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Control : quand Remedy veut faire le nouveau BioShock

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Control : quand Remedy veut faire le nouveau BioShock

BioShock est l’un de mes jeux vidéo préférés. Bien sûr, cela n’a rien d’original, mais je cherche assez souvent à retrouver les sensations qu’il me procurait pour que cela devienne un moteur important de mon expérience vidéoludique : ce sentiment initial de perte et d’impuissance, le développement progressif de capacités ne nous rendant pas seulement plus fort face aux menaces mais altérant notre maîtrise de l’environnement et insufflant par leur caractère pseudo-scientifique/surnaturel un sentiment euphorique de toute-puissance, la découverte d’environnements forts, juste assez linéaires pour contrôler notre progression et juste assez grands pour encourager un peu d’exploration et l’impression de richesse du monde, une narration captivante passant aussi bien par les cutscenes et rencontres que par les lieux et les indices qui les peuplent…

J’en avais retrouvé quelque chose dans Prey mais étais particulièrement curieux de donner sa chance à Control, tout de même développé par l’ambitieux studio finlandais Remedy (Max PayneAlan WakeQuantum Break), et donc précisément réputé pour sa volonté de se renouveler dans la manière d’impliquer l’agentivité du joueur dans des histoires fortes.

Disponible sur PS4 (où je l’ai testé), Xbox One, dans l’Epic Game Store, et depuis le 27 août sur Steam, il est habituellement vendu 59 euros 99, mais est par exemple disponible en ce moment à 36 euros 93 sur Amazon pour PS4.

Une première extension, The Foundation, est sortie en juin, tandis que la deuxième, AWE (ou EMA) sort précisément ces jours-ci. Faut-il alors craquer pour une édition Deluxe incluant le Season Pass ? On y reviendra en fin d’article, après le test du jeu, où il s’agira déjà de déterminer s’il mérite que l’on s’y arrête.

Notez que l’éditeur 505 Games et Remedy ont sorti le 27 août une Ultimate Edition sur Steam, qui sera disponible le 10 septembre sur l’Epic Game Store, PS4 et Xbox One. Contenant le jeu avec tous ses DLC pour 39 euros 99, son achat en dématérialisé donnera même accès gratuitement à sa version gratuite optimisée pour PS5 et Xbox Series X ! Une version physique devrait en être envisagée d’ici la fin de l’année 2020.

 

 

Mystères in medias res

Le joueur incarne Jesse Faden, simple civile ouvrant la porte du Bureau Fédéral de Contrôle, nom banal, insignifiant, délicieusement euphémistique, pour un bâtiment à première vue tout aussi banal. Mais personne ne se trouve dans les couloirs ou à l’accueil, et notre héroïne semble bien décidée à explorer un lieu qu’elle a apparemment longuement cherché alors qu’il était si visible…

On appréciera d’emblée l’idée d’incarner une femme et la relative généralisation de cette pratique après les Tomb Raider ou Horizon Zero Dawn, tendant à prouver que l’on peut parvenir à s’identifier à son avatar quel qu’il soit, contre l’idée trop répandue d’un jeu vidéo pour les mâles cis blancs, incapables d’incarner autre chose que des mâles cis blancs. Ce sont des considérations que l’on n’a même pas le temps d’avoir tant on est happé par ce premier mystère d’un immense bâtiment de bureaux complètement vide, doublé d’un mystère intérieur, le dialogue que Jesse semble avoir dans sa tête avec son frère Dylan.

Est-elle folle ? Le monde est-il fou ? En tout cas, pendant les premières heures, le mystère ne fait que s’épaissir, quand un balayeur semble la seule présence humaine des lieux, puis que l’on découvre le cadavre du directeur, apparemment suite à un suicide, avec une arme bien étrange, et que des visions nous apprennent que nous sommes désormais la nouvelle directrice de ce centre dont nous ne savons rien, où des cadavres flottent et dont d’immenses carrés rocheux ont altéré l’architecture.

