Présentation de la série Sense8

 

Vous l’avez sans doute remarqué, Netflix, la plateforme phare de diffusion de séries et de films en ligne propose depuis quelques temps des contenus originaux, signés comme étant une exclusivité du site, comme ce fut le cas pour certains essais pour le moins réussis comme Better Call Saul, Daredevil, et plus récemment, Sense8.  Difficile de passer sous silence une telle production, car en plus de l’exclusivité Netflix, la série Sense8 n’est autre que le bébé des Wachowskis, le duo de choc américain, auxquels nous devons des œuvres cultes telles que Matrix, Cloud Atlas, ou encore Jupiter Ascending.

Mise à disposition des internautes le 5 juin 2015, Sense8 a tout d’abord présenté l’originalité d’être disponible dans son intégralité, et ce, dès le premier jour ; un choix qui commence à se répandre sur certaines diffusions de séries, laissant ainsi le choix aux téléspectateurs de s’immerger directement dans un « rush » de l’œuvre s’ils le souhaitent, ou encore d’attendre la traditionnelle semaine de pause entre deux épisodes. Un bon mois après la sortie de la série, qu’en est-il donc de Sense8 ? Embarquez avec Cleek dans l’univers fascinant des Wachowskis !

 

[divider]La série[/divider]

 

Sense8 se compose de 12 épisodes de plus ou moins 50 minutes (à l’exception du pilote qui lui, dépasse l’heure) qui forment ensemble une saison 1 à la fois riche et complexe.

La série nous présente donc l’aventure qui unit huit personnes, huit étrangers, issus de huit villes dispersées sur le globe. Londres, Séoul, San Francisco, Nairobi, Mexico, Mumbai, Chicago et Berlin deviennent donc les théâtres de rencontres improbables entre ces huit étrangers, qui semblent à première vue n’avoir aucun point commun. Ces huit protagonistes vont donc se retrouver soudainement liés, suite au suicide énigmatique d’une femme. Ce fameux lien n’a pourtant rien de tangible, car les « huit » sont en fait des « sensitifs », capables de ressentir la présence, les pensées, les émotions d’une des autres personnes du « cercle ». Peu à peu conscients des événements troublants qui bouleversent petit à petit leur vie, les sensitifs vont néanmoins vite se rendre compte qu’ils ne sont pas au bout de leurs surprises, puisque de mystérieuses organisations semblent bien déterminées à les traquer aux quatre (enfin, plutôt huit) coins de la planète.

Côté casting, on retrouve donc huit acteurs récurrents et héros de la série, au travers de personnalités telles que Tuppence Middletown, Brian J. Smith, Jamie Clayton, Aml Ameen, Bae Doona (également figure emblématique du « prophète » de Cloud Atlas), Tena Desae, Max Riemelt, et Miguel Angel Silvestre.

Dès le 5 juin, à la suite de la mise en ligne de la série, des critiques aussi enthousiastes que mitigées commencent alors à fuser de toute part. Après quelques semaines de recul, revenons donc sur les éléments positifs mais aussi sur les maladresses qui composent Sense8 et qui font d’elle une série à l’ambiance tout à fait singulière.

 

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[divider]Lentement, mais sûrement…[/divider]

 

Revenons tout d’abord sur l’œuvre des Wachowskis. Après s’être essayés au format exigeant de la trilogie avec Matrix, et du long-métrage avec Cloud Atlas, c’est au tour du support série d’être apprivoisé par le binôme de renom. À première vue, puisqu’il s’agit de retracer la vie de huit personnages, le format de 12 épisodes répartis sur une saison semblait être une bonne idée, permettant ainsi de ne pas bâcler le côté psychologique des personnages et d’affiner un synopsis vieux comme le monde. Hé oui, rien de nouveau sous le soleil, puisque Sense8 nous propose en fait une relecture du sempiternel combat qui confronte une minorité différente, douée de capacités extraordinaires à quelques mystérieuses institutions en charge de les pourchasser. Nous pourrions donc légitimement penser que cette accroche ne présente rien de bien original, et que Sense8 se doit donc de frapper fort, voire très fort, sur des domaines jusqu’ici inexplorés.

« Lent, ennuyeux, époustouflant, grandiose, émouvant… » sont autant de mots qui commencent à graviter autour de la série lors de ses débuts sur Netflix, car oui, Sense8 n’est pas le genre de série à laquelle on accroche d’emblée. À vrai dire, et pour ne pas vous mentir, Sense8 présente même quelques longueurs et lenteurs ennuyeuses qui constituent néanmoins la faiblesse mais aussi la force de l’œuvre. Aussi, à la fin du premier épisode, il serait « normal » de s’entendre dire « Oui, et ensuite ? » puisque la lenteur assumée de Sense8 en a laissé plus d’un sur leurs faims.

