Arrival – la critique

Lucile « Macky » Herman

Arrival – la critique

Arrival – la critique

Lucile « Macky » Herman
30 janvier 2017
Denis Villeneuve nous livre son tout dernier film, Arrival, qui vous fera voyager à travers le temps et l'espace sans même que vous le sachiez. Découvrez sa critique, attention quelques spoilers !

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Bien loin du film d’aliens standard

 

Des films sur les aliens, nous en avons tous vus et à la longue, tous finissent par se ressembler. En général, l’humanité est la victime, les extraterrestres sont les gros méchants mais à la fin nous arrivons à nous défaire d’eux et nous crions tous haut et fort : « USA ! USA ! USA ! ». Ayant pour habitude de ne PAS regarder les trailers afin de garder la surprise, je me suis laissée tenter par Arrival. Ne sachant pas ce que Denis Villeneuve allait nous proposer cette fois, j’ai regardé ce film sans aucune idée du scénario. Il est notamment à l’origine de Sicario et Prisoners, deux films que je vous recommande très vivement,  Pour information, Villeneuve sera également derrière la caméra de Blade Runner 2049 qui sortira dans nos salles le 4 octobre prochain. Je ne sais pas vous, mais moi, j’ai vraiment hâte ! Concernant Arrival, voici le speech de départ, afin de savoir où nous allons mettre les pieds :

 

Lorsque de mystérieux vaisseaux venus du fond de l’espace surgissent un peu partout sur Terre, une équipe d’experts est rassemblée sous la direction de la linguiste Louise Banks afin de tenter de comprendre leurs intentions.

Face à l’énigme que constituent leur présence et leurs messages mystérieux, les réactions dans le monde sont extrêmes et l’humanité se retrouve bientôt au bord d’une guerre absolue. Louise Banks et son équipe n’ont que très peu de temps pour trouver des réponses. Pour les obtenir, la jeune femme va prendre un risque qui pourrait non seulement lui coûter la vie, mais détruire le genre humain…

 

Et cette jeune femme, c’est elle.

 

 

Louise Banks, cette fameuse experte en linguistique, est ici interprétée par Amy Adams. Elle nous livre un personnage un peu effacé au départ, triste. On peut s’expliquer cela en raison de la scène d’introduction, montrant Louise et Hannad, sa fille, tout au long de l’enfance de cette dernière, qui meure prématurément à l’adolescence d’un cancer. Il ne s’agit là pas vraiment d’un spoiler car comme dit plus haut, ce sont les premières images qui nous sont proposées. Le film commence de façon assez lambda, des vaisseaux se sont posés aux quatre coins du monde et personne ne sait qui ils sont, d’où ils viennent, et encore moins ce qu’ils veulent.

C’est pour cela que le gouvernement américain vient chercher Louise dans son bureau à l’université. Spécialiste en linguistique, ils veulent d’elle qu’elle les comprenne et communique avec eux. Pour cela, Louise désire se rendre sur place, chose que le Colonel refuse, dans un premier temps tout du moins.

Alors qu’il va demander de l’aide à d’autres experts, il revient sur ses pas et retourne voir Banks directement chez elle, en hélico. Pour vous faire une idée un peu plus juste de la trame du film, je vous invite à jeter un œil à la bande-annonce du film mise en ligne en août dernier sur la chaîne officiel YouTube de Paramount Pictures :

 

 
 

 

Le monde est alors en alerte. Des extraterrestres ont débarqué et cela répond par conséquent à LA question qui taraude l’humanité depuis toujours. Sommes-nous seuls dans l’univers ? Non. Évidemment les médias ne parlent que de ça et la psychose s’installe. Rien d’étonnant à cela. Jusque là, rien d’anormal, nous avons vu ce type d’introduction une centaine de fois et pourtant, le film surprend.
 
 
Ces étranges vaisseaux noirs, faisant penser à d’énormes menhirs, sont suspendus au-dessus du sol et sont présents à douze endroits différents à travers la planète Terre. Concernant leurs occupants, on ne sait rien. Amis ? Ennemis ? Que veulent-ils ? Pourquoi ne descendent-ils pas ? Que veulent-ils ? Alors oui, tout un tas de questions qui resteront sans réponse tant que les humains n’arriveront pas à communiquer avec eux. C’est cette problématique ô combien complexe que Louise va tenter de résoudre. En effet, ils émettent des sons, totalement incompréhensibles, et dessinent des symboles tout aussi incompréhensibles au premier abord. 
 
