Bärenpark – construisez le plus beau parc à ursidés
Funforge, ce n’est pas que Monumental, Tokaido ou Professeur Evil et la Citadelle du Temps, ce qui est déjà beaucoup, c’est aussi la localisation d’un joli catalogue des jeux de Lookout Spiele. Même si Asmodée a récemment acheté l’éditeur allemand, ce catalogue devrait rester aux mains de Funforge pour les trois prochaines années, et ceux-ci n’ont pas l’intention de laisser moisir les productions reconnues qu’ils ont obtenu le droit d’éditer et de distribuer en France pour notre plus grand bonheur. Cela incluait par exemple Agricola, Caverna et le coup de cœur Patchwork, Funforge ayant mis les bouchées doubles pour sortir en cette fin d’année le reste de la partie de catalogue dont il a les droits.
On a donc récemment assisté à la parution de trois nouvelles localisations de jeux de Lookout, Bärenpark, Gingerbread House et l’extension Druides pour le classique Isle of Skye. Comme le trahit le titre de l’article, nous nous concentrerons aujourd’hui sur le Bärenpark de Phil Walker-Harding (Gingerbread House, Cacao, Imhotep), illustré par l’incontournable Klemens Franz (Agricola, Patchwork, Isle of Skye, Montana, Caverna…). Bärenpark signifie « parc des ours », logique pour un jeu proposant aux joueurs de construire le plus beau, le plus varié et le mieux agencé des zoos à ursidés de la ville.
Dans la veine de Patchwork, avec à peine plus de mécaniques, Bärenpark appartient à ces petits jeux à l’allemande, juste pervers ce qu’il faut, mais aisément accessibles dès huit ans. Les parties occuperont deux à quatre joueurs entre 30 et 45 minutes, et le jeu pourra être obtenu pour 29 euros.
Disposition des entrepôts
Après une longue phase de dépunchage et de rangement dans des sachets – pas de rangement « intelligent » de type thermoformage dans le jeu à l’allemande malheureusement – on peut enfin mettre en place le matériel afin qu’il soit à disposition des joueurs pendant la partie. Pour cela, on place le plateau d’approvisionnement, où l’on empile dans les zones correspondantes (très clairement signalées avec des dessins joliment enfantins) les espaces vers, les toilettes, les terrains de jeu, les boutiques, les cours d’eau, les enclos et les animaleries selon leur forme et par ordre décroissant. C’est là qu’on apprécie les règles claires, et effectivement, celles de Bärenpark ne sont pas juste illustrées, mais nettement distinguées dans des encarts aérés, un plaisir.
À côté du plateau, on dispose les statues d’ours en ligne par ordre croissant, ainsi que les 12 sections de parc en deux piles de six tuiles, seule la tuile supérieure de chaque pile étant visible des joueurs.
Chaque joueur reçoit alors une tuile de section de parc avec une entrée, qui lui indiquera à quelle nationalité appartiennent les investisseurs de son parc (suisses, français, allemands ou tchèques), un élément purement cosmétique bien sûr.
Vous aurez alors devant vous ce qui ressemble à une réserve d’éléments de Tetris et un petit plateau personnel, qu’il s’agira de compléter au mieux.
Entre Tetris et Tycoon
Le dernier joueur a avoir été au zoo commence et pioche une tuile toilettes (qui occupe une case), tandis que le deuxième et le troisième piochent un terrain de jeu (deux cases) et le quatrième une tuile boutique (trois cases). À deux joueurs, le premier prend les toilettes et le deuxième un terrain de jeu, à trois joueurs le dernier prend une boutique.