Néanmoins, si l’action ne se manifeste pas dès les premiers instants, et si l’intrigue semble à ses débuts pour le moins floue, il est assez difficile de nier que les Wachowskis s’embarquent dans une présentation d’une galerie de personnages aussi complexes qu’attachants. On ressent assez vite que l’ambiance de la série, bien que particulière, laisse présager le meilleur en ce qui concerne une future psychologie plus que nuancée des protagonistes de l’histoire. Ainsi, l’acteur macho, le petit flic, la DJ paumée, la hackeuse transexuelle (et je vous épargne les autres…) deviendront autant de personnalités auxquelles vous vous identifierez très rapidement, de par la subtile palette d’émotions proposée tout au long de la série. Si vous êtes donc réservés sur les débuts de Sense8 (comme j’ai pu l’être par ailleurs), tentez de surpasser votre impatience, et embarquez dans le voyage sensoriel des Wachowskis.

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[divider]Un message humaniste[/divider]

 

Les sensitifs, nos héros en titre, sont donc aptes à ressentir tout ce que les sept autres ressentent. Ainsi, chaque protagoniste est ainsi doué d’un don d’ubiquité, qui lui permet d’être dans son habitat habituel, tout en étant aux côtés de son alter ego sensitif, puisqu’il est en mesure de voir ce qu’il voit, entendre ce qu’il entend, etc. Mais le lien ne s’arrête pas là, puisque les sensitifs sont également capables de s’approprier la langue et les savoirs de l’autre : un arbre des possibles plus qu’alléchant donc, mais qui soulève tout un tas de questions, avec en ligne de mire, de savoir comment nous pourrions réagir à un tel bouleversement. Si, à première vue, l’idée de l’intrusion d’un « étranger » que nous n’avons pas invité aurait toutes les raisons de nous contrarier, il n’en est rien ici car le partage des émotions et des sens entre sensitifs font qu’en dehors de la surprise évidente, c’est avec un réel émerveillement que chacun d’eux découvre ces sept nouvelles dimensions de leurs vies.

 

« Est-ce que je suis en train de perdre l’esprit ?                                                                                                                                                                                                                                                                                 Non, il est juste en train de s’étendre… »

 

Les protagonistes ainsi « connectés » sont donc en mesure d’appréhender la joie, la tristesse, la peur, et donc aussi le danger qui guette chacun des autres membres du cercle, ce qui demeure assez pratique lorsque l’on décide de vous pourchasser pour votre différence. Loin d’être un énième X-Men like, Sense8 présente les facultés des sensitifs de manière tout à fait particulière. La jeune indienne se retrouve ainsi propulsée en plein Berlin, et vice-versa, laissant ainsi entrevoir l’infinité des sensations multiples et possibles. La jeune femme (pour ne prendre qu’elle comme exemple) est donc en mesure de ressentir la chaleur de Mumbai, tout comme les averses cinglantes de l’Allemagne et ce, au même moment. Les Wachowskis réalisent donc ici un tour de force par la mise en scène visuelle de ce don. Les connexions entre sensitifs sont troublantes à l’écran, et les choix de plans et de détails anodins nous permettent petit à petit d’entrevoir le potentiel immense de cette faculté, bien loin des redondants super-pouvoirs habituels.

Pour ce qui est ensuite de la menace qui guette les « sensitifs », elle est discrète et pernicieuse. Ici, point de commando, ou de troupes armées pour mettre à mal nos héros, mais plutôt une multitude de pièges en cascade. Là encore, si la série excelle, c’est de par sa capacité à faire s’immiscer cette menace, sans qu’on ne la devine à première vue, ni que l’on sache encore le but de cette traque (seront-ils massacrés, étudiés, enfermés ?). Ce parti pris va donc de paire avec la lenteur de la série, qui elle-même soutient des psychologies de personnages complexes et attachantes. La toile se tisse donc petit à petit, jusqu’à former ce tableau humaniste à souhait, comme une ode à la liberté, et à la bonté sincère et inconditionnelle que ressentent les sensitifs les uns pour les autres.

 

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Les Wachowskis

 

[divider]Une fresque planétaire et réaliste, sous des échos nostalgiques de musique[/divider]

 

Enfin, si vous n’étiez toujours pas convaincus de poursuivre la série malgré sa lenteur et ses premiers instants décourageants, sachez qu’en nous proposant ces huit villes aussi magnifiques que variées, les Wachowskis nous présentent également des paysages désertiques autant que citadins, avec des prises de vue toutes plus splendides les unes que les autres. Enfin, à divers moments de la série, certains tubes de musique accompagneront également le voyage des sensitifs et donc, le vôtre (avec la playlist ci-dessous).

Vous retrouverez ainsi de magnifiques passages tout en émotion et en contemplation autour de chansons telles que What’s up (4 Non Blondes), Mad World (dans une superbe version intimiste au piano), les accents nordiques de Sigur Ros, Knockin’ on Heaven’s Door ou encore Keep It Close (Seven Lions). Sense8 est donc un voyