89ème Cérémonie des Oscars : nos commentaires sur le palmarès
La 89ème cérémonie des Oscars se tient, comme chaque année, au Dolby Theatre de Los Angeles, et la présentation en est confiée au très célèbre animateur Jimmy Kimmel (dont le Jimmy Kimmel Live ! sur ABC est, avec les émissions similaires de David Letterman, le talk-show américain le plus regardé). Aucune polémique particulièrement pugnace n’est venue ternir la cérémonie, mais l’on se demande évidemment si les discours oseront viser l’investiture de Donald Trump, comme Ruffin se moqua de Vincent Bolloré à la cérémonie des Césars, alors que Bolloré est la président du groupe Canal + qui la diffusait justement.
Parmi les moments très attendus, notamment grâce à une jolie sélection de stars pour remettre les prix, on peut déjà citer la présentation par Dwayne Johnson de la chanson de Vaiana nominée pour l’oscar de la meilleure chanson, la présence d’Ang Lee, Steven Spielberg, Iñarritu et James Cameron pour donner le nom du meilleur réalisateur, de DiCaprio pour récompenser la meilleure actrice et Alicia Vikander le meilleur acteur dans un second rôle, tandis que dans un registre plus loufoque, c’est la famille Simpson qui remettra l’Oscar du meilleur film d’animation, et le duo Bob l’éponge-Patrick l’Oscar du meilleur court-métrage d’animation ! Bref, une cérémonie à regarder, même en différé !
Mais si cette année est remarquable, c’est aussi parce qu’aucun film ne se présente comme un favori absolu parmi les nominés. Bien sûr, le triomphe de La La Land aux Golden Globes, et les pronostics nous donnent déjà de sérieux indices… Rien de commun cependant avec une édition précédente où The Revenant et Mad Max : Fury Road étaient dans tous les cœurs ! Les films nominés cette année sont plus nombreux, et ont été moins vus, d’une part parce qu’ils sont pour la plupart sortis assez tard en France (voire pas encore sortis pour Les Figures de l’ombre ou 20th Century Women), d’autre part parce qu’ils ont été moins hypés, et parfois simplement assez peu remarqués en salles. En donnant la part belle à des productions plus humbles, à des films plus humains que les mastodontes habituels, l’Académie promet de récompenser des films capables d’émouvoir le public plutôt que de l’impressionner, un choix qui pourrait se faire au détriment de Premier Contact, dont j’avais personnellement fait mon film américain de l’année 2016.
S’il subsiste des erreurs, si les commentaires sont de longueur et d’intérêt inégaux, c’st en grande partie imputable au format choisi : pour être réactif « en direct », les avis ont été rédigés immédiatement après l’annonce de chaque prix, donc dans le temps séparant cette annonce de l’annonce suivante, et entre 2 heures 30 et 6 heures 30, heure française. Surtout n’hésitez donc pas à faire remarquer des incorrections ou à demander des précisions sur telle ou telle récompense/sélection, ayant vu pratiquement tous les films nominés (dans le cas contraire, je le précise explicitement), j’aurais eu beaucoup plus à dire si je n’avais pas voulu rester dans une limite raisonnable en terme de longueur de texte !
Meilleur film : La La Land… mais en fait Moonlight !
Sur les neuf films nominés – chiffre record qui oublie pourtant Billy Lynn’s Long Halftime Walk ou American Honey – au moins trois ne semblent là que pour éviter les polémiques sur l’absence de représentation des femmes, des Noirs et des minorités, sans avoir aucune chance d’obtenir la statuette : Hidden Figures, Fences et Lion. Deux autres ne sont cités que pour le principe de faire croire que des films indépendants auraient leur chance, Manchester by the sea et Comancheria, de sorte que quatre seulement sont des prétendants à peu près sérieux, laissant la place à une éventuelle surprise… qui n’arrive pas et qui arrive, puisque Faye Dunaway, se trompant d’enveloppe, annonce la victoire de La La Land, avant d’être corrigée par son producteur…alors que Chazelle et son équipe commencent leur discours de remerciements, et sous le regard incrédule d’un public qui croit à une blague ! C’est donc en fait Moonlight qui est, d’après l’Académie, le meilleur film de l’année.
Moonlight appartient définitivement aux grandes surprises de la saison cinématographique : ce petit film relativement indépendant racontant, sur trois périodes de sa vie, d’un jeune noir en mal de repères dans le Miami contemporain ressemblait davantage à la caution morale que les festivals nominent parfois pour se donner bonne conscience qu’à un challenger sérieux aux grosses productions du moment. Son succès populaire retentissant, son obtention du Golden Globe du meilleur film dramatique couplée à ses trois récompenses aux Oscars, ont ainsi quelque chose de rassurant sur l’état du cinéma (et du public) actuel.
