Sub Terra : Annihilation, Investigation et Extraction, les extensions pour creuser votre tombe
Il y a quelques jours, on vous présentait le jeu de société Sub Terra de Tom Pinder, édité par Inside the Box Board Games et localisé par Nuts! Publishing (La Traque de l’Anneau, One Deck Dungeon, AuZtralia). KickStarter à succès, le jeu avait été si apprécié par la communauté des joueurs qu’il avait vite été en rupture. Heureusement, en attendant le nouveau tirage récemment promis par Nuts!, Sub Terra avait été lancé avec plusieurs accessoires et trois extensions, Annihilation, Investigation et Extraction. De quoi frustrer davantage encore ceux qui n’ont pu mettre la main sur le jeu à temps, et leur promettre une expérience encore plus riche et variée pour le moment où ils pourront enfin en profiter !
Je n’avais aucun reproche à adresser à Sub Terra. Le jeu est étonnamment abstrait graphiquement pour une production horrifique, mais c’est afin de laisser plus de place à l’imagination et de rester parfaitement lisible. Il est très soumis à l’aléa du dé, du tirage des cartes Danger et du dévoilement des tuiles, mais c’est pour créer une forte rejouabilité et faire bénéficier d’une expérience ludo-narrative, très portée sur l’ambiance et l’immersion plutôt que sur le contrôle et une tactique rigoureuse. Il ne proposait que huit spéléologues… mais c’est déjà franchement beaucoup, tant ils incarnent des stratégies radicalement différentes, et donc des dynamiques individuelles et de groupes particulières.
Voyons donc rapidement ce que valent ces additions et extensions, ce qu’elles prétendent apporter à Sub Terra, sans revenir en détail sur des règles déjà présentées exhaustivement dans l’article dédié !
Les accessoires : dés et figurines
Commençons par l’addition la plus gadget : toute commande de Sub Terra était accompagnée gratuitement d’un petit sac contenant six dés, un D4, un D6, un D8, un D10, un D12 et un D20. Je n’emploie même pas le terme « gadget » péjorativement, c’est simplement que Sub Terra se joue… avec un simple D6 phosphorescent, de sorte que ces accessoires sont destinés à d’autres jeux. Et le plus paradoxal là-dedans, c’est qu’ils sont finement ouvragés pour correspondre à une esthétique horrifique, et que même le petit sac noir porte le nom du jeu sans aucun logo, le genre de soin que l’on est souvent déçu de ne pas retrouver dans d’autres productions où les dés sont quelconques et les sacs à jetons neutres, quand ils ne portent pas seulement le nom de l’éditeur. Une belle preuve de la volonté d’ITB et Nuts de constituer un univers étendu et immersif.
L’autre addition en termes d’accessoire était probablement une nécessité pour un financement participatif sur un sujet geek et pour un public tant français qu’états-unien. Six figurines représentent les horreurs, dans deux positions différentes, pour remplacer les jetons plus abstraits du jeu. Je dois personnellement confesser une légère préférence pour les jetons originaux, parce qu’il me semble que l’immersion fonctionne mieux grâce à cette abstraction justement, alors que la matérialisation de la menace la rend beaucoup plus commune. Je suis cependant certain que, bien peintes, elles feraient leur petit effet, et il m’arrive de temps à autre de les utiliser, soit parce que je sens que mes partenaires de jeu seraient plus réceptives au figurines, soit par souci de variété.
Par ailleurs, chacun des huit spéléologues a également sa figurine, ainsi que les trois personnages supplémentaires des extensions Annihilation, Investigation et Extraction. Toutes sont représentées de façon assez détaillée pour qu’on les reconnaissance immédiatement à partir de leur illustration, et pour plus de lisibilité encore, elles sont posées sur un socle de la couleur de leur plateau personnage. Pour plus d’immersion, rien ne vous empêche de retirer ces socles, dont les spéléologues n’ont pas besoin pour tenir debout, et qui prennent un petit peu trop de place sur les petites cases des cavernes. Les meeples spéléologues étaient charmants, mais pour le coup, la matérialisation de ses avatars peut avoir quelque chose d’assez saisissant, et j’apprécie beaucoup l’attention d’avoir ajouté des socles facultatifs et amovibles !
