Scripta : le jeu de cartes et de mots entre Scrabble et Uno !

Costalorien, j’ai vite entendu parler de la maison d’édition locale Aliadys et de leurs deux premiers jeux, Scripta et Allégeance. Curieusement, je ne m’y intéressais pas plus que cela, conscient d’être difficilement séduit par les petits jeux de cartes, et préférant logiquement me consacrer à des titres plus évidemment susceptibles de me plaire. Il a fallu toute la passion de la blogueuse Ludigurl, l’une des seules que je lis régulièrement, pour me décider à tenter le coup, en commençant par Scripta.

J’aime après tout assez les jeux de lettres, peu étonnant compte tenu de mon background sans doute, même si je ne suis pas particulièrement doué pour ceux demandant de mobiliser finement une grande variété lexicale. On se souvient par exemple que j’avais beaucoup apprécié Word Bank, qui avait su trouver le twist qu’il fallait pour faire appel à plus de malice que de vocabulaire, ou le cérébral et déjanté Gorilla Marketing. Scripta réitérera-t-il l’exploit ?

Conçu par Kara, illustré par Hervé Becasse et Mickaël Nardy, Scripta est vendu 15 euros et s’adresse à 2 à 5 joueurs de 6 ans et plus pour des parties d’une vingtaine de minutes.

 

Écrire et taquiner

Rien de plus facile que la mise en place : chaque joueur reçoit 7 cartes, on en dévoile une et le reste constitue une pile face cachée.

Puis on désigne comme premier joueur celui qui possède le plus de lettres dans son prénom (ou son nom de famille en cas d’égalité), et la partie peut déjà commencer !

Il va s’agir, à tour de rôle, de jouer une carte de sa main (représentant une lettre) après celles déjà posées, afin de poursuivre un mot existant. Si la première carte était un Joker, le premier joueur choisit logiquement quelle lettre elle représente.

Une carte Joker peut remplacer n’importe quelle lettre. Si le mot devant soi comporte un Joker et qu’à son tour, on possède la lettre qu’il remplace, on peut poser sa lettre et récupérer le Joker. Malin pour nous décourager d’utiliser les rares Jokers à tort et à travers, y compris pour des lettres communes.

Si l’on estime qu’il n’est plus possible de poursuivre le mot, parce qu’on n’aurait pas d’idée, pas les cartes correspondantes (un cas tout de même plus fréquent) ou qu’on l’estimerait achevé, on a le choix :

  • de se coucher, et donc de renoncer à jouer sur ce mot même si tous les autres joueurs posaient une carte et que notre tour revenait.
  • de piocher deux cartes et d’en jouer une, ou de se coucher si aucune des deux cartes piochées ne permet de poursuivre le mot. On tente ainsi de rester dans la course, au risque d’avoir trop de cartes en main. Évidemment, il faut prendre cette décision en réfléchissant aux probabilités. Comme au Scrabble, le nombre d’occurrences de chaque lettre répond à leur récurrence dans le langage français, avec beaucoup de E et de S par exemple. Si le mot possède déjà un certain nombre de lettres, le nombre de lettres différentes susceptibles de le prolonger est sans doute très bas, mais cela peut encore être envisagé s’il s’agit d’un S ou que l’on peut espérer un Joker. Si au contraire il contient très peu de lettres mais qu’on ne voit vraiment pas quoi faire avec sa main, on aurait toutes les raisons de repiocher.

 

 

C’est que, comme au UNO, jouer une carte ne permet pas seulement d’en avoir une de moins dans la main. Si c’était le cas, en piocher deux pour éventuellement n’en poser qu’une serait simplement inconsidéré. Plusieurs portent un effet très avantageux :

  • faire passer son tour au joueur suivant (particulièrement terrible à deux, bien entendu).
  • faire piocher une carte à tous nos adversaires.
  • poser immédiatement une nouvelle carte si on le peut.
  • prendre le jeton Premier joueur, qui nous permettra de commencer le mot suivant.
  • prendre un jeton Scripta (qui vaut 2 points de victoire).
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Le symbole correspondant à chaque pouvoir est très clair, mais Scripta a en outre le bon sens de fournir une petite aide de jeu individuelle pour les récapituler.