Alors qu’on cherchait simplement l’explication de la disparition de notre frère il y a 17 ans, très probablement liée aux activités du BFC, quelles qu’elles soient, nous voilà propulsées dans un nouveau rôle, facilitant peut-être nos accès aux informations mais accroissant aussi notre responsabilité. D’autant que d’autres survivants sont progressivement trouvés, tous équipés d’une combinaison conçue spécifiquement contre cette crise, qui leur a été remise juste avant par un scientifique porté disparu. Savait-il quelque chose ? Pourquoi Jesse survit-elle sans porter la combinaison ?

Les questions se multiplient, et il faudra associer les réponses des PNJ avec la documentation évidemment parsemée sous diverses formes dans de nombreuses pièces pour débrouiller le mystère. Heureusement, ces éléments sont aisés à trouver, assez courts, et tout de même en quantité assez raisonnable pour que cette recherche d’informations soit parfaitement digeste. Tant d’autres jeux pourraient en prendre de la graine !

 

Une expérience éprouvante

Quand on rencontre nos premiers ennemis, on tente seulement de tirer avec un pistolet en apparence classique sur des espèces de soldats on ne peut plus banals. Et à moins que je sois vraiment nul, vous vous apercevrez peut-être… que ce n’est pas du tout si facile que cela ! Je vous confesserais à ma grande honte être mort trois fois contre le premier ennemi plus fort que la moyenne, tentant de me cacher autant que possible en éliminant petit à petit les adversaires communs avant de tirer quelques coups sur le plus gros, de m’enfuir, et de répéter le procédé… sans succès. Je me suis même demandé si je n’avais pas manqué un truc, une capacité de mon personnage ou une aide contextuelle, jusqu’à ce que je remporte le combat en bourrinant plus qu’à mon habitude.

Moi qui n’aime pas particulièrement les jeux difficiles, préférant me laisser porter par l’expérience que de répéter dix fois des affrontements trop chorégraphiés, ces débuts m’ont fait peur. Il faut dire que Control est l’un des rares jeux dont on ne choisisse pas la difficulté, puisqu’il n’en présente qu’une pour tous les joueurs, et s’avère ainsi assez exigeant pour ne pas paraître trop facile. Un noob comme moi ne s’en réjouit que plus quand il surmonte des niveaux délicats, mais il me semble important de noter que cela peut en décourager… surtout quand on fait face à des chutes de framerate en plein combat, ce qui me paraît toujours impardonnable sur console, mais je ferais preuve de mauvaise foi en attribuant à ces problèmes techniques très rares la moindre défaite, rassurez-vous.

D’autant que chaque mort nous fait perdre de la Source, des fragments essentiels au craft de nos armes et mods. Vous apprendrez bien vite à ne pas fragmenter trop vite les nombreux mods trouvés sur les cadavres de vos ennemis, parce qu’au moins sous cette forme ils sont invulnérables au retrait punitif de ressources, et à garder cette opération pour les moments où ils pourront apporter juste ce qu’il faut de Source pour payer un craft. Si l’on déplore d’abord que les ennemis continuent d’apparaître dans des zones déjà explorées et vidées maintes fois, empêchant de s’approprier les lieux pour une exploration apaisée, au moins cela permet-il de continuer de collecter de la Source et des mods à condition de ne pas mourir…

 

Control, un FPS/RPG ?

CraftMod ? Si l’on y ajoute un arbre de compétences et le loot de matériaux plus ou moins rares, on pourrait presque croire que Control lorgne sur le RPG, du moins sur une dimension d’aventure-RPG appuyée.

On en est en fait très loin : des points de compétence sont attribués à des moments précis de l’aventure et leur distribution dans des branches peu nombreuses n’altère pas fondamentalement le jeu, même si elle modifie évidemment un peu notre approche : développer la santé ou l’énergie, cela ne permet pas la même chose. Ils apportent une légère touche de personnalisation à laquelle il est difficile d’être insensible en ce qu’elle aide à toujours mieux s’approprier son avatar. Ces points de compétence débloquent par paliers la possibilité d’ajouter de nouveaux mods aux armes, assurant un gain de puissance équilibré et redoublant bien sûr la valeur des quêtes secondaires parfois assez difficiles.

C’est la même chose avec les mods, disponibles en surabondance, heureusement collectés automatiquement dès que l’on s’approche des cadavres (qu’il ne faut ainsi jamais fouiller, ouf), que l’on ne craftera que si l’on cherche une orientation vraiment spécifique (par exemple décider de tout miser sur les dégâts à la tête) et qu’on en a la possibilité.