Les noms de ses producteurs suffisent cependant à attiser une puissante curiosité : A24 et surtout l’excellente société de Brad Pitt Plan B Entertainment (qui s’est illustré sur des films aussi marquants que The Tree of Life, Killing them softly, Selma et bientôt the Lost City of Z) faillissent rarement à faire la monstration d’un humanisme authentique dans une forme ambitieuse, de sorte que le film de Barry Jenkins s’inscrit parfaitement dans ce projet audacieux, tant thématiquement qu’artistiquement. Ce dernier prouve en effet que l’on peut réaliser un film sur un noir d’une banlieue de Miami peuplée de dealers et de camés, a fortiori sur un noir cherchant à se définir tant psychologiquement que sexuellement, et découvrant son homosexualité, sans dramatiser à outrance, sans grande catastrophe raciste ou homophobe, sans guerre des gangs et sans un didactisme malvenu qui aurait nui à l’efficacité et à l’émotion suscitée par les images de ce parcours, tourmenté mais finalement ordinaire.
C’est ainsi quand Moonlight parle le moins qu’il est le plus beau, et Jenkins l’a bien compris, en livrant des dialogues maladroits, redondants, plats, où les personnages n’expriment que leur incapacité à communiquer oralement, et qui mettent en valeur les attitudes, les regards, les démarches, riches de sens et auxquels le film doit de véritables moments de grâce, de la mémorable scène où Chiron apprend à nager au silence final. Cela n’est naturellement possible que par une direction toute en finesse d’acteurs remarquables, parmi lesquels étincellent Marhershala Ali et Trevante Rhodes, précisément grâce au contraste entre leur statut de dealer et la prestance physique menaçante qu’elle implique et l’immense tendresse qu’ils sont capables de véhiculer.
Il me semble pourtant que Moonlight peut saisir émotionnellement, mais pas techniquement ou dramatiquement, et en cela l’Oscar du meilleur film me paraît une récompense exagérée de ses qualités, réelles, quand Premier Contact constituait un véritable film total, ne recevant à ma grande tristesse qu’un Oscar technique…
Meilleur réalisateur : Damien Chazelle (La La Land)
À 32 ans et pour son deuxième film, Damien Chazelle reçoit donc la récompense tant convoitée. Entre Scorsese (même pas nominé pour un film qu’il cherche à mettre en scène depuis 25 ans), Gibson, Chazelle et mon grand favori, le brillant Denis Villeneuve, la compétition aurait pu réserver des surprises, mais l’Académie ne pouvait pas manquer d’accorder à un réalisateur à l’enthousiasme si brillant l’attention qu’il mérite. Whiplash était déjà un grand film, magistral dans sa mise en scène et sa direction d’acteurs, et si scénaristiquement La La Land se situait un peu en-dessous, l’originalité et l’ambition du projet, et sa réussite finale dans son imagerie et les sentiments suscités, grâce à une conjonction d’éléments qui prouvent la maturité de Chazelle, en faisaient un nom aussi dignement oscarisable que celui de Villeneuve.
Meilleur acteur : Casey Affleck (Manchester by the Sea)
En l’absence de Joe Alwyn, remarquable dans Billy Lynn’s Long Halftime Walk, il était évident que cela se jouait entre Viggo Mortensen, Ryan Gosling et Casey Affleck – Denzel Washington en faisant beaucoup trop dans un film destiné uniquement à montrer ses capacités d’interprétation. Si le film ne m’avait pas convaincu, et si j’aurais donc préféré voir la statuette arriver entre les mains de Mortensen (et ainsi donner un second souffle à son passionnant Captain Fantastic), je dois admettre qu’Affleck y livrait la meilleure performance d’une carrière qui avait compté beaucoup de ratés (je me souviens encore de ma cuisante déception devant les Amants du Texas, mais il était parvenu à se montrer à la ramasse même sous la direction de Nolan ou aux côtés de Brad Pitt !). Non pas que la performance soit puissante – c’est un rôle de taiseux on ne peut plus stéréotypé – enfin, de la part d’un acteur aussi incapable de la moindre finesse, cela pouvait légitimement ressembler à un miracle… Et dire que Ben Affleck n’a jamais reçu l’Oscar !
