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L’Expédition perdue et Fontaine de Jouvence – Tintin et la Cité perdue de Z

L’Expédition perdue et Fontaine de Jouvence – Tintin et la Cité perdue de Z

 

Commençons par une confession honteuse, je ne cite Tintin que parce que c’est la référence utilisée par tous ceux qui ont vu les dessins de L’Expédition perdue et son style indéniablement typé « ligne claire », d’ailleurs dû à l’Anglais Garen Ewing, effectivement artiste sur des bandes dessinées comme la trilogie Julius Chancer. Plutôt que Hergé, c’est Floc’h ou Alain Dodier, à la rigueur Edgar P. Jacobs, que j’aurais dû citer, mais vous admettrez que « Jerome K. Jérôme Bloche et la Cité perdue de Z » aurait été autrement moins évocateur…

Pour cette Cité perdue, je n’ai heureusement pas cédé à la même facilité. C’est en effet bien à la quête de Z par Percy Fawcett que le titre et le thème de L’Expédition perdue renvoient après un réel travail de documentation, puisqu’il faut dans ce jeu de société de Peer Sylvester (Judge Dredd: The Cursed Earth) incarner une équipe d’explorateurs tentant de survivre dans la jungle amazonienne jusqu’à leur hypothétique découverte des vestiges de cet El Dorado.

Une idée intéressante, à la fois pour son ancrage historique que pour sa dimension coopérative et survivaliste, matérialisée par un style artistique bien connu, et pourtant inhabituel dans le jeu de société, voilà qui paraît déjà prometteur, et l’est encore davantage quand on sait L’Expédition perdue publié par Osprey (LondonEscape from Aliens in Outer SpaceJonathan Strange and Mr. NorrellEmbers of Memory) et localisé par Nuts! (1066, One Deck DungeonSub Terra, La Traque de l’Anneau, AuZtralia, Palm Island…).

Grand amateur du superbe film The Lost City of Z de James Gray, je tenais donc particulièrement à tester ce jeu, et après l’avoir bien promené durant mes errances estivales et beaucoup sorti, à en parler ici. Il se présente en effet dans un format relativement compact (mais pas aussi portatif non plus que One Deck Dungeon), vendu 20 euros et s’adressant à 1 à 5 aventuriers de 12 ans et plus pour des parties d’une durée variant entre la demi-heure et la petite heure. Il sera également question de sa riche extension Fontaine de Jouvence, disponible pour 13 euros 50.

 

L'Expédition perdue

Survie coopérative

Quel que soit le nombre de joueurs, on prend trois cartes Explorateur, respectivement dotées des compétences Jungle (représentée par une feuille), Orientation (une boussole) et Campement (une tente). On appréciera que chaque spécialité soit représentée par un homme ou une femme, tous faisant d’ailleurs référence à des personnages historiques dont le lien avec l’expédition perdue est parfois éloigné, Teddy Roosevelt, Isabelle Eberhardt, Candido Rondon, Roy Chapman Andrews, Ynes Mexia et Besse Coleman. À trois joueurs, on prendra naturellement plaisir à incarner chacun un explorateur en posant sa carte devant soi, mais en gardant à l’esprit que si l’un venait à mourir, le joueur continuerait de participer tout à fait normalement.

Chacun pioche ensuite quatre des 56 cartes d’aventure, ou six à deux joueurs.

3 pions de munitions (en forme de balle, représentant une balle et rouges) ainsi que 4 pions de nourriture (ronds, représentant une cuisse de poulet et jaunes) ou 3 à cinq sont placés dans la zone d’équipe, et donc communes à tous.

Il s’agit alors de choisir son niveau de difficulté, dont dépendra la taille de la jungle, matérialisée par sept ou neuf cartes d’expédition juxtaposées, et le nombre de pions de Santé (carrés, représentant un + et bleus) posés sur chaque explorateur (quatre ou trois). Il m’est arrivé quelques fois de perdre en facile, même après avoir gagné en normal, n’ayez donc vraiment pas honte de commencer par la difficulté la plus accessible, le jeu sera déjà bien assez corsé.

