Tennis World Tour 2 : le meilleur jeu de tennis après le « pire » ?
Sorti en mai 2018, Tennis World Tour premier du nom traîne une réputation sulfureuse, le jeu vidéo développé par Breakpoint Studio et édité par BigBen Interactive ayant été plusieurs fois qualifié de « pire jeu de tennis de tous les temps », et en tout cas pointé du doigt pour une médiocrité presque légendaire. Qu’une suite existe est donc assez surprenant pour intriguer, laissant espérer qu’il s’agira de rassurer les joueurs en redressant très nettement la barre.
Or l’équipe créative en a complètement changé, le jeu étant désormais développé par les Australiens de BigAnt, justement auteurs de l’encourageant AO Tennis 2 (et de Cricket 19 ou Rugby League Live 4), tandis que Tennis World Tour 2 est toujours édité par BigBen, mais via sa filiale Nacon, spécialiste des jeux de sport et racing (Handball 2021, Pro Cycling Manager 2020, Tour de France 2020, Rugby 20, WRB 9, Monster Truck Championship), mais pas que (on lui doit aussi Werewolf: The Apocalypse – Earthblood, bientôt Vampire: The Masquerade – Swansong …). Même si cela ne suffit bien entendu pas à présager de l’intérêt de Tennis World Tour 2, ceux qui ont travaillé dessus semblent au moins s’intéresser à la retranscription vidéoludique des disciplines sportives.
Présentation d’un jeu qui brigue le sommet du classement ATP des jeux de tennis, publié en septembre 2020 sur PlayStation 4, Xbox One, Windows et Nintendo Switch, et vendu 49 euros 99. Notre test a été réalisé sur la console hybride de Nintendo, en docké, en portable et sur une Nintendo Switch Lite.
Des bases au sommet
Avant toute chose, vous devriez commencer par vous rendre à l’Académie, où vous trouverez des entraînements aux bases, au déplacement, à la charge, à la visée, au service, aux coups ligne de fond, aux coups avancés, au service avancé, aux volées et aux cartes de talent, ainsi que quelques défis mettant les compétences acquises à l’épreuve.
C’est qu’en bon jeu de tennis, Tennis World Tour 2 est assez technique, et peut donc s’avérer très frustrant avant qu’on le trouve enfin gratifiant. Si les quatre coups différents pourront d’abord vous sembler assez indifférents, du moins tant que votre priorité sera de renvoyer la balle de l’autre côté (jusque-là, cela reste très facile), vous vous apercevrez bien vite qu’il faudra bien maîtriser leurs différences pour que la balle vous obéisse, et avant même de maîtriser ces différences, appréhender les exigences du jeu en termes de timing.
Vous n’aurez en effet qu’une très courte fenêtre de temps entre le moment où vous pourrez appuyer sur la touche correspondant au coup que vous souhaitez effectuer et le coup lui-même, cette tension étant accentuée pour les coups puissants, qui vous demanderont une pression qu’il s’agira d’exercer puis de relâcher très précisément. Ne comptez pas faire de reprises à la volée ou de smash pendant votre première demi-heure !
On regrettera peut-être juste que chaque session d’entraînement s’achève quand on a réussi la quantité de coups requise, sans possibilité de la prolonger si l’on se sent encore le besoin de se perfectionner. Les petits temps de chargement suffisent en effet à décourager de relancer la même session, a fortiori de vouloir en enchaîner jusqu’à maîtriser parfaitement le service.
Aux coups s’ajoutera bien entendu la gestion de la barre d’endurance, tant pour les coups que pour le sprint indispensable pour courir à l’autre bout du terrain, ainsi que la précision. C’est qu’aucun indicateur ne vous permet de savoir à coup sûr où vous visez, de sorte qu’il faudra le « sentir » par une délicate (ou plus prononcée) inclinaison du stick, en pensant simultanément à la nature du coup, à sa puissance et à la position de l’adversaire.
On n’oubliera pas de commencer dans des arènes « neutres » avant celles exigeant de considérer de surcroît les bonus et malus du terrain (terre battue, dur, bois, gazon, tapis), du climat (tempéré, chaud et sec ou humide) ou de l’altitude, qui pourront affecter des paramètres aussi variés que l’effet de lift, la hauteur de rebond, l’effet de slice, la vitesse de rebond, l’endurance et la vitesse de la balle !
Gravir les échelons
Une fois que vous penserez avoir appréhendé le système de Tennis World Tour 2, vous pourrez commencer à en apprécier les vrais matchs, répartis entre les exhibitions (des matchs rapides hors ligne, en simple ou en double), le tournoi, les matchs en ligne (toujours avec un degré de personnalisation des matchs assez poussé, tant dans le choix du stade et du terrain que des règles) ou bien entendu le mode carrière, véritable cœur de la proposition Tennis World Tour 2.
Vous y mènerez ainsi un joueur ou une joueuse depuis ses tout débuts, jusqu’à son nom, sa nationalité et son physique, sur lequel on ne s’attardera pas puisqu’on ne verra après tout son avatar que de dos, et que de toute manière le graphisme de Tennis World Tour 2 cherche plutôt à être satisfaisant qu’impressionnant, surtout sur Switch – enfin personnaliser son avatar est toujours agréable, surtout quand on peut toucher jusqu’aux cris émis en recevant une balle ou à quelques animations, de service notamment.
En partant de rien, il faudra réaliser quelques exhibitions sans prix d’entrée, remporter assez d’argent pour recruter temporairement un agent qui vous octroiera un bonus (et dont vous pourrez changer assez régulièrement) et disputer des compétitions toujours plus officielles selon un calendrier assez précis.