Un tour se divise en trois phases. La première consiste à placer une tuile (au premier tour, la seule que vous avez en votre possession) ou à passer si ce n’est pas possible, auquel cas on peut prendre au choix des toilettes, un terrain de jeu, une boutique ou un cours d’eau dans la réserve (on appelle tous ces éléments des « espaces verts »). Les règles de placement sont simples : à l’exception de la première, elle doit être adjacente orthogonalement (pas en diagonale) à une tuile déjà posée ; elle ne doit pas couvrir le trou représenté sur le plateau individuel, et pour les consignes élémentaires, elle ne peut pas dépasser du parc ni recouvrir une autre tuile. La base.
La deuxième phase consiste à appliquer les effets des icônes recouvertes avec la tuile, dans l’ordre de son choix, un peu à la Nemeton. La brouette permet de prendre un espace vert dans la réserve, la bétonnière de prendre une animalerie du dessus d’une pile ou un espace vert, la pelleteuse un enclos ou une animalerie au sommet d’une pile ou un espace vert, les ouvriers une section de parc au sommet d’une pile. Au contraire des autres éléments, directement placés dans la réserve, la section de parc augmente immédiatement la surface de votre zoo en étant placée orthogonalement à côté d’une autre section de parc, derrière l’entrée, et orientée dans le même sens que les autres sections. Mais un zoo ne peut pas s’étendre à volonté, il y a un moment où il vaut mieux penser optimisation qu’extension (faire trop marcher les visiteurs vous rendrait impopulaire) : les joueurs sont donc limités à quatre sections par zoo, y compris la section d’entrée.
La troisième phase consiste enfin à embellir une section de parc avec la statue d’ours de la valeur la plus élevée, à condition qu’elle ait été complétée (que toutes les cases en soient couvertes, à l’exception du trou, réservé à la statue). La complétion de plusieurs sections au même tour octroie autant d’ours, autant dire qu’être rapide paye, et qu’il faudra bien réfléchir à l’intérêt des grandes tuiles occupant beaucoup d’espace mais laissant beaucoup de trous, contre celui des petits espaces verts, parfaits pour combler les interstices, mais naturellement moins efficaces.
Une fois les trois phases accomplies (dit comme cela, on pourrait croire que c’est beaucoup, mais cela ne prend guère que deux minutes), on passe la main au joueur suivant.
Un mode « expert » y ajoute une quatrième phase, très recommandée, éventuellement après votre première partie en trois phases. Il s’agit de fixer trois objectifs parmi les dix proposés dans le boîte de Bärenpark, chacun subdivisé en trois tuiles (deux tuiles à deux joueurs). La quatrième phase consiste simplement à prendre les tuiles correspondant aux objectifs remplis, les tuiles supérieures valant naturellement plus de points que les tuiles inférieures, aux conditions desquelles les joueurs satisfont donc après leurs rivaux.
Le plus beau zoo à ours du monde
Dès qu’un joueur a complété ses quatre sections du parc, on finit le tour de chaque constructeur puis la partie.
On procède alors au calcul des points en additionnant la valeur des statues, celle des animaleries, celle des enclos, et celle des objectifs. En cas d’égalité, le joueur possédant la plus grande valeur de tuiles dans sa réserve remporte la partie.
Difficile de faire plus simple, et c’est sans doute ce qui fait la force de Bärenpark et plus globalement de cette gamme de jeux très familiaux de Lookout Spiele. Des joueurs expérimentés trouveront probablement plus de plaisir à Patchwork, sans même parler de Caverna, mais pour un jeu à la Kingdomino (placement de tuiles à la Tetris, complétion d’une zone pour un bonus, cohérence des choix d’organisation), Bärenpark s’avère un jeu d’ambiance très agréable auquel il est tout à fait possible de se prêter très sérieusement une fois que l’on a perçu sa profusion tactique. Sans surprise compte tenu de la qualité habituelle des jeux de Lookout, et exactement comme le Kingdomino de Bruno Cathala, Bärenpark constitue une excellente introduction au jeu de placement pour les plus jeunes, et une expérience charmante (avec ce que cela peut comporter de regards en coin, de cheveux arrachés de désespoir) pour les autres.