Accueil Ciné Séries Critique à 4 mains – Soul, un film qui fait du bien...

Critique à 4 mains – Soul, un film qui fait du bien à l’âme ?

0
Soul

L’avis de Lucile « Macky » Deloume : Soul, le Disney Pixar le plus jazzy

C’est pendant les fêtes de fin d’années, en famille (pas plus de 6 adultes, je jure), bien au chaud sur le canapé, muni de multiples plaids et d’une tisane bien chaude que j’ai visionné Soul via Disney+. Vous pouvez d’ailleurs retrouver notre Team VG concernant la plateforme de streaming juste ici.

C’est donc en VF (afin de contenter mes parents) que Soul a été visionné. J’en avais entendu parler très très vite fait, sachant uniquement que notre ami Omar Sy s’occupait du doublage français du personnage principal, personnage principal était fan de jazz. Point à la ligne. C’est maigre n’est-ce pas ? Tant mieux ! J’ai donc pu découvrir le film avec un réel entrain ! Mais avant de rentrer dans le vif du sujet, voici un petit synopsis.

Soul

Passionné de jazz et professeur de musique dans un collège, Joe Gardner a enfin l’opportunité de réaliser son rêve : jouer dans le meilleur club de jazz de New York. Mais un malencontreux faux pas le précipite dans le « Grand Avant » – un endroit fantastique où les nouvelles âmes acquièrent leur personnalité, leur caractère et leur spécificité avant d’être envoyées sur Terre.

Bien décidé à retrouver sa vie, Joe fait équipe avec 22, une âme espiègle et pleine d’esprit, qui n’a jamais saisi l’intérêt de vivre une vie humaine. En essayant désespérément de montrer à 22 à quel point l’existence est formidable, Joe pourrait bien découvrir les réponses aux questions les plus importantes sur le sens de la vie.

 

Soul, un film en deux parties 

Commençons donc par la première partie, avec le fameux « Grand Avant ». J’ai trouvé l’image très jolie. En théorie, c’est un monde peuplé d’âmes en forme de petits fantômes vraiment cute qui rappellent très fortement Vice Versa. Ces dernières sont encadrées par des créatures divines, douces et accueillantes difficiles à décrire, et qui s’appellent toutes Michel alors si quelqu’un a une théorie là dessus, je prends ! Les âmes sont là pour trouver trouver leur personnalité, ce qui les anime, afin de pouvoir partir sur Terre.

Le « Grand Avant » est apaisant, calme, serein. C’est un bel endroit très doux et pastel où clairement, on aimerait bien aller se balader. C’est un lieu qui fait du bien, où il n’y a pas de malveillance et où toute chose a ou trouvera tôt ou tard sa place. Mais bien évidemment, Joe n’appartient pas au « Grand Avant ». Il appartient à la Terre, ou bien à la Mort. Cela reste à déterminer. Il voit alors en 22 la solution : l’aider à trouver ce qui l’anime, prendre son badge, et retourner sur Terre. Facile ? Pas vraiment.

Soul

Passé donc le choc de ce qui est en train de lui arriver, la compréhension de sa condition, de l’endroit où il est. Après avoir réfléchi, il entreprend d’utiliser 22, mais rassurez-vous, ce dernier y voit aussi son intérêt sauf qu’évidemment, tout ne se passe pas comme prévu.

 

L’aventure et le questionnement dans un second temps

Fini le « Grand Avant » calme et apaisant, place à un New York vivant, coloré et qui ne reprend jamais son souffle. Terry, le comptable des âmes, si on peut l’appeler ainsi, a beau compter et re-compter, il lui manque une âme, et après avoir mené son enquête, il s’avère que Joe manque à l’appel. Sans surprise, rien ne se passe comme prévu et nous allons ainsi de péripéties en péripéties.

Soul

Les sujets abordés ne sont pas simples : la vie, la mort, mais aussi le sens de la vie, que de philosophie pour un film pour enfant, qui très habilement, parle aisément à tout le monde. On appréciera donc la façon dont ils sont observés mais aussi traités.

 

Alors, on aime ? 

Oui, on aime ! Soul a su, selon moi, parler aux petits comme aux plus grands. Un exercice pas facile à mettre en œuvre. Beaucoup de questions existentielles sont ici soulevées et aident même à remettre certaines choses en perspectives. Avec une douce simplicité, même si les plus jeunes ont, j’en suis sûre, du mal à comprendre le message, Soul rappelle la beauté de la vie, sa fragilité et le pourquoi de la mort. Oui, rien que ça ! Soul, c’est un film d’animation poétique qui m’a fait du bien (et en ce moment, tout ce qui fait du bien est bon à prendre) et pour ça, je le recommande chaudement.

Mention spéciale à la BO qui est tout simplement exquise. D’ailleurs, je ne peux que vous recommander l’écoute d’un titre tiré du film, que voici :

 

Vous ne l’avez toujours pas vu et vous vous tâtez encore ? N’hésitez pas à jeter un œil à la bande-annonce.

 

L’avis de Siegfried Moyocoyani Würtz : Soul, un Pixar sans âme ?

Le titre est provocateur bien sûr, je suis loin de l’intention de brocarder à ce point le dernier-né des studios Disney/Pixar, mais il exprime du moins ma rupture avec la critique de Lucile, ainsi que ma déception.

C’est en très grande partie ma faute d’ailleurs : m’étant fié aux critiques promettant un Pixar très adulte, et à une bande-annonce extrêmement stimulante, je m’attendais à être confronté à une espèce de suite spirituelle de Vice Versa, traitant avec poésie mais force des questionnements plus métaphysiques, à travers un protagoniste d’ailleurs plus mûr et praticien d’un genre musical réputé exigeant. On était bien partis.

Vous devriez regarder aussi ça :
Sou Bou Tei, le chef-d'œuvre inédit de Kazuhiro Fujita !

 

Je ne sais dès lors pas si les auteurs ont eu peur d’aller trop loin, et ont cherché à contrebalancer leur ambition par tant d’enfantillages qu’ils l’ont perdue, comme la substance active est perdue à force de dilution dans l’homéopathie (pardon pour cette charge digressive) ; ou s’ils n’ont en fait jamais été si inspirés que cela, et ont plutôt tenté d’instiller quelques piques de maturité dans ce qui reste un produit trop familial.

Toujours est-il que j’en admets volontiers la relative réussite à stimuler les plus jeunes âmes en les exposant aux questions difficiles de la mort et de la vocation, tout en jugeant le résultat souvent creux à force d’infantilisations, bien plus encore que Vice Versa. À vrai dire, Soul… m’a même fait mieux apprécier Vice Versa, par lequel je n’avais pas été initialement convaincu, tant ce dernier s’avère nettement plus mûr et plus intense alors qu’il poursuit manifestement la même quête par les mêmes moyens, et qu’il y parvenait un peu, quand Soul réussit bien peu.

 

Je sais, je sais, je me perds en grandes généralités alors que l’on aimerait qu’une critique aussi violente s’appuie sur des éléments plus précis, mais il est difficile d’argumenter sur le film sans le spoiler, tant il trouve de sens au fur et à mesure qu’il progresse, et déçoit donc principalement par l’insuffisance de sa conclusion… Enfin essayons.

Vice versa

 

Commençons par dire que Soul ne parle pas de la mort. Les concepts qu’il déploie de pont de la mort, de grande lumière, de Grand Avant, de badge, de désert des âmes perdues (l’un des moins convaincants) ne sont que des idées auxquelles bien sûr les auteurs ne croient pas, dont ils ne font pas la promotion, mais qui construisent le monde fictif sur lequel est fondé leur intrigue.

Ils n’ont pas de valeur pédagogique, et en fait même pas de valeur métaphorique, servant seulement de prétexte dramatique (le héros doit essayer de fuir la mort) et psychologique (le héros doit se remettre en question face à un événement aussi grave que sa disparition sans avoir rien accompli). Ce n’est pas un mal, attention, seulement quelque chose qu’il faut avoir à l’esprit parce que l’on entend beaucoup le contraire, quand au mieux la mort dans Soul interroge le spectateur sur ce que nous avons fait et aurions dû faire pendant notre vie.

 

Or le moins que l’on puisse dire, c’est que le film passe énormément de temps en worldbuilding, à tenter d’exposer la cohérence de son au-delà, ce qui ne permet ni d’y croire mieux (encore une fois, il est trop perché pour que l’on y adhère) ni de mieux l’exploiter – contrairement à Vice Versa, l’intrigue s’attache à quelques aspects très précis, parfois rapidement, le reste étant plutôt là pour le plaisir de l’imagination. Ce monde complexe n’a donc pas le charme de l’évidence, ou au moins de la découverte progressive de ses particularités au fur et à mesure que c’est important pour l’intrigue.

Aussi est-on bien loin du charme immédiat de Vice Versa encore une fois, dont la métaphore initiale des émotions sur leur console est immédiatement assimilée, et dont chaque aspect du monde fictif sert l’histoire ou même, dans un genre différent, du minimalisme d’un Les Mondes de Ralph, dont l’idée centrale – un personnage de jeu vidéo explore d’autres jeux vidéos – tient sur un timbre-poste et permet tellement.

Les Mondes de Ralph

 

L’analogie avec Les Mondes de Ralph n’est pas innocente, étant donné que Soul raconte aussi la relation d’amitié complexe entre un homme mal dans sa peau, émotif et assez égoïste, et un personnage féminin ou asexué mais plutôt identifié comme une femme (doublé d’ailleurs par des femmes en VF et VO), hyperactif et rebelle.

Et la dynamique des deux duos est extrêmement proche, avec une amitié naissante, l’inévitable rupture, la réconciliation… Sur ce plan, j’ai même trouvé Les Mondes de Ralph 2 plus riche, sans doute aussi parce que Soul souffre de copier cette relation si peu de temps après, et paraît d’autant plus bassement cliché qu’il voulait paraître plus malin.

 

Je ne dirais rien enfin de la morale du film, parce qu’elle peut se deviner assez tôt mais est particulièrement notable dans sa malhonnêteté par son illustration en conclusion du film – ou plutôt son absence d’illustration, justement. Or après 1 heure 45 de film à morale, on pense mériter au moins la monstration de la morale, plutôt que son énonciation verbale sans effet visible…

Trop enfantin dans les émotions qu’il cherche, trop cliché dans sa structure narrative, trop superficiel dans ses efforts de worldbuildingSoul se regarde bien parce qu’il reste joli et comporte quelques belles scènes humaines (même si elles ne sont pas aussi bien écrites et donc émouvantes que celles de Vice Versa – on y revient toujours), mais m’a beaucoup déçu.

Comme je ne voudrais pas rester sur une note négative, permettez-moi de vous recommander les extraordinaires films d’animation Le Garçon et le Monde et peut-être surtout L’Extraordinaire Voyage de Marona, plus accessible que le premier, plus récent, et beaucoup plus percutant que Soul dans son interrogation des choix de vie et sa mise en scène de la mort – et même beaucoup plus inventif visuellement, alors qu’attendez-vous ?

Extraordinaire Voyage Marona

 

AUCUN COMMENTAIRE