Meilleure actrice : Emma Stone (La La Land)
Amy Adams n’étant pas nominée, il y avait encore de quoi faire, en particulier face à Isabelle Huppert, qui avait légitimement amassé toutes les récompenses pour son rôle dans le formidable Elle de Verhoeven. Emma Stone semble un choix bien curieux d’une Académie prise parfois d’un désir soudain de récompenser la jeunesse pétillante, dans un élan qu’elle brise injustement les années suivantes jusqu’à faire une nouvelle crise. En effet, Stone n’a très manifestement pas l’occasion de déployer tout son talent dans La La Land, où sa propension à la grimace fait pâle figure quand elle est confrontée à la retenue de Gosling.
Meilleur acteur dans un second rôle : Mahershala Ali (Moonlight)
L’année 2016 fut très active pour Mahershala Ali, entre son interprétation du vilain Cottonmouth dans la série Luke Cage, un rôle secondaire dans Hidden Figures et Moonlight, et elle a permis de découvrir vraiment un acteur déjà aperçu ça et là, mais dont on n’avait pas saisi l’ampleur de jeu ou le charisme. L’oscar ne pouvait évidemment récompenser aucun des autres acteurs nominés – c’est au point où l’on se demande où l’Académie est allée chercher ces nominations, quand Tadanobu Asano avait si avantageusement remplacé Ken Watanabe dans Silence, quand Garrett Hedlund affirmait une telle présence lors de ses courtes scènes au premier plan dans Billy Lynn, et alors qu’Aaron Taylor-Johnson était autrement plus impressionnant que Michael Shannon dans Nocturnal Animals (les Golden Globes ne s’y sont pas trompés). Malgré toutes ces affections, Ali était de loin mon favori, tant il irradiait le premier acte de Moonlight, dont toutes les scènes de grâce tournaient autour de son personnage, en faisant l’un des principaux arguments pour aller voir le film de Barry Jenkins.
Meilleur actrice dans un second rôle : Viola Davis (Fences)
C’est la troisième fois que Viola Davis est nominée pour un Oscar, et Fences lui permet enfin de transformer l’essai : on aurait plutôt vue Naomie Harris récompensée pour Moonlight, en reconnaissant que Davis était la seule à la menacer. Le film affreusement théâtral de Denzel Washington a ainsi obtenu la seule statuette qu’il pouvait mériter pour la performance la moins boursouflée du film (c’est dire). Il faut dire que l’interprète de How I get away with murder méritait depuis longtemps cette reconnaissance, même si elle me paraît déplacée ici, étant donné que Davis m’a toujours paru formidable dans son art de mêler les sentiments, d’exprimer à la fois tristesse et colère, désespoir et menace, alors qu’elle se contente ici de bien pleurnicher et crier sans que cela s’inscrive dans une dramaturgie plus sophistiquée…
Meilleur scénario original : Kenneth Lonergan (Manchester by the Sea)
J’étais déjà surpris de ne pas voir nominés Nocturnal Animals ou Midnight Special, je le suis encore plus que Manchester by the Sea ait séduit davantage que le délire assumé de Lanthimos ou la vivacité de Mike Mills. Cette parenthèse indépendante semble être là afin de rassurer les bookmakers sur l’intérêt de l’Académie pour les œuvres assumant jusqu’au bout leur étiquette de film social en dehors des grands réseaux de production, plus que pour l’intérêt propre d’un film dont je ne sais pas pourquoi on a fait autant de cas…
Meilleur scénario adapté : Barry Jenkins et Tarell Alvin McCraney (Moonlight)
Meilleurs décors : David Wasco et Sandy Reynolds-Wasco (La La Land)
Je craignais de voir le très décevant Avé César des frères Coen récompensé pour ses efforts à jouer sur la nostalgie du grand Hollywood… c’est finalement l’autre film nostalgique de la sélection qui emporte l’Oscar, et la surprise est plutôt bienvenue : non seulement il s’agit de la première statuette pour La La Land, mais cela rappelle que l’Académie ne confond pas décors et carton-pâte ou fond vert, et célèbre volontiers le choix judicieux d’environnements participant pleinement à l’intrigue et aux sentiments qu’elle cherche à susciter, en quoi le film de Chazelle est particulièrement brillant.
Meilleurs costumes : Colleen Atwood (Les Animaux fantastiques)
C’est la quatrième fois que la costumière mythique remporte l’Oscar, et l’on ne peut pas dire qu’elle ait démérité sur Les Animaux fantastiques, où son travail était particulièrement important pour faire revivre l’Amérique de l’Entre-deux-guerres tout en donnant une personnalité aux sorciers de différents horizons et autres personnages magiques. On est ravis que le film remporte au moins cette récompense, rappelant (l’Académie devrait commencer à en tenir compte pour des prix plus importants) que le caractère populaire d’un film ne nuit pas à l’investissement sincère de ceux qui y participent et à sa qualité finale. Bon, et on avoue : la classe de Colin Farrell avait beaucoup joué pour faire d’Atwood notre favorite, même si elle s’était aussi distinguée cette année sur Alice de l’autre côté du miroir et Miss Peregrine…quand on vous dit que c’est une costumière mythique !
