Que peut faire la technologie pour les musées ?

 

En ces temps de fortes chaleurs, tout espace climatisé peut s’avérer être un oasis au milieu du désert. Peut-être que cet été, les musées seront votre oasis.

Mais que fait un sujet aussi culturel que démodé (pour certains) sur votre site de culture geek ? Cleek a décidé de se pencher sur ce que la technologie et l’ère du numérique pouvaient offrir aux musées et à cette institution traditionnelle qu’est le patrimoine culturel.

Part de plus en plus croissante de notre société et de notre mode de vie, il n’est donc pas étonnant de voir que la technologie et le numérique, après avoir envahi la moindre once de notre quotidien, n’aient pas laissé exempts les musées. C’est donc une entrée aussi nécessaire que logique dans l’ère du numérique que les musées ont entamée il y a quelques années maintenant, et qui prend désormais de l’ampleur.

Loin d’être exhaustif, cet article vous propose donc un avant-goût des fruits de cette liaison (pas interdite, fort heureusement) selon trois axes principaux.

 

[divider]La technologie comme sujet[/divider]

 

L’impact le plus évident de cette interaction nouvelle entre musées et technologie, c’est bien évidemment la multiplication des musées SUR la technologie. Bien sûr, ce concept-même n’est pas nouveau, puisque déjà les musées des arts et métiers proposaient des rétrospectives techniques et technologiques au fil des âges. Certains musées se spécialisent cependant sur les technologies que nous qualifierons de « modernes », celles qui inspirent parfois notre imaginaire de science-fiction, et qui nourrissent notre quotidien de façon très concrète. Citons par exemple la Cité des Sciences et de l’Industrie de Paris, qui mélange aussi bien un saut dans le temps avec une reconstitution de la Grotte Chauvet (saut dans le temps que Cleek vous proposera sans doute prochainement), qu’une exposition sur les avancées de l’aviation solaire.

Autre illustration de ce rapprochement entre musées et technologies : l’apparition, ou plutôt la diversification des œuvres mettant en scène la technologie. Ne parlons pas cinéma ou happening filmé, mais évoquons ici des œuvres purement « technologiques », nécessitant obligatoirement du son, de la lumière, de l’hologramme, de l’incrustation, des lunettes 3D, des lunettes à réalité augmentée, des robots, ou que sais-je encore. À l’image de l’invention de la peinture à l’huile à l’époque, les nouvelles technologies ne sont que de nouveaux mediums pour les artistes, qui s’en donnent à cœur joie pour les exploiter. Ainsi, il est désormais courant dans des expositions plus ou moins ordinaires de passer dans une salle bourrée d’écrans et de sonos diffusant images et sons divers constituant une œuvre en soi.

 

https://youtu.be/yvNutGbEk6g

Face Hacking par l’artiste japonais Nobushimi Asai

 

On pourrait aussi parler, d’une façon peut-être plus anecdotique (et en sortant des murs du musée à proprement parler), du travail de mise en lumière de certaines façades, notamment de cathédrales, comme celles de Reims, de Strasbourg, de Nantes, de Rouen, et j’en passe.

 

[divider]La technologie comme outil[/divider]

 

Ce qui nous intéresse davantage aujourd’hui, ce n’est cependant pas tant la technologie comme nouvel objet artistique, mais la technologie comme outil pour la diffusion et la mise en valeur des œuvres plus traditionnelles, ou du moins déjà existantes. C’est pour cela que nous allons nous intéresser à deux éléments qui aident et enrichissent la visite pour les clients : l’audio-guide, et tout ce qui constitue un complément d’information au cours de la visite.

Toute œuvre d’art et exposition s’explique : c’est pour cela que la plupart des musées proposent des brochures pour offrir des clés de lecture aux visiteurs. Parfois simplement contextuelles, parfois très précises, ces informations sont censées éclairer d’un œil nouveau les œuvres à venir, pour ne pas être une simple accumulation de peintures et de sculptures poussiéreuses. Mais pour rendre la visite plus dynamique qu’une simple déambulation, le nez dans un papier, les musées intègrent désormais de plus en plus d’informations dans des éléments plus technologiques, dont l’interactivité attise davantage la curiosité. Des dépliants en papier, nous sommes passés aux tablettes et autres écrans tactiles sur lesquels petits et grands visiteurs se penchent. C’est ainsi que les tables interactives ont envahi nos musées, attirant l’œil et les doigts du public, dynamisant ainsi leur visite. Certains musées poussent même le concept encore plus loin avec la création de murs tactiles, comme à Aix-en-Provence où la Cité du Livre s’est dotée d’un mur tactile, aussi connu sous le nom de City wall, ou City media.

 

City wall d’Aix-en-provence (Crédit – Olivier Dubuquoy)

 

Désormais partie intégrante d’une visite, l’audio-guide a considérablement modifié l’expérience de la visite au musée. Plus besoin de mettre son nez sur le petit bout de papier accroché à côté du tableau, après avoir bravé une foule de badauds en train de comater en écoutant leur guide équipé de son célébre parapluie jaune : il suffit désormais de glisser un écouteur dans votre oreille, et toute la connaissance enmmagasinée dans le musée est à votre portée. Parfois muni d’un écran, parfois muni d’un scanner de code, l’audio-guide devient la clé de votre liberté, puisque vous choisissez le sens de la visite, et les œuvres sur lesquelles vous souhaitez vous arrêter ; l’audio-guide devient dès lors un outil pour le visiteur, mais aussi pour le musée, au point que certains d’entre eux tentent de pousser le concept aussi loin possible.