 

 

 

 
C’est à partir de là que le film devient extrêmement intéressant. Toute la recherche autour de cette langue inconnue est fascinante. Car étrangement, plus on avance, plus certaines zones d’ombres s’éclaircissent et plus de nouvelles questions surgissent. On oublie vite les autres aspects soulevés par le film, dans un premier temps tout du moins, comme la méfiance des politiques et autres gouvernements, les divergences d’opinions etc. Si l’on y regarde de plus près, Arrival traite de manière assez implicite du contrôle absolu et de l’obsession qui en résulte, mais aussi de la méfiance vis-à-vis de ce qui est étranger, de TOUT ce qui est étranger.
 
À partir de là, nous pouvons partir assez loin concernant notre rapport à la différence au sens très large du terme : les migrants, les réfugiés politiques, les religieux, les genres sexuels etc etc. Libre à vous d’interpréter cet aspect du film comme bon vous semble.
 
 

 

 

 
Amy Adams, a.k.a Louise, nous propose un personnage émouvant, en retrait dans un premier temps, recueilli, à l’écoute et dans l’observation de ses paires et des autres. Calme et réfléchie, si au départ la peur la paralyse, elle repoussera très vite ses propres limites, et celles des autres. L’originalité de ce film et sa réussite tiennent à peu de choses très simples. Oui, le fait de montrer comment un langage qu’elle décrypte avec difficulté, il faut bien l’avouer tout le monde n’est clairement pas capable d’une telle prouesse, finit à terme par l’imprégner, totalement et c’est le cas de le dire, jusqu’à finir par façonner sa perception des choses, ses pensées et ses rêves.
 
 
Vous le savez sûrement, mais langue rime avec culture, indubitablement. Ici, langue rime non seulement avec culture, mais aussi avec un bouleversement saisissant. C’est pour cela, entre autre, que le film est si captivant.
 

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Le succès critique et populaire d’Arrival (Premier Contact) rassure, tant sur le goût du public que sur l’avenir du cinéma , parce qu’il est évident qu’il n’est pas lié à son marketing désastreux : une bande-annonce assez action-turned, tout à fait infidèle à la tonalité du film, et un synopsis allociné catastrophiquement catastrophiste, qui résumerait mieux Armageddon que le travail tout en nuances de Villeneuve.

Arrival surprend en effet, comme le dit très bien « Macky », à une époque où le cinéma d’extra-terrestres se réduit souvent à l’éloge militariste et chauviniste de la grandeur américaine. Qu’il fasse souvent songer au Rencontres du troisième type, modèle du film de premier contact où la rencontre se faisait par la découverte d’un langage commun, en l’occurrence la musique, est loin d’être un défaut ou un manquement à l’originalité : les Independance Day et leurs imitations inondent tant nos salles qu’une approche si radicalement différente ne peut manquer de subjuguer.

Midnight Special proposait déjà quelque chose de différent, et naturellement les deux Solaris et surtout 2001, au monolithe duquel la forme des vaisseaux est une évidente référence, viennent salutairement à l’esprit, la filiation n’étant pas que thématique, mais rappelant que, comme tout genre, celui de la science-fiction peut être approché par de véritables auteurs, loin des blockbusters à 200 millions de dollars.

Arrival n’est ainsi pas un film parfaitement aimable, dont le visionnage répondrait aux convenances du grand spectacle ou à celles du snobisme d’une élite auto-proclamée, et cet entre-deux est sa plus grande qualité. Il est plus qu’aisé de lui reprocher de ne pas proposer d’approfondissement psychologique satisfaisant de ses personnages, faillant au sacro-saint devoir de l’identification, ou à l’opposé de limiter à deux minutes de voix off et de montage elliptique le plus important de travail de décryptage de la langue alien, là où la nouvelle de Ted Chiang dont Arrival est l’adaptation était moins avare de finesses linguistiques.

La conjugaison entre enjeux géopolitiques à l’échelle mondiale, travail d’équipe du délicat duo constitué par Amy Adams et le charmant Jeremy Renner, et plongée intimiste dans l’histoire du personnage principal, est en revanche incontestablement admirable : des relations personnelles et professionnelles aux réactions des populations et gouvernements, tout est traité avec une volonté d’éviter les excès, les drames faciles, pour se concentrer sur les beautés et les obstacles de la communication entre les êtres et les États.

 

 

Arrival doit donc, comme Solaris, être perçu comme une expérience de cinéma, dont chaque aspect, du recours à la musique originale ou non (inoubliable utilisation du On the nature of Daylight de Max Richter), de la splendeur des plans sans suresthétisation photographique, au traitement délicat de l’histoire et des personnages, souligne la maturité du cinéma de Denis Villeneuve, réalisateur déjà passionnant (pour Incendies, Sicario, quelques scènes de Prisoners, et son chef-d’oeuvre Enemy), qui s’affirme définitivement comme le meilleur choix pour Blade Runner 2049.

 

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