Meilleurs maquillages et coiffures : Alessandro Bertolazzi, Giorgio Gregorini et Christopher Nelson (Suicide Squad)
L’Académie s’est rarement ridiculisée autant que cette année avec les nominations aux Meilleurs maquillages et coiffures : seulement trois pauvres nominations, pour deux blockbusters à l’univers exigeant (Suicide Squad et Star Trek Beyond) et… une comédie dramatique suédoise, Mr. Ove, d’ailleurs fort sympathique, mais pour laquelle on se demande bien où ils sont allés chercher des maquillages intéressants. L’intérêt était sans doute de rappeler qu’il ne suffisait pas de peinturlurer à la truelle des extra-terrestres et autres mutants pour obtenir l’Oscar, enfin bon, dans ce cas dix autres films auraient pu être nominés de manière plus stimulante qu’une oeuvre dont on ne comprend même pas ce qu’elle fait dans une sélection américaine ! Nocturnal Animals et Hacksaw Ridge auraient par exemple mieux mérité cette place, entre dix autres…
Meilleure photographie : Linus Sandgren (La La Land)
Deuxième statuette pour La La Land, dont je ne suis pas certain qu’elle me convainque aussi bien que si elle avait été attribuée au formidable Bradford Young (Premier Contact) ou au talentueux Rodrigo Prieto (Silence) : si la photographie du film de Chazelle manifestait un sens indiscutable de la colorimétrie et une véritable maîtrise des lumières, j’ai personnellement été plus sensible au sens pictural du cadre de Scorsese, ou à son utilisation dramatique par VIlleneuve, qui parvient constamment à concilier élégance des mouvements de caméra et expressivité fulgurante des plans.
Meilleur montage : John Gilbert (Tu ne tueras point)
Deuxième récompense pour Tu ne tueras point, toujours bienvenue parce qu’elle souligne l’appréciation par l’académie du film de Mel Gibson, mais sui nous paraît redoubler inutilement la première sans souligner de mérite particulier, quand le travail du très bon Joe Walker nous paraissait vraiment apporter un sens particulier à Premier Contact.
Meilleur montage de son : Sylvain Bellemare (Premier Contact)
Meilleur mixage de son : Kevin O’Connell, Andy Wright, Robert Mackenzie et Peter Grace (Tu ne tueras point)
Six récompenses attribuées et toujours aucune pour La La Land… Il était pourtant naturel que Tu ne tueras point soit récompensé pour son mixage du son, sans l’extrême qualité duquel les scènes de combat du film auraient beaucoup perdu de leur intensité inédite, des vibrations communiquées par chaque obus et chaque balle, chaque chute, chaque coup, au spectateur. Qu’il est agréable de voir le film de Mel Gibson un peu reconnu par ses pairs, malgré la rude traversée du désert du réalisateur australien et son audace à consacrer tant d’efforts à un film chrétien, tout en adressant un message d’une véritable beauté spirituelle à tous ceux, même athées, qui professent la foi en l’homme !
Meilleurs effets visuels : Robert Legato, Adam Valdez, Andrew R. Jones et Dan Lemmon (Le Livre de la jungle)
On pourra pester contre une récompense attribuée à un film qui tente désespérément de nous faire croire à ses animaux et à sa jungle et rappelle pourtant souvent abruptement que tout est virtuel et sur fonds verts… L’Académie a cependant été sensible aux innovations en matière de performance capture proposées par le film de Favreau, ce qui est naturellement compréhensible, même si Doctor Strange, et à la rigueur Rogue One, nous avaient bien davantage coupé le souffle par leur foisonnement d’effets impressionnants. Enfin bon, les trois films appartenant à Disney, cela glorifie in fine toujours la même ambition technique !
Meilleure chanson originale : « City of Stars » (La La Land)
La chanson de Vaiana, composée précisément pour devenir un hymne à l’égal de « Libérée, délivrée » aurait pu constituer un concurrent à prendre en compte, mais il était évident pour tous les pronostiqueurs que cela se jouerait finalement entre les deux chansons de La La Land… Déjà qu’elle restait obstinément dans notre esprit, l’Oscar risque de rendre plus omniprésent encore cet hymne à la ville des rêves, moins recherché pour ses paroles ou son élaboration que « The fools who dream » (Audition), mais ajoutant à la délicate mélancolie une plus grande variété des tonalités, avec des sonorités plus jazzy, en plus du charme évident du duo.