Le craft peut enfin concerner les armes, ou plus précisément les attaques possibles avec l’unique Arme de Service, à laquelle on ne pourra attribuer que deux formes à la fois (par exemple mitraillette et laser), ce qui est thématiquement curieux mais mécaniquement plus intéressant. Mais ces armes ne sont constructibles que quand le jeu le décide, et avec des matériaux que l’on ne récupère parfois qu’à certains points-clefs. Control contrôle ainsi leur récupération, sans pour autant les offrir, avec l’habile contrainte de nous demander tout de même de les mériter en tuant les bons ennemis et en quantité suffisante.

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Control or not control ?

Control serait-il alors trop dirigiste ? Il faut dire que les quêtes secondaires ne sont pas si nombreuses et que l’on explore plutôt comme on explorait dans les Tomb Raider ou les Uncharted, en allant voir si tel recoin ne cache pas un matériau ou un mod, sans forcément fouiller des lieux de fond en comble et y revenir à chaque nouveau pouvoir débloqué pour aviser de ce qu’ils peuvent offrir de neuf.

En outre, si les environnements sont bien modélisés, ils m’ont personnellement paru un peu ternes, loin d’être inoubliables. Il faut se souvenir que l’on fouille des bureaux, de sorte que même un immense espace ouvert sera loin de ressembler à du BioShock. On se réfèrera donc régulièrement à une carte trop peu détaillée pour être vraiment maniable, offrant au moins l’avantage de pouvoir être ouverte tout en se déplaçant, faute de pouvoir se repérer aussi intuitivement que l’on aurait voulu.

Après de nombreuses heures de jeu, on commence heureusement à prendre quelques marques, même si l’on se téléporte plus qu’on ne se déplace, et que l’on a donc plaisir à reconnaître des endroits sans que cela soit si utile que cela pour nous orienter. Et surtout, les environnements sont de plus en plus étranges et inventifs, comme cette scène dans un Overlook Hotel psychédélique, avec des pièces plus inhabituelles et un jeu sur les perceptions souvent adroit, déboussolant et intrigant.

Pour autant, on est très loin d’avoir le sentiment de subir une expérience linéaire, en particulier grâce à la liberté qu’offrent les combats. Bien sûr, c’est paradoxal : un combat est un événement scripté dans un lieu clos où le jeu nous balance des ennemis à l’IA très moyenne, a priori ce que l’on peut faire de pire !

 

 

Sauf que l’on succombe vite aux assauts de cette IA très moyenne (comme je le disais, le jeu peut s’avérer assez difficile), parce que notre santé n’est pas si haute… et ne se régénère pas toute seule, ni manuellement. Pour en regagner pendant un combat, il faut descendre un adversaire et s’approcher de sa dépouille afin de récolter des parcelles bleues. De même que dans Doom, la boucle tuer, courir et retourner à l’abri sera ainsi essentielle.

L’absence de potions ou de grenades, bref de tout inventaire, offre une grande fluidité aux combats, que l’on n’interrompt pas toutes les trois secondes pour puiser un nouvel objet dans notre sac. Ils n’en sont pas moins très riches parce que l’on navigue continuellement entre les deux modes de notre arme et les pouvoirs.

Ces deux aspects du combat vident une jauge qui se remplit lentement après quelques secondes – pas de question de munitions qu’il faudrait fastidieusement récupérer ou dont on pourrait soudain manquer pour notre plus grande frustration. Ainsi alterne-t-on continuellement, profitant d’un aspect pendant que l’autre se recharge, dans une synergie qui inspire évidemment le sentiment de combats assez complets, qu’il est impossible de surmonter de façon monotone, contrairement à d’autres titres où l’on sortirait le fusil à pompe en toute occasion.