La grande question est celle de la qualité de ces figurines, et je suis certain qu’ITB a beaucoup hésité entre les options les plus radicales, y compris celle de proposer de la résine. Le choix final est probablement le plus judicieux, puisque les figurines sont réalisées dans un plastique de qualité assez moyenne, juste suffisante pour lui assurer une relative solidité, une bonne assise et un niveau de détails très satisfaisant, avec un prix beaucoup plus doux que ce que l’on pourrait redouter : la boîte des six horreurs est vendue 14 euros 50, celle des huit spéléologues de la boîte de base 17 euros 90, celle des spéléologues d’Annhilation, Extraction et Investigation 9 euros.
Annihilation : il est temps de contre-attaquer
Dans l’extension Annihilation, disponible pour 14 euros 50, il n’est plus question de subir les attaques des horreurs. Vous savez désormais quels monstres peuplent les profondeurs, et vous décidez d’y retourner pour les exterminer.
La tuile de départ n’est cette fois plus posée au milieu de la table, mais à une extrémité, et directement connectée à la tuile sortie : vous savez désormais ce que vous faites, et n’avez plus l’intention de fuir. Deux nouvelles tuiles Éboulement proche sont mélangées avec les autres tuiles Caverne, dont on ôte ensuite 18 tuiles sans les regarder. La pile de tuiles est ensuite divisée en quatre piles de taille à peu près égales. Deux des nouvelles tuiles Bombe sont mélangées avec la deuxième et la troisième pile, tandis que la troisième tuile Bombe est mélangée avec les cinq dernières tuiles de la quatrième pile. Puis les quatre piles sont réunies pour former une seule pile, évidemment sans la mélanger. Trois nouvelles cartes objet Bombe sont données à trois spéléologues. Et on peut commencer la partie.
Vous l’aurez peut-être compris, l’objectif d’Annihilation est de placer les trois cartes objet Bombe sur les trois tuiles Bombe, puis seulement de sortir de la caverne. Un spéléologue peut évidemment donner une carte Bombe à un autre spéléologue avec l’action Transmettre, pour un point d’action, et la pose de la carte sur la tuile est une action de défausse d’objet, coûtant également un point.
On se souvient que lors d’un éboulement, il fallait lancer un dé, et si l’on obtenait l’un des deux résultats de dé indiqués, l’éboulement avait lieu. Avec les tuiles Éboulement proche, l’éboulement a lieu si l’on obtient l’un des trois résultats de dé indiqués, ce qui augmente donc considérablement les risques.
Enfin, Annihilation propose un nouveau personnage de spéléologue, l’exterminateur. Comme presque tous les personnages, il dispose initialement de trois points de santé. L’exterminateur possède un masque à gaz, ce qui lui évite les dégâts liés au gaz. Et pour un point d’action, il peut poser l’un des huit nouveaux marqueurs Poison sur la tuile horreur sur laquelle il se trouve, ou adjacente à celle sur laquelle il se trouve. Il empoisonne ainsi un nid d’horreurs, qui n’apparaîtront plus depuis cette tuile.
Investigation : sauvetage, secrets et objets
Après Annihilation et son agressivité, Investigation (13 euros 50) vous met plus mystérieusement dans la peau d’une agente chargée de retrouver les spéléologues disparus dans les cavernes.
On mélange au moment de la mise en place les trois nouvelles tuiles Objet avec le reste des tuiles Caverne, puis on ôte trois tuiles sans les regarder. Les quinze cartes Objet sont mélangées pour former une nouvelle pile. Enfin, on ajoute à la pile de cartes Danger les trois cartes Malédiction. Quand l’une de ces cartes sera piochée, elle doublera l’effet de la carte suivante au prochain tour, à moins qu’il s’agisse déjà d’un double-danger ou d’une malédiction. On n’est épargné un tour que pour devoir redoubler de prudence au tour suivant…
La nouvelle spéléologue, l’agente, pioche dès le début de la partie les cinq premières cartes de la pile Objet, avant d’en replacer deux au-dessous. Pour deux points d’action, elle peut récupérer dans sa main un objet qu’elle aurait défaussé précédemment.
Les autres spéléologues peuvent également récupérer des objets soit par transmission, soit en pénétrant pour la première fois sur une tuile Objet.