Sur la première carte d’expédition on pose le meeple jaune ou vert figurant l’équipe, la dernière représente évidemment Z.

Il ne reste plus qu’à prendre le grand jeton Matinée/Soirée, d’abord placé sur sa face Matinée, à désigner un premier joueur et la partie peut déjà commencer.

En dehors du choix de la difficulté, la mise en place si fluide et rapide que l’on a à peine le temps d’admirer le design très intuitif des jetons et d’observer ses cartes… toutes uniques, aussi bien par rapport à leur pouvoir que quant à leur illustration. Un rapide coup d’œil suffit cependant à constater que les dangers sont bien plus nombreux que les occasions de se reposer, de se fournir et de se nourrir…

Pendant la matinée, en commençant par le premier joueur, chacun pose une carte de sa main sur une même ligne jusqu’à ce que tous en aient posé deux. Il est crucial que tous voient distinctement les cartes posées par les autres. On les réorganise dans l’ordre numérique croissant, puisque toutes portent un chiffre entre 1 et 56, puis on les applique les unes après les autres en respectant quelques principes.

Chaque carte correspond porte des bandeaux, comme des récitatifs racontant ce qu’il se passe dans la case en cours. Quand le bandeau est jaune, il s’agit d’un événement, tous les symboles qu’il contient doivent être appliqués. Quand il est rouge, il s’agit d’un choix, on se concerte pour n’appliquer qu’un des bandeaux rouges de la carte en proposant deux ou trois. Quand il est bleu, il s’agit d’une option, on est libre de les ignorer ou de les appliquer, et même de réaliser les actions de tous les bandeaux bleus d’une même carte.

Les symboles représentés dans les récitatifs peuvent être des ressources, c’est-à-dire de la nourriture, des munitions ou de la santé. Si le symbole est noir (plein), on pioche une de ces ressources dans la réserve générale pour les placer dans la zone d’équipe (munitions et nourriture) ou sur les explorateurs (santé). Il va de soi que les munitions sont particulièrement rares ; quant à la santé, un explorateur ne peut en avoir davantage que la quantité qu’il en avait en début de partie, logique. Si le symbole est blanc (vide), on perd la ressource correspondante, en choisissant dans le cas de la santé qui cela concerne. En cas de litige, comme ce sera toujours le cas dans L’Expédition perdue, c’est le premier joueur qui tranche.

Comme on peut l’imaginer, quand un explorateur n’a plus de santé, il disparaît de la partie. Les survivants pourront encore gagner si un seul d’entre eux atteint la Cité perdue, même si leur victoire sera plus amère… Si l’on doit dépenser de la nourriture et qu’on n’en a plus, on supprime un point de santé, et si une action exige des munitions qu’on n’a pas, il faut se reporter vers les actions n’exigeant pas de munitions, il y en a toujours, et elles sont toujours beaucoup moins favorables (oui, on se croirait dans un Resident Evil).

Ces symboles peuvent également être des compétences. Si le symbole est noir, cela signifie que l’on peut garder la carte dans la zone d’équipe, et la défausser quand on croisera ensuite le même symbole en blanc. À défaut de carte à défausser, il faudra choisir entre faire perdre 1 point de vie à l’explorateur disposant de cette compétence, ou deux points de vie à un autre explorateur…

Les symboles des cartes d’aventure peuvent aussi se rapporter au chemin, en permettant de sauter la prochaine carte (donc d’en ignorer complètement les effets positifs comme négatifs), d’intervertir deux cartes à venir, de défausser la dernière carte de la ligne ou d’en piocher une nouvelle et de l’ajouter au bout.

Enfin, un symbole autorise la progression du meeple d’une carte, tandis qu’un autre tue simplement un explorateur.

On comprend mieux pourquoi l’ordre des cartes est crucial. On évitera par exemple de poser l’une des rares cartes vraiment positives si son nombre est tout juste supérieur à celui d’une carte exigeant de sauter la suivante. De même, pouvoir même un symbole de compétence de côté avant une carte exigeant de le défausser sera toujours plus intéressant que de perdre un ou deux points de santé puis de gagner un symbole. Il arrivera enfin souvent (si vous parvenez jusque-là) que l’on ait dans la même rangée des cartes achevant une équipe mal en point et le ou les symboles permettant une ultime avancée vers la cité. Mieux vaut que les dernières arrivent avant les premières, on s’en doute…

Il faut vraiment admirer la capacité des cartes de L’Expédition Perdue (toutes distinctes, on le rappelle) à offrir une cohérence entre leur illustration, leur titre et leurs effets. Pour ne prendre que deux exemples, en rencontrant un crocodile, on a le choix entre dépenser une balle pour gagner deux jetons de nourriture (on le tue et on récupère sa viande) ou ajouter deux cartes à la fin du chemin (on le fuit et cela nous fait prendre un détour considérable) ; en découvrant des ruines, on perd un jeton de nourriture pour supprimer les deux dernières cartes (cette étape cruciale semble nous rapprocher de la fin), puis on peut (bandeau bleu) perdre un point de santé et un symbole d’orientation pour progresser et/ou perdre un jeton de nourriture et un symbole de campement pour progresser (galvanisés par la trouvaille on se précipite, ou on se repose pour avancer de plus belle ensuite). Et toutes les cartes s’expliquent de la sorte, ce qui permet de ne pas en parler seulement pour les symboles qu’ils portent, mais aussi plus thématiquement pour ce qu’ils signifient de notre aventure !

Une fois toutes les cartes appliquées, on retourne le jeton Matinée/Soirée sur son côté soirée et on défausse un jeton de nourriture (parce qu’il faut bien se nourrir), qu’il reste trois explorateurs ou un seul d’ailleurs, dont on pourrait ironiser sur la gourmandise si ses collègues n’avaient pas disparu assez tragiquement…

Le soir, on pose les cartes restantes, toujours dans le sens des aiguilles d’une montre, jusqu’à ce qu’on n’en ait plus, à la différence près que l’on appliquera désormais les cartes dans l’ordre dans lequel elles ont été posées. Vous vous apercevez assurément sans peine de la profondeur tactique de ce changement tout bête. Ainsi sera-t-il essentiel pendant le jour de penser aux cartes de la nuit en faisant attention à l’ordre des joueurs…

On applique à nouveau toutes les cartes, on les défausse et le matin revient (non, pas de nuit de sommeil pour des explorateurs au cœur de l’Amazonie) : on perd à nouveau un jeton de nourriture, le joueur suivant devient premier joueur et distribue une nouvelle main de cartes.

La partie peut s’achever de trois manières : soit un explorateur foule la Cité perdue, et l’équipe gagne, soit les trois explorateurs meurent… et perdent (oui oui), soit on mélange pour la deuxième fois la défausse pour en reconstituer un paquet d’aventure épuisé, et on perd, sans doute démoralisé par la répétition de tant de malheurs.

 

Survivre… plus longtemps que son rival !

L’Expédition perdue se décline aussi en jeu compétitif pour deux joueurs exclusivement, comme s’il n’était pas déjà assez difficile comme cela de survivre aux mille dangers de la jungle amazonienne…

Comme on s’en doute, chacun prend alors trois explorateurs avec quatre points de santé, trois munitions, trois pions de nourriture et un meeple, placé sur la première des sept cartes d’expédition. On retire en outre six cartes du paquet de cartes d’aventure (habilement distinguées par la présence d’un point d’exclamation), on en pioche six et on tire à pile ou face le premier chef d’expédition.

Les principes de jeu sont les mêmes, y compris le système de matinée et de soirée, sauf que l’on peut désormais poser ses cartes au-dessus de la piste d’expédition ou en-dessous, de sorte que l’on définira deux sentiers qui pourraient très bien s’avérer déséquilibrés.

La matinée, quand chacun a joué trois cartes, on les arrange dans l’ordre croissant puis le chef d’expédition décide de suivre l’un des deux chemins… ou de laisser son adversaire choisir d’abord. L’autre joueur applique ensuite le chemin restant. Le soir, quand chacun a joué ses trois cartes, ce sera à l’adversaire (celui qui n’est pas chef d’expédition) de choisir le premier quel chemin prendre (si je comprends bien une règle assez peu claire sur ce point).

Le carnet de règles explique judicieusement la réflexion stratégique à avoir : si vous êtes le joueurs ayant l’initiative du choix, vous ferez tout pour qu’un chemin soit nettement meilleur que l’autre, tandis que le deuxième joueur aura tout intérêt à les équilibrer autant que possible pour ne pas en subir un qui soit trop négatif. L’Expédition perdue peut alors s’avérer particulièrement pervers, on s’arrangera pour sauter des cartes arrangeantes dans le chemin que l’on pense attribuer à son adversaire, on prend garde de conserver pour la soirée des cartes positives et négatives. Bref le jeu s’avère tactiquement très différent sans du tout trahir les sensations ou les principes des règles coopératives !

Une fois les six cartes jouées et appliquées, le jeton Premier joueur est transmis à l’adversaire, et la matinée commence.

La partie s’achève si tous les explorateurs d’une équipe meurent (l’équipe adverse gagne), si le paquet d’aventure se vide pour la deuxième fois (le joueur le plus proche de la cité gagne, en cas d’égalité celui qui possède le plus d’explorateurs en vie ; en cas d’égalité, celui qui a commencé comme chef perd) ; si une équipe atteint Z (mêmes règles en cas d’égalité).

L’enfer vert en solitaire

Dans le mode solitaire de L’Expédition perdue, on prend évidemment un explorateur de chaque spécialité (doté de trois points de santé), trois munitions, trois jetons de nourriture, un meeple sur la première… des neuf cartes d’expédition, et six cartes d’aventure.

Pendant la matinée, on joue deux cartes, puis on y ajoute les deux premières cartes de la pioche, on ajoute une carte de sa main et une dernière carte de la pioche. Cela fait évidemment beaucoup d’aléa à gérer seul, mais c’est vous qui avez choisi de vous lancer sans aide dans la jungle…

La soirée est plus permissive. On choisit six fois si l’on pose une carte de sa main ou une carte de la pioche, et si on la place à droite ou à gauche du chemin, jusqu’à ce que l’on ait épuisé sa main et ajouté trois cartes de la pioche.

Les conditions de victoire et de défaite sont les mêmes que pour les autres modes de jeu, puisque la partie s’achève quand on atteint la cité de Z, que les trois explorateurs sont morts ou que le paquet d’aventure se vide pour la deuxième fois.

Si le challenge ne vous suffisait pas, L’Expédition perdue propose de surcroît de calculer un score à battre lors de vos prochaines parties en additionnant le nombre de pions de nourriture, de cartes de compétence dans la zone d’équipe et cinq points si le paquet n’a pas été remélangé une seule fois, puis en multipliant le total par le nombre d’explorateurs final. Pour le coup, je ne suis pas franchement convaincu par la pertinence de cette proposition, la victoire ou la défaite étant aussi conditionnée à la tactique du joueur qu’au hasard du tirage, de sorte que l’on aura parfois plus de mérite personnel dans une défaite que dans une victoire pulvérisant notre dernier score établi, mais si cela peut être une motivation pour pratiquer encore et encore le mode solo, pourquoi pas bien sûr !

À la rigueur, si vous perdez trop, il peut être plus motivant de s’autoriser un mode facile ou un mode normal (en considérant ce mode par défaut comme le difficile), mais en multipliant le total par le nombre d’explorateurs moins un ou moins deux. Ainsi aurez-vous la satisfaction de gagner et la conscience que votre score très bas pourrait aisément être augmenté en montant la difficulté, donc davantage de motivation pour monter d’un cran.

