Meilleur jeu de l’année ? De tous les temps ? L’avis critique de la rédaction sur The Legend of Zelda : Breath of the Wild
Juste avant la sortie (et donc notre critique) du dernier et plus complet DLC de The Legend of Zelda : Breath of the Wild, le 31 décembre, il nous a semblé qu’il était temps de revenir sur LE jeu non seulement de l’été, mais qui a le plus fait parler de lui en 2017, avec un enthousiasme moins frais et donc peut-être moins aveugle !
L’avis de Moyocoyani : dans Breath of the Wild, il faut savoir apprécier et il faut savoir prendre de la distance
Breath of the Wild, un Zelda Bethesda-like ?
Ce qui fascine d’abord avec Breath of the Wild, c’est la manière dont il s’inspire de la magie des premiers Elder Scrolls tout en les adoucissant eu égard à l’exigence contemporaine d’accessibilité et s’efforçant de les adapter à un gameplay plus « émergent ». Si la plupart des jeux Zelda mettaient en avant l’exploration, c’est la première fois, au moins dans un Zelda en trois dimensions, que l’on se retrouve perdu dans un monde immense, sans obligation de suivre les vagues indications que l’on nous donne sur les lieux à rejoindre, avec ce plaisir de chaque instant de se repérer grâce à la géographie dessinée par les tours et les montagnes, et grâce aux rares panneaux qui semblent promettre enfin la proximité d’un havre de paix, d’un lieu ami plein de bienveillance et de petites ou grandes quêtes. Ou au plaisir de chaque instant de se perdre encore davantage, de foncer tête baissée dans une obscure forêt, dans un fleuve dont on ne voit pas le bout ou dans l’escalade d’une chaîne de montagnes synonyme des plus grands périls. En y ajoutant le facteur d’incertitude représenté par le cycle jour/nuit et la météo changeante, avec tout ce qu’ils impliquent de façades glissantes et de monstres tapis dans l’obscurité, et la possibilité de rencontres inopinées de personnes, de sanctuaires et d’énigmes, l’univers du jeu correspond bien aux attentes que l’on peut avoir d’un monde ouvert, plus light assurément qu’un Elder Scrolls (dont les dizaines de villes et les quêtes à chaque embranchement ne laissaient pas envisager de fin), mais d’autant plus accessible.
Une accessibilité naturellement amplifiée par l’extension de notre capacité à interagir avec le monde. Les arbres ne sont plus des éléments de décor rigides, ils sont des cachettes et des lieux d’observation, ils fournissent fruits, feuilles, branches et fagots de bois, ils peuvent être saisis par des ennemis comme matraques ou enflammés pour susciter leur effroi. Chaque objet, chaque lieu, offre ainsi de nombreuses possibilités, s’adaptant à ce que vous voulez faire et à votre style de jeu, à votre personnalité, mais aussi à votre inventivité. Il va de soi que quand on peut planer au loin depuis les plus hauts sommets, créer des colonnes de glace, tirer des flèches électriques et de feu en arrêtant le temps, lancer des bombes rondes ou carrées, cuisiner des centaines de plats, de la viande grillée au gâteau, l’exploration et la découverte prennent admirablement le pas sur les combats et le scénario pur.
Heureusement d’ailleurs, parce que si les combats sont tout de même formidables dans leur valorisation d’une maîtrise, le bestiaire est assez réduit, tandis que le scénario mobilise étonnamment des ressorts du post-apocalyptique… en les exploitant à peine, puisqu’il part du principe étonnant que le Fléau, après avoir rasé une partie d’Hyrule, est resté cantonné au château grâce aux pouvoirs de la princesse Zelda pendant… cent ans ! Difficile de prendre au sérieux une menace que plus personne n’évoque et qui ne se fait pratiquement plus ressentir, sinon dans quelques jolies zones en ruine purement esthétiques, puisqu’elles ne sont liées à aucune quête. On redoutera davantage les « mini-boss » que l’on croisera soudain sur la carte sans que rien ne nous y prépare, et qui rappellent très agréablement les Elder Scrolls dans le frisson que ces rencontres suscitent, qu’on décide de les fuir ou qu’on prenne son courage à deux mains. Les quelques quêtes secondaires sont en revanche à peine scénarisées, un village semble même n’exister que pour proposer un village de plus, comme s’il était trop difficile de lui donner un background ou même un design, ce qui n’est que partiellement compensé par le relief que les sanctuaires cachés confèrent à la géographie, la délicieuse cité Gerudo très japonaise dans ses délires, la verticalité amusante de la cité Piaf ou le petit défi constitué par le seul voyage vers la cité Goron. On aimera beaucoup le fait que les « souvenirs » soient si ténus, presque évanescents, mais la lore ne tient plus alors que dans les chants à peine mis en scène, et l’effort appréciable d’approfondissement psychologique du Roi Rhoam et de la Princesse se fait par trop petites touches et au détriment de tous les PNJ, prodiges compris, ce qui est bien regrettable pour un jeu exigeant tout de même une centaine d’heures de jeu, et aboutissant sur un combat final aussi plat dans sa deuxième phase…
L’éternel débat sur l’usure des armes et l’inventaire limité
L’usure des armes, qui a pour conséquence leur destruction au bout d’un certain nombre de coups, et la limite de l’inventaire (nombre de cases restreint ou poids maximum) sont deux mécaniques que je n’aime généralement pas du tout, et que, tout en en comprenant la logique, je trouve même passablement incohérentes dans ce qu’on pourrait grossièrement appeler les Bethesda-like : alors que d’un côté on nous pousse à l’accumulation en mettant à notre disposition des centaines d’armes et des milliers d’objets parfois invraisemblables, de l’armure légendaire à la petite cuillère, on nous pénalise très vite de l’autre sous prétexte qu’il nous faut faire des choix stratégiques. Par conséquent, il faut choisir entre ignorer volontairement la possibilité de s’emparer de la plupart des objets et constamment retourner dans l’inventaire pour en jeter, ce qu’il faudra faire dans tous les cas en maudissant le jeu à chaque fois qu’une visée imprécise nous aura fait nous emparer d’un objet dont nous ne voulions pas.
Étonnamment, j’ai trouvé que dans Breath of the Wild cette mécanique se justifiait enfin. D’abord parce que la restriction d’inventaire ne concerne que les armes, arcs/flèches et boucliers, dans trois sections séparées, tandis que les vêtements, les ingrédients et les plats peuvent être portés sans réserve (ou presque en ce qui concerne les plats). Il est ainsi difficile d’être frustré, les objets les plus fréquents et les plus importants n’exigeant pas de tri régulier. Les seuls à être limités sont usables, ce qui libère automatiquement une place d’inventaire dès qu’ils sont détruits, et nous pousse à varier plus souvent notre jeu : on vient de casser une épée à deux mains et on préfère garder la deuxième pour un gardien ? On tente la lance qu’on vient de trouver sur le Moblin qui nous fait face. L’objet est ainsi désacralisé, nous obligeant à en garder quelques-uns de côté pour les ennemis les plus forts ou les situations les plus gênantes, et à utiliser les autres de façon plus distanciée, tout en faisant attention à leur durabilité et au style de jeu que chacun exige. Après tout, même si vous n’aimez pas les haches, vous n’ignorerez probablement pas une hache à 40 points de dégâts quand votre arme préférée est une épée à 30… Par ailleurs, cette contrainte donne de l’intérêt à la recherche des noix korogu (ils vous en faudra bien une petite centaine pour être tranquilles), et donc à une relative exploration, tout en vous obligeant à un jeu plus varié, plus réfléchi et plus efficace, où l’arme ne vient qu’en complément des bombes et des ressources de l’environnement, et pas en substitut à toute stratégie.
Cette logique est la même dans les Bethesda-like, mais elle profite mieux à Breath of the Wild tout simplement parce que l’univers y est moins développé. Le défaut devient en l’occurrence une qualité : vous hésiterez rarement longtemps avant de jeter une arme pour en prendre une autre, parce que vous savez de toute manière que vous en trouverez assez vite une autre similaire, ou que vous jugerez assez vite laquelle est la plus puissante. Dans un monde où existent des centaines d’armes au corps-à-corps, de lancer, à feu, à plasma, en plus des bâtons de magicien et des queues de billard, le choix tactique et rapide devient fastidieux vide-grenier. Il faut dire que l’allure plus cartoon de Breath of the Wild aide aussi à alléger des phases qui seraient plus pénibles dans un design plus sombre et réaliste…
Petits défauts curieux dans un jeu si réfléchi
Il y a une chose qui ne s’use pas (et encore heureux), ce sont les vêtements, tuniques, armures, dont le design est toujours séduisant et les attributs souvent intéressants, parfois indispensables… vous imposant donc d’en changer assez souvent, ce qui vous fera vite constater que les retours permanents à l’inventaire à chaque fois que vous allez barboter deux minutes, que vous vous lancez dans l’escalade, que vous vous préparez à un combat, ou que vous vous rendez dans une zone aux contraintes climatiques fortes, peuvent s’avérer assez pénibles. Naturellement, Breath of the Wild a le bon goût de proposer des menus rapides pour les pouvoirs, les épées, les arcs et les flèches, ce qui le rend déjà plus praticable que beaucoup de RPG, mais c’est dommage, et cela vous fera sans doute sacrifier beaucoup d’équipement à cause de la flemme d’en changer tout le temps. Même les tuniques les plus jolies, celles que vous obtiendrez généralement assez tard, ne seront très probablement portées que quelques minutes, le temps de les admirer avant de vous rendre compte que leur pouvoir trop gadget ne vaut pas grand chose en comparaison des quatre ou cinq costumes entre lesquels vous tournez constamment et déjà un peu péniblement. Adieu masque majora, casque de Midona, armure de gardien, costume de Tingle, même adieu set barbare ou hylien, pourquoi gaspiller des ressources à vous augmenter alors que la tenue archéonique seule mérite vos efforts assidus puisqu’elle est la seule que vous porterez dans les combats les plus importants ?
Une autre feature m’a paru d’une inutilité assez flagrante, la possibilité de monter des chevaux. Je ne doute pas que certains adoreront faire la plus jolie des collections équestres et sillonner les plaines sur leurs montures, mais puisqu’il faudra en descendre à chaque fois qu’une montagne vous fera de l’œil (et de toute façon, sanctuaires et korogus se trouvent rarement au bord du chemin) et assez souvent pendant des combats où vous serez assez vite désarçonnés (sans même parler de la maniabilité de la monture, peu propice à la souplesse stratégique exigée par certains affrontements), il est possible que vous renonciez assez vite à des chevaux qui ne vous rejoignent de surcroît que quand vous vous trouvez dans leur proximité immédiate, sans quoi les siffler ne donnera aucun résultat… C’est sans doute ce point qui aurait pu être amélioré, à la manière d’un Twilight Princess ou d’un Red Dead Redemption, auquel Breath of the Wild fait souvent penser, et où la possibilité permanente de faire venir un cheval magique où que l’on soit servait agréablement à faire oublier la vacuité du monde.
Conclusion
Breath of the Wild est un jeu aussi excellent que Wind Waker avait pu l’être en son temps, et s’il souffre de quelques faiblesses en comparaison d’autres mondes ouverts, il paraît exceptionnel en ce qu’il tranche de façon très complète et réfléchie avec le reste de la licence Zelda, et plus généralement avec les jeux auxquels Nintendo nous avait habitués. Quelques problèmes de caméra assez handicapants dans des situations critiques ne ternissent pas trop la maniabilité exceptionnellement plaisante de Link, il y a juste assez de quêtes secondaires pour que l’on se sente libre sans être perdu, et quand on se dit que le succès du jeu annonce sans doute un approfondissement de son scénario pour le prochain DLC, et un perfectionnement de ses mécaniques au moins pour le prochain opus, il est difficile de ne pas y voir la plus douce des promesses pour l’un des jeux les plus rafraîchissants depuis longtemps.
L’avis de Macky : le jeu de l’année
Zelda : Breath of the Wild a été LE jeu de cette année pour moi, voire même le meilleur jeu de tous les temps. Je l’attendais avec grande impatience et je n’ai absolument pas été déçue. Je n’avais pas ressenti autant d’engouement depuis WoW Vanilla, autant vous dire que ça commence légèrement à dater ! Je ne saurais vous dire combien d’heures j’ai pu passer dessus. Tout m’a plu, le scénario, l’univers, les quêtes, les graphismes. J’y ai retrouvé la joie, la passion mais aussi la frustration d’Ocarina of Time et Majora’s Mask, deux jeux qui ont particulièrement marqué mon enfance et m’ont ouvert au monde des jeux vidéo.
BOTW est à mon sens, l’un des jeux les mieux pensés et réalisés de ces dernières années. Nous avons eu le droit à un jeu fini à sa sortie (c’est un exploit, tout le monde le sait). On a aussi eu le droit à un jeu long, super long, comme avant, le bon vieux temps. Un vrai coup de génie de la part de Nintendo quand on sait le nombre de personnes qui se sont ruées sur la Nintendo Switch pour pouvoir jouer au dernier Zelda. (Oui je sais, il est aussi sorti sur Wii U).