Trois objets ont un effet permanent : le porte-bonheur ajoute 1 aux lancers de dé, la combinaison amphibie permet la plongée, la pelle réduit à 1 le coût en points d’action du dégagement des éboulis. Trois objets réagissent à un événement, comme le plan griffonné, qui permet de remplacer une seule fois une nouvelle tuile par la tuile suivante dans la pile Caverne, ou le masque à gaz, qui une seule fois préserve des dégâts du gaz. Les neuf autres ont un effet unique, exigeant parfois un coût en points d’action. L’amplificateur de signal octroie immédiatement un point à un autre joueur, les tranquillisants soignent de deux points de santé, la grenade tue toutes les horreurs d’une tuile adjacente…
Extraction : une nouvelle menace tapie dans l’ombre…
Dans Extraction (14 euros 50), vous découvrez l’existence d’une menace pire encore que les horreurs, parce que beaucoup plus rapide. Contrairement à Annihilation, il ne s’agit pas de la vaincre (cela est-il seulement possible ?) mais déjà de ramener la preuve de son existence à la surface pour réfléchir aux manières de s’en prémunir…
Au moment de la mise en place, on mélange les deux nouvelles tuiles Horreur et la nouvelle tuile Sanctuaire aux tuiles Caverne, dont trois sont ensuite aléatoirement replacées dans la boîte. Pas moins de six nouvelles cartes Danger, les sauteurs, sont ajoutées à la pile Danger.
Les sauteurs sont bien considérés comme des horreurs et se plient aux mêmes règles, avec cette différence qu’ils se déplacent de deux tuiles à la fois et ôtent deux points de vie au spéléologue qu’ils rencontrent avant de retourner dans les ombres. Ils sont donc moins dangereux, mais infiniment plus difficiles à fuir, surtout dans une extension contenant six cartes Danger supplémentaires pour faire apparaître de nouvelles horreurs et les déplacer ! Heureusement qu’il existe une tuile Sanctuaire (si vous la trouvez avant de mourir), infranchissable pour les horreurs, et où les spéléologues ne peuvent pas être pris en considération pour leur déplacement vers la victime la plus proche. Un lieu que vous serez très soulagé de découvrir !
La nouvelle spéléologue est la mercenaire – une femme forte, cela fait plaisir. Pour un point d’action, elle peut découvrir deux nouvelles tuiles en une fois. Pour deux points d’action, elle fortifie une tuile, de sorte que toute horreur pénétrant sur cette tuile sera immédiatement retirée, jusqu’à ce que la mercenaire la quitte ou tombe inconsciente.
Extraction a enfin la stimulante idée de comporter un objectif optionnel, l’extraction d’échantillons. Si les joueurs souhaitent pratiquer Sub Terra avec cette nouvelle mission, trois spéléologues doivent porter une carte Objet Échantillon biologique, qui retranche 1 à tous les jets de talent. En plus de faire sortir le plus de spéléologues possibles des cavernes, il faut impérativement rapporter les trois échantillons à la surface. S’il reste un seul échantillon dans la caverne, et même si tous les spéléologues ont été sauvés; la partie est perdue. De quoi ajouter une intéressante augmentation de la difficulté ne passant pas que par l’augmentation de dangers.
Annihilation, Investigation, Extraction, des extensions indispensables ?
Deux aspects me rendaient sympathiques les trois extensions de Sub Terra avant même que je n’y joue, leur prix assez faible, autour des quinze euros, pour un enrichissement sincère et apprécié de l’expérience initiale, et la création d’une certaine chronologie, les règles de la boîte de base narrant la découverte des cavernes, tandis que les trois extensions racontent des missions postérieures, trois réactions différentes à la nouvelle de l’accident et de l’existence des horreurs. On pourrait alors très bien envisager de jouer Sub Terra en campagne, quelques parties de la boîte en base avec des variantes pour imiter plusieurs étapes du scénario horrifique, puis les trois extensions les unes après les autres. Il y a assurément de quoi construire quelque chose de fluide et d’immersif.
Quand on regarde au contenu, et après avoir de fait constaté le bon rapport qualité/prix, il est difficile de ne pas apprécier la simplicité des additions. Les nouveaux objectifs, avec les nouveaux personnages et le nouveau matériel qu’ils impliquent, sont juste assez originaux pour donner effectivement la sensation de réaliser autre chose qu’une partie « normale » de Sub Terra, et juste assez dans sa continuité pour que sa connaissance puisse être habilement réinvestie. Comme promis, on se livre bien à un Sub Terra +, avec ce qu’il faut de liberté laissée au joueur, par exemple en utilisant les nouveaux personnages sans recourir immédiatement aux nouvelles règles. Annihilation, Investigation et Extraction enrichissent l’expérience initiale sans la pervertir, enrichissent l’univers créé sans abuser des joueurs/acheteurs… voilà qui mérite assurément attention, et ajoute quelques arguments pour s’intéresser même au jeu de base !