Quand tous les joueurs se sont couchés, on regarde le mot formé. S’il existe tel qu’il est écrit, le joueur ayant contribué le dernier récupère un jeton Scripta et le jeton Premier joueur, y compris si quelqu’un d’autre l’avait récupéré grâce à un effet de carte.

S’il n’existe pas, on s’assure auprès du dernier joueur ayant contribué qu’il avait bien un mot en tête, qui n’a simplement pas pu être achevé faute des bonnes cartes. En ce cas, on défausse simplement les cartes et on passe le jeton Premier joueur au suivant dans le sens horaire – à moins qu’il ait été récupéré par un effet de carte, cette fois prioritaire.

Dans le cas où il aurait bluffé, ou celui où il aurait poursuivi un mot contenant une faute d’orthographe, il récupère l’ensemble des cartes posées. Ce n’est qu’à ce stade de la partie que l’on peut vérifier dans un dictionnaire la validité de la proposition.

Puis on recommence une manche en dévoilant à nouveau la première carte de la pioche.

 

La partie s’achève aussitôt qu’un joueur a posé sa dernière carte. Chacun gagne alors 2 points par jeton Scripta en sa possession et retire 1 point par carte dans sa main. Une petite subtilité de score qui n’offre pas nécessairement la victoire à celui qui aurait défaussé toute sa main, mais cherche un équilibre entre rapidité de défausse et habileté au cours des mots précédents.

C’est qu’il existe un mode simplifié, ignorant les jetons Scripta (à la fois comme effet de carte et pour récompenser celui qui aurait achevé un mot existant), et accordant justement  la victoire au premier joueur à avoir défaussé sa dernière carte. Plus direct sans doute, mais pas particulièrement intéressant, les règles « normales » étant déjà tout à fait simples et directes. Par ailleurs, si on peut trouver « injuste » qu’une lettre octroie autant de points que l’achèvement d’un mot, évidemment plus méritoire, j’aime assez l’idée qu’en possédant une carte avec l’effet Scripta, on soit ainsi encouragé par le jeu à l’utiliser, créant une petite tension bienvenue.

 

Scripta, un nom écrit en lettres d’or ?

Scripta a avant tout l’avantage de ne pas se prendre pour ce qu’il n’est pas. Présenté dans une petite boîte à 15 euros comme un petit jeu de lettres et d’ambiance, il tient parfaitement ses promesses tant pour l’amusement à la UNO qu’il suscite avec ses enquiquinement constants que pour la réflexion lexicale à laquelle il encourage. Si vous n’êtes pas très bon au Scrabble, ne vous inquiétez pas, l’idée de poursuivre un mot en ne posant qu’une lettre, choisie dans une main assez réduite, évite de se perdre réellement dans un dictionnaire mental, et rend Scripta assez aisé même pour des enfants – bon courage pour leur infliger un ornithorynque, un postprandial ou une épizeuxe.

Pourtant, le jeu sait disséminer ce qu’il faut de tension : comme ses phases sont très courtes, ne constituant que dans la rédaction collective d’un mot, il est bon de réfléchir à sa contribution quand on ferait face à une alternative. Faire diminuer sa main est une chose, offrir l’achèvement du mot à un adversaire avec le bonus conséquent que cela implique en est une autre, de sorte que l’on aura tout intérêt à conclure le mot en cours ou à le faire bifurquer soudain dans une direction inattendue et plus rare. Amusant, assez habile, et tout à fait approprié en tant que premier jeu d’un éditeur souhaitant inspirer de la curiosité pour la suite !

 

Venez découvrir nos photos de Scripta sur notre instagram dédié aux jeux de société !