 

Fontaine de Jouvence

Si un jeu procédant par tirage de cartes se prêtait évidemment très bien à une extension, la richesse de la boîte de base de L’Expédition perdue ne rendait pas si évident un nouvel enrichissement. Osprey et Nuts! font alors très bien les choses (on s’en doute) avec Fontaine de Jouvence & autres aventures, qui comporte pas moins de quatre modules pour étendre le jeu, jouables indépendamment ou combinables comme on le souhaite.

Quelle que soit l’extension ou la combinaison d’extensions choisie, on applique désormais la règle d’endurance : s’il fallait piocher une nouvelle carte et qu’il n’y en avait plus dans la pile, on ne remélange pas la défausse mais on perd immédiatement la partie. Vous vous êtes imposé le défi de faire plus que trouver la Cité perdue de Z, à vous d’assumer cette décision… Pour autant, il ne s’agit pas de gonfler artificiellement la difficulté de L’Expédition perdue, cette règle est largement compensée, selon l’extension, par l’addition de nouvelles cartes augmentant donc la taille de la pile, ou une facilitation plus ou moins poussée de la partie.

« Nouveaux amis » simplifie justement considérablement L’Expédition perdue, avec des additions aussi modestes qu’aimables. On y associe en effet l’équipe d’explorateurs à l’un des trois compagnons au hasard. Dans quelque difficulté que ce soit, les explorateurs ne bénéficieront que de trois points de santé.

La « femme forte » Vulcana n’a aucune capacité particulière, mais commence avec cinq points de santé. L’indigène Comatsi propose les trois spécialités, et peut donc perdre l’un de ses trois points de santé quelle que soit la compétence exigée. Le chien Rinty peut perdre l’un de ses trois points de santé pour supprimer la dernière carte du chemin. Trois effets formidables et équilibrés, qui donneront un intéressant relief aux parties, y compris en compétitif où chaque joueur en piochera un !

À l’exception de Rinty, les compagnons peuvent être sacrifiés à la place des explorateurs lorsqu’une mort est exigée, à condition qu’ils possèdent encore des points de vie bien sûr. Et comme on s’en doute, si les explorateurs meurentla partie est perdue, on ne peut la finir avec les seuls compagnons.

 

 

« La Fontaine » est au contraire particulièrement exigeante, puisque la jungle est peuplée de conquistadores hostiles, ayant découvert la fontaine de jouvence au 16ème siècle sans savoir que l’immortalité acquise n’éviterait pas leur déliquescence physique. Les règles suggèrent judicieusement d’associer l’extension à « Nouveaux amis » pour trouver une sorte d’équilibre, au moins la première fois. On appréciera que les 12 cartes ainsi ajoutées à la pile racontent vraiment une histoire, de la découverte innocence de l’épave d’un galion espagnol à la découverte de la fontaine, en passant par les confrontations avec les morts-vivants, les tentatives de les semer… Sylvester et Ewing ont fait au mieux pour maintenir la cohérence entre thème, illustration et effets, et cela se ressent très bien dans cette série particulièrement immersive.

Toujours dans le registre fantastique, « La Marque » ajoute six cartes d’aventure risquant de maudire les explorateurs, d’en faire un homme-panthère. En tombant sur l’une de ces six cartes et en appliquant pour la première fois un cartouche contenant une empreinte de patte, on glisse derrière l’un des explorateurs la carte « Homme Panthère ». Si l’on applique une deuxième fois une marque, cet explorateur est recouvert par la carte « Homme Panthère ». Il perd alors sa compétence, mais regarde tous ses points de santé et possède désormais la compétence Munition, qui lui permet de perdre des points de santé pour utiliser une action exigeant une ou plusieurs munitions.

On peut ainsi convertir la fatalité (un explorateur perdant sa compétence) en opportunité (plus de points de santé et une nouvelle compétence utile) désirable, et il faudra bien entendu réfléchir posément aux avantages et inconvénients de la transformation selon la situation où elle est possible, l’extension ajoutant ainsi un choix tout à fait intéressant.

