre la flèche de YellOwStaR et la démonstration de force des Samsung White, quatre ans se sont écoulés et l’évolution du nombre de spectateurs a été exponentielle (de 100 à … 40,000 spectateurs dans un stade qui avait accueilli la Coupe du Monde de Football 2002).

 

L’objectif ultime d’une équipe de League of Legends

 

En comparant les deux saisons, on peut se rendre compte que le dernier rendez-vous de la saison régulière prend de plus en plus d’importance pour les structures et les joueurs. Lors des interviews en cours de saison, les joueurs n’hésitent pas à affirmer que le réel objectif de la saison n’est pas forcément de gagner les compétitions régionales mais d’assurer sa place aux Worlds en fin de saison. On assiste alors à un réel mercato hivernal avec transferts inter et intra-régions : les structures désirent mettre toutes les chances de leur côté pour accéder au Graal de fin de saison.

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Les équipes tentent alors de mettre leurs joueurs dans les meilleures conditions possibles en mettant à disposition des Gaming Houses pour vivre et s’entraîner au quotidien, mais aussi des coachs et même des psychologues ou des ostéopathes avant les grandes compétitions. Tous veulent copier le modèle e-sportif coréen qui fonctionne depuis plus de dix ans avec Starcraft.

 

En France, l’eSport souffre du manque de reconnaissance mais également du manque d’infrastructures professionnelles qui parviendraient à lui faire prendre une nouvelle dimension. Il demeure assez peu de Gaming House et aucune fédération ou ligue professionnelle n’est reconnue par l’État.

 

 

 

Ironie du sort, c’est maintenant la Corée du Sud qui a du mal à conserver ses joueurs à l’intérieur de ses frontières. Devant le temps d’entraînement trop élevé imposé aux adolescents, ces derniers désirent être payés davantage en jouant moins et c’est ce que leur propose les équipes Chinoises. Deft par exemple, récent demi-finaliste de la Saison 4 avec Samsung Blue évoluera l’année prochaine pour l’équipe Chinoise d’EDG. Il en va de même pour bon nombre de joueurs qui décident ou ont déjà décidé de tenter le modèle de vie occidental avec le rêve Américain pour Lustboy (TSM) ou Piglet (Curse) et même en Europe avec Horo et Ryu (Millenium). À l’instar du football, ce ne sont donc pas les championnats les plus relevés qui attirent le plus les joueurs mais bien là où il y a de l’argent (Qatar, Russie), un meilleur niveau de vie (attraction de l’Europe pour les joueurs Sud-américains) même si niveau de jeu et argent sont souvent corrélés (Espagne, Angleterre, Allemagne).

 

Pour finir, l’eSport tente de prendre de l’ampleur grâce à la publicité et au sponsoring. En exemple, on peut donner celui de Coca-Cola qui a donné son nom à la deuxième division en Europe et Amérique du Nord (Coke League) et qui a personnalisé ses bouteilles de soda lors de la Coupe du monde en Corée de cette année. Même si de l’argent rentre et que le jeu vidéo se fait connaître, cela ne suffit pas pour professionnaliser League of Legends dans le monde entier.

 

 

[divider]L’amateurisme d’un milieu dangereux[/divider]

 

À la grande différence du football, personne ne sait ce que sera l’eSport dans une dizaine d’années. Riot Games tente de faire pérenniser son jeu grâce à l’ajout de nouveaux patchs, personnages, mises à jour visuelles et saisons depuis cinq ans, mais il n’est pas dit cependant que l’eSport continuera de progresser dans dix ans, ni même que les acteurs principaux détiendront des ligues professionnelles et fédérations. Même si des signes encourageants sont envoyés, comme nous avons pu le voir avant, le milieu de l’eSport n’est pas une garantie d’évolution et de prospérité pour autant.

 

De nombreux problèmes dans le milieu esportif

 

La carrière d’un joueur est encore plus courte que pour un joueur de football et ils sont bien rares ceux qui parviennent à évoluer sur le devant des scènes internationales passés 25 ans. Gagner un tournoi mondial n’assure pas son avenir et beaucoup de joueurs doivent poursuivre leurs études si ils veulent demeurer sur le marché du travail. Au contraire du football, les reconversions sont assez rares et il est difficile de rester dans le milieu de l’eSport une fois qu’on a arrêté le pro-gaming ; certains deviennent commentateurs (Deficio, Kobe, Jatt), d’autres coachs ou manageurs (Araneae, scarra), avec plus ou moins de réussite.

 

Malgré tout, les promesses sont légions et les déceptions encore plus grandes. Le problème des jeux online, c’est que les discussions se font principalement via ordinateur et qu’il est facile de profiter des jeunes joueurs et des situations. En plus d’être un milieu récent, la majorité des joueurs sont jeunes et manquent de maturité ou de stabilité. S’en suivent des imbroglios avec les contrats, les promesses, les équipes et les salaires. Les exemples pullulent sur Internet et on ne citera qu’Alex Ich et Dexter pour des problèmes de Visa ou ImSoFresh dans cette catégorie.

Plus grave est l’affaire de Promise, joueur Coréen de la structure ahq, qui a tenté de mettre fin à ses jours pour une sombre affaire de corruption. Lui et ses quatre partenaires ont été forcés de perdre des matchs contre d’autres équipes de Corée pour permettre au coach de ahq d’empocher le gain de paris truqués en ligne. Frôlant la mort, Promise n’est qu’un exemple de ce milieu sournois qui ne diffère là encore en rien à d’autres exemples de paris sportifs truqués (Championnat Italien de football ou matchs de handball).

 

 

 

Toutes ces histoires ne permettent pas l’embellissement de l’eSport et en regardant les divers bulletins d’information et les chroniques des chaînes nationales (Canal + ou M6 pour ne citer qu’eux), on se rend compte que le jeu vidéo continue d’être moqué par une bonne partie de la population française même si ce constat tend à s’inverser progressivement grâce aux chiffres records d’audience.

 

En conclusion, League of Legends se rapproche davantage de certains sports alliant dextérité (comme le tir à l’arc présent aux Jeux Olympiques) et stratégie (échecs). Riot Games a d’ailleurs peu à peu supprimé au maximum le hasard de son jeu (aussi appelé RNG pour Random Number Generator) pour renforcer le côté stratégique. Ne demeure plus que le pourcentage de coups critiques qui possède des probabilités.

En attendant l’évolution de l’eSport, Riot Games sort la cinquième saison de League of Legends et on ne demande au jeu que de continuer à nous faire vibrer.

 

Et pour vous, est-ce que League of Legends peut être considéré comme un sport ?

 

 

 Sources : Mémoire de Thomas GUERIDON, ICD. « L’eSport comme support de communication »

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