 

 

Le véritable point fort de Control, celui que j’ai gardé pour la fin, c’est bien entendu cette gestion des pouvoirs. Au commencement, il est naturel de trouver les combats un peu mous et rigides, puisque notre avatar peut vaguement s’accroupir (mais pas se cacher ou se mettre en couverture), courir, et tirer au pistolet, rien de plus. Une petite déflagration d’énergie sert d’attaque au corps-à-corps, mais s’avère surtout amusante pour détruire des bureaux hum…

Assez vite on y ajoutera le pouvoir central de Control, la capacité à propulser par télékinésie des petits objets à distance, et en particulier sur les ennemis. On m’avait conseillé de développer cette capacité dans l’arbre de compétences à chaque fois que j’en aurais l’occasion en oubliant tout à fait les autres branches, et en effet, pouvoir lancer des objets lourds, voire des ennemis, et augmenter les dégâts de nos projections en fera vite notre arme de prédilection.

On y ajoutera un bouclier de gravats, l’hypnose temporaire des ennemis afin qu’ils s’affrontent entre eux… et après avoir affronté des ennemis volants, on pourra soi-même léviter ! La plupart des pouvoirs n’altèrent ainsi pas tant notre rapport à l’environnement (qui sert avant tout d’arène) qu’aux ennemis, avec une impression de totale liberté renforcée par la bonne gestion de la physique des objets et l’impeccable fluidité de leur utilisation.

 

Deluxe et Season Pass

J’ai personnellement pratiqué Control dans son Édition numérique deluxe (79 euros 99 sur le PS Store). En plus du jeu de base, cette dernier comporte :

– Le Season Pass
– L’équipement d’intervention en zone urbaine

Et les bonus exclusifs à la PS4™ :

– Un mod d’arme de service rare
– Un mod de joueur rare
– Une combinaison de plongée astrale
– Le thème ‘The Explorer’
– Le thème ‘The Black Rock Quarry’

Oublions les thèmes, les vêtements strictement cosmétiques et les mods pratiques quelques minutes mais vite remplacés, autant de bonus appréciables pour lesquels on n’aurait cependant même pas l’idée de payer environ 25 euros de plus que le prix de base. C’est que le véritable atout de cette édition se trouve dans le Season Pass, constitué de deux extensions (et il n’y en aura pas d’autres ensuite) suivant toutes deux la complétion de l’aventure principale.

 

 

The Foundation est un DLC d’environ 6 heures, où l’on sera doté du pouvoir de détruire et former des rochers, y compris comme stalagmites meurtriers. Un pouvoir qui sait rester modeste (il ne s’agirait pas de le rendre trop puissant au détriment du reste) mais sera régulièrement utile en combat ou pour résoudre des énigmes originales, une jolie solution pour faire sentir la nouveauté sans trahir Control. En voici le synopsis :

Explorez les origines de l’Ancienne Maison et faites la découverte d’étranges secrets, inconnus du Bureau lui-même.

EMA (AWE en VO) paraît beaucoup plus ambitieux, mais je n’ai pas pu le tester encore puisqu’il sort… aujourd’hui. Il va de soi que je mettrai à jour cet article quand je l’aurai fini ! Voici ce que l’on en sait :

Le Bureau a étudié les Événements de monde altéré (EMA) dans ce secteur délaissé. Les archives ont été scellées, les objets retenus et les pouvoirs abandonnés. Désormais, le secteur est ouvert et les objets sont à nouveau en liberté…

 

 

Conclusion

Control est un jeu d’action très solide, où la maîtrise merveilleusement intuitive de l’environnement grâce aux pouvoirs croissants de notre personnage et les combats très fluides qui en résultent procurent un plaisir qu’il est assez difficile de comparer à d’autres titres. On sent ainsi qu’il a bénéficié de toute l’expertise de Remedy pour être aussi agréable à jouer que soigneusement scénographié. C’est que l’on est très vite happé par l’ambiance surnaturelle des lieux, cette manière glauque et pourtant nébuleuse qu’a le paranormal de filtrer à travers tous les pores de la réalité pour distiller une atmosphère constamment inquiétante.

Entre Senhua et BioShockControl offre une histoire intrigante en même temps qu’un jeu intense pendant sa vingtaine d’heures – trentaine en ajoutant les deux extensions – à laquelle on n’est pas surpris d’apprendre que Hideo Kojima himself a prêté sa voix pour un caméo délicieux, évidemment envoûté aussi par l’unicité qui se dégage du TPS.

 

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