« La Montagne » enfin dresse un sommet pentu entre les explorateurs et la cité de Z. On place bien la cité au bout du chemin, mais la première carte est désormais un camp de base, et le chemin est constitué de cinq (en facile ou en compétitif), sept (normal ou solo) ou huit cartes de pente face cachée, au milieu desquelles on placé le pic face visible.

Quand l’équipe avance, on dévoile la carte d’expédition suivante, mais quand elle arrive sur le pic, elle a une visibilité sur toute la vallée et on dévoile donc les cartes restantes. Au début de chaque manche, juste avant l’application des cartes d’aventure (mais juste après le choix du chemin en compétitif), on applique l’effet de la carte d’expédition où elle se trouve. Sur le camp de base, ils récupèrent un jeton de nourriture. Certaines cartes exigeront d’ajouter une carte au chemin, de perdre de la nourriture, d’utiliser une compétence de campement pour regagner une vie, de gagner deux jetons de nourriture ou une munition (en découvrant l’épave d’un avion), et trois d’entre elles portent le nouveau symbole de jumelles.

Celui-ci permet l’action Éclaireur : on révèle les trois premières cartes du paquet d’aventure, et on les replace dans l’ordre de son choix ou on les défausse toutes les trois. En solo cependant, on les replace dans le même ordre au-dessus de la pile ou on les défausse, on ne peut les réarranger, puisque cela aurait évidemment trop d’incidences sur la suite.

 

Une expédition perdue, dix bons jeux retrouvés ?

On est d’abord immanquablement attiré vers L’Expédition perdue par ses illustrations directement inspirées par la bande dessinée franco-belge. Puis on découvre un passionnant jeu de survie, cohérent avec la ligne éditoriale de Nuts ! Publishing très axée sur les productions exigeantes, où le hasard crée de la variété et suscite des expériences uniques et imprévisibles, pour le meilleur et pour le pire. Pour le pire parce que L’Expédition perdue peut s’avérer réellement difficile. Pour le meilleur parce qu’une défaite inspire aussitôt le désir de recommencer, preuve que quelque chose a profondément fonctionné, quand on aurait pu s’attendre à rejeter une difficulté essentiellement liée au tirage aléatoire des cartes. Mais non, on est déjà captif de cette jungle amazonienne impitoyable, dont on commence à connaître les dangers même si l’on ne peut évidemment savoir lequel viendra ensuite, et dont on a envie de percer les secrets. À la manière d’une bande dessinée toujours, on dessine son aventure en posant des cases dont chacune raconte une action, et que l’on applique ensuite dans le sens de la lecture pour produire une narration suivie à partir de fragments juxtaposés, et l’on est d’autant mieux immergé que les cartes ambitionnent une cohérence entre leur titre, leur illustration unique et les actions qu’elles impliquent par des symboles très clairs – L’Expédition perdue peut ainsi très bien être pratiquée par un public multilingue.

Mécaniquement accessible mais dramatiquement exigeantL’Expédition perdue sait en outre offrir une inattendue variété, d’abord entre ses modes de difficulté, puis avec la possibilité de passer de la coopération à la compétition ou à l’exploration solitaire, enfin avec sa très riche extension Fontaine de Jouvence & autres aventures. Quatre modules que l’on peut appliquer indépendamment ou cumuler, et ce dans tous les modes de la boîte de base, pour toucher tous les aspects du jeu (les explorateurs, les cartes d’aventure, les cartes d’exploration) avec une addition aisée à appréhender et pourtant très rafraîchissante.

Il y avait longtemps que je n’avais pas pratiqué un jeu où la coopération était aussi importante, où toute l’audience est saisie par la nécessité de communiquer et de s’entraider, et je n’en étais que plus impressionné de découvrir avec quelle facilité ce parfait jeu d’équipe pouvait se mouvoir en duel féroce et pervers. Assurément un must-have, pour son ambiance, son accessibilité et sa tension !

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