Meilleure musique de film : Justin Hurwitz (La La Land)
Sans doute l’une des deux ou trois récompenses les plus prévisibles du palmarès : il faut dire que quand Desplat ou Zimmer ne sont pas de la partie, cela fait tout de suite moins de concurrence, et on n’en regrette que davantage le retrait d’Alexandre Desplat de Rogue One, et son remplacement au pied levé par Michael Giacchino. De nombreux critiques ont comparé la relation entre la musique de Hurwitz et la réalisation de Chazelle à la coopération entre Jacques Demy et Michel Legrand, et c’est dire à quel point, d’emblée, les compositions originales de La La Land avaient séduit, entraîné, et fait danser !
Meilleur film en langue étrangère : Le Client, d’Asghar Farhadi
Les nominations pour l’Oscar du meilleur film en langue étrangère m’apparaissent comme le vrai faux pas de cette année : les excellents High Rise, Elle, Baccalauréat, Hunt for the Wilderpeople, y ont été remplacés par une production aussi surestimée que Toni Erdmann, les instructifs The Land of mine et Tanna, le séduisant Mr. Ove, quatre films auxquels j’ai pourtant toutes les peines du monde à trouver quoi que ce soit d’aussi majeur, et donc Le Client, qui me paraît décidément plus secondaire, malgré ses qualités, qu’Une Séparation, pour lequel Farhadi avait déjà reçu tous les prix du monde, y compris l’Oscar du meilleur film en langue étrangère… J’aurais même préféré que cette imitation iranienne en demi-teinte de Cassavetes ne soit pas seulement nominée, tant elle semble ne l’avoir été que pour des raisons politiques, seule justification possible à la récompense : quel plus beau pied de nez à l’administration Trump que d’accorder une si grande reconnaissance à un réalisateur ayant boycotté la cérémonie précisément à cause des lois anti-immigration frappant entre autres l’Iran ?
Meilleur film d’animation : Zootopie, de Byron Howard, Rich Moore et Clark Spencer pour Disney
Inutile d’épiloguer encore sur un film dont j’avais assez longuement expliqué ici pourquoi il me laissait dubitatif (j’admets pourtant qu’un second visionnage me rendrait moins sévère). Mon admiration pour son travail sur les lumières le place dans mon sentiment bien après le plaisir ému du visionnage du Monde de Dory (moins original mais plus fonctionnel), la joie de vivre qui se dégage de Tous en scène (pas même nominé, c’est dommage), et surtout de la fabuleuse élaboration de Kubo et l’armure magique, graphiquement splendide, très inventif dans on idée d’exploiter l’origami dans un univers japonisant, et à l’histoire très « pixaresque », tout en restant plus enfantine que celle du génial Coraline des mêmes studios. Définitivement le film d’animation qui sortait du lot cette année…
Meilleur film documentaire : O.J. Simpson : Made in America
Je dois confesser n’avoir vu que deux documentaires de cette sélection, Fuocoammare et O. J. Simpson, et mon cœur ne balançait pas. L’oeuvre récompensée est d’une ampleur exceptionnelle, dans sa durée (cinq épisodes d’une heure et demie au lieu du documentaire de deux heures habituellement primée) et dans son sujet, puisqu’en parlant de Simpson, les réalisateurs retracent le parcours d’un homme qui a été une idole pour la communauté Afro-Américaine, et peuvent ainsi réfléchir sur ce qu’il a représenté dans les différentes étapes de son parcours – de la gloire sportive à son arrestation pour vol à main armée, en passant bien sûr par son procès pour l’assassinat de sa femme… Il est curieux que Made in America ait été diffusé la même année que l’excellente première saison d’American Crime Story, consacrée au même personnage, mais comment se plaindre quand, chacune dans sa catégorie, ces deux œuvres atteignent un tel niveau d’exemplarité dramatique et réflexive ?
Meilleur court-métrage de fiction : Sing, de Kristóf Deák and Anna Udvardy
Meilleur court-métrage d’animation : Piper, d’Alan Barillaro (Pixar)
Aucune surprise pour ce choix tant Piper avait suscité l’émerveillement universel lors de sa sortie en salles, en première partie du Monde de Dory.
Meilleur court-métrage documentaire : The White Helmets d’Orlando von Einsiedel et Joana Natasegara