Vous vous apercevrez avec surprise que vos premiers adversaires sont injustement forts, même si vous avez suivi le conseil de vous entraîner au préalable. C’est qu’ils seront dotés d’une « main » complète de cartes techniques leur conférant des boosts quand vous n’en aurez aucune. Un choix un peu étonnant quand un mode carrière est justement l’occasion de commencer à affronter des adversaires très faibles pour mieux ressentir leur montée en puissance (et la nôtre), plutôt que de risquer de décourager le joueur trop vite.
Qu’à cela ne tienne, faites quelques parties pour grapiller un peu d’expérience et les points d’archétype à attribuer à votre défense, attaque, précision, et surtout filez au Magasin pour acquérir vos boosters gratuits. Pensez à y investir régulièrement l’argent remporté, exclusivement in-game (sachant qu’il s’agit du même qui permet de payer le coût d’entrée de certains tournois ou de nouvelles raquettes). Bien entendu, plus le booster est cher et plus on aura de chances d’obtenir des cartes Or et Diamant, même s’il y a une chance minime d’en obtenir dès le starter. Une carte peut d’ailleurs être revendue.
Ces cartes se répartissent en quatre catégories : résistance, puissance, précision et agilité, et 5 peuvent être équipées à la fois. Certaines sont des cartes de soutien, durant quelques matchs avant de disparaître, quand les cartes dynamiques sont nettement plus fortes mais concernent… quelques coups, parfois un seul ! Si elles sont une aide, elles améliorent aussi la technicité du jeu. Réduire l’endurance des coups en slice ou augmenter la puissance des services plats pendant un match incite par exemple naturellement à favoriser ces coups.
Arriverez-vous tout en haut du classement ATP en vainquant des légendes du tennis comme Federer ou Nadal à Philippe-Chatrier ?
Un roster presque complet
On n’a en effet pas parlé encore du roster de personnages, pourtant essentiel si vous êtes attiré par les matchs avec vos amis plutôt que par le solo. Outre le personnage créé pour la carrière justement, vous aurez accès à pas moins de 36 tennismen et women (une dizaine). Sur le top 10 du dernier classement ATP, on notera l’absence de Rublev, Schwartzmann et Berrettini … et surtout Djoko. À titre personnel, j’ai pu être un peu frustré de ne pas retrouver Andy Murray, pourtant revenu de sa retraite, mais ai été très content de pouvoir jouer Isner ou Nishikori, et même de voir que de grands joueurs plus anciens comme Gustavo Kuerten et Marat Safin sont accessibles en DLC !
Le WTA est encore davantage ignoré : si vous pourrez bien jouer Barty, Andreescu, et Kenin ou Pliskova en DLC, Osaka, Halep, Svitoline, Sabalenka … ou Williams sont absentes du roster.
On a bien sûr l’habitude que les jeux sportifs n’aient pas le droit d’utiliser tous les sportifs et arènes que l’on souhaiterait retrouver, et l’on ne fera pas trop les difficiles quand Nadal, Federer, Medvedev, Thiem, Tsitsipas, Zverev, Monfils ou Barty sont bien là, comme 28 terrains du monde entier, y compris la Chine, le Japon, l’Australie, l’Afrique du Sud, le Maroc, l’Équateur, le Brésil, Honolulu, les Émirats Arabes Unis… Tennis World Tour semble bien avoir cherché à proposer quelque chose d’aussi complet que possible !
Tennis World Tour 2 : au classement ATP des jeux de tennis ?
Tennis World Tour 2 est sans doute le jeu se rapprochant le mieux de la légende Top Spin 4, et donc le meilleur jeu de simulation de tennis actuel.
Cela ne signifie pas que le jeu est parfait : entre un mode Carrière qui trahit le budget limité par l’absence de toute cinématique ou tentative de scénarisation, un roster féminin un peu limité, des sportifs modélisés sans grande finesse, et un rendu graphique stable mais décevant sur Nintendo Switch, la licence peut encore progresser.
Cependant, après le catastrophique Tennis World Tour, ce deuxième opus peut paraître presque providentiel, et on ne s’étonne pas d’apprendre qu’il a été repris par le studio derrière AO Tennis 2.
S’il manque forcément quelques grands noms, la proposition d’incarner entre 30 et 40 sportifs (voire un peu plus avec tous les DLC) sur presque 30 courts offre un joli panorama du tennis contemporain, et le jeu jouit d’une louable volonté de faire ressentir la vie d’un match, avec tout ce qui entoure le pur échange de balles : les réactions du public, les animations des joueurs, traces que l’on peut laisser sur le terrain, personnalisation des services et des cris …
Surtout, il parvient à être relativement intuitif dans ses mouvements les plus basiques tout en s’avérant très technique : vous comprendrez sans peine comment servir, courir derrière la balle et la renvoyer, mais remporter vos premières victoires exigera un entraînement poussé tant il sera difficile et stimulant de concilier type de coup, puissance de coup, zone visée, bonus et malus de terrain, caractéristiques du sportif avec un timing assez serré.
Ce juste milieu entre accessibilité et technicité offre à Tennis World Tour 2 une belle courbe d’apprentissage sans inspirer de découragement, pour un jeu qui n’est pas parfaitement aimable mais inspire sans peine le désir d’y revenir encore et encore pour le savourer et se dépasser.
- Un roster satisfaisant de sportifs et courts
- Une bonne IA
- La technicité exigeante mais gratifiante des combats
- L'absence de micro-transactions
- Un roster féminin étrangement limité
- Des graphismes datés, sur Switch surtout
- Un mode carrière presque vintage de sobriété
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