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Ainsi, lors de votre prochain passage au Louvre de Paris, oubliez la palette à coller à votre oreille, ou le fichier à télécharger sur votre lecteur mp3 ou smartphone : sortez les Nintendo DS. Les Nintendo 2 et 3DS, plus précisément, puisque le constructeur japonais indique explicitement que le logiciel ne fonctionne pas sur les versions précédentes de sa console. Ce logiciel peut être téléchargé sur votre propre console, et se trouve déjà sur les DS mis à disposition pour l’occasion par le musée, qui propose pas moins de 35 heures de contenu audio ainsi que de très, très, très nombreuses photographies et reconstitutions 3D d’œuvres pour accompagner et compléter votre visite.

 

Le Louvre sur Nintendo, un jeu plus vrai que nature

 

Le petit plus ? Même les salles du musée du Louvre sont représentées dans ce « jeu », histoire de visiter le musée depuis votre canapé pour les plus sédentaires d’entre vous.

 

[divider]La technologie comme but[/divider]

 

Car c’est bien de cela qu’il s’agit : vous faire visiter certains musées sans y mettre le pied. Quel meilleur moyen, en effet, que de toucher cette part de la population qui rejette l’idée de se perdre dans une foule parfois aussi lente que vieillissante pour voir ce qu’Internet vous permet de voir de plus près ? Google l’a bien compris, et à l’image de son projet Google Street, la firme toute puissante américaine s’est donc attaquée en 2011 à la culture en proposant Google Art Project, un site (et une initiative) qui regroupe plusieurs musées virtuellement reconstitués, vous permettant ainsi de déambuler dans les allées de ces musées comme l’on peut descendre l’avenue des Champs Élysées sur Google Street. Malgré tout, cette idée de proposer en ligne le contenu d’un musée, la déambulation virtuelle en moins, n’est cependant pas récente.

 

Vue du Tate Britain sur Google Art Project

 

Internet est en effet une base de données très précieuse en ce qui concerne le domaine de l’image, et l’art dans ce qu’il a de plus académique n’y échappe donc pas. Si on laisse de côté les initiatives de Nintendo et de Google, qui ne sont, en fin de compte, que des regroupements d’œuvres avec ce petit charme pittoresque en plus, de nombreux sites recensent déjà les différentes œuvres classiques, et je peux notamment citer Web Gallery of Art (d’où j’ai notamment tiré les images de très bonne qualité de la Mona Lisa dont nous parlions récemment). Plus ou moins spécialisés dans le temps ou dans les genres, ces sites sont d’immenses bases de données dans lesquelles il devient possible, et aisé, de trouver des illustrations des œuvres présentes dans les plus grands musées sans bouger de derrière son écran.

Et c’est ainsi qu’on en vient aux œuvres archéologiques détruites par l’État Islamique en Irak et en Syrie. Débat peut-être malvenu pour certains, car essentiellement politique et idéologique, pour un site de culture geek que se proclame être Cleek.fr, et pourtant : la technologie s’avère être une aide inestimable pour le patrimoine en ce qui concerne cet événement précis. En effet, par cette transition des plus obscures que je m’attache à faire, sachez que pour faire face à la perte inestimable de certaines antiquités, certains archéologues se sont mobilisés en exploitant ce que la technologie leur proposait de mieux et ont ainsi mis en place une plateforme qui se propose de regrouper images et reconstitutions 3D des œuvres en question. Cette plateforme, Project Mosul, permet donc de remettre virtuellement sur pied les musées et les œuvres qui auraient été détruits. Outre la diffusion que cela permet, par le caractère universel d’Internet, ce projet met en avant la conservation, aussi virtuelle soit-elle, d’un patrimoine dont l’aspect visuel reste l’essence même. Difficile en effet de garder de façon précise, pour ne pas dire scientifique, une trace de l’œuvre qui suit si elle n’avait pas été upload sur cet outil qu’est la base de données Project Mosul.

 

Mosul lion
by ingg
on Sketchfab

 

De nombreuses autres initiatives existent et continuent encore de voir le jour. Loin d’être laissé pour compte, le domaine du patrimoine s’approprie petit à petit les évolutions technologiques de notre société, et ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Petit coup de jeune rafraîchissant donc pour l’institution muséale, qui souhaite ainsi ouvrir ses portes à la modernité et à un public sans doute jusque là réticent et imperméable à la formule traditionnelle. Multiplication du contenu, des langues, des approches, dynamisation de la visite, la technologie ne semble qu’être profitable aux musées et au patrimoine, même si certains pourraient reprocher l’aspect trop virtuel, à l’image de Google Art Project, ou à sa façon de Project Mosul, de cette évolution. Pourtant, il s’agit plus que jamais d’inviter le public à découvrir et redécouvrir les musées et leurs œuvres. Alors n’hésitez pas à pousser la porte de votre musée du coin, et agrémentez votre visite grâce à l’application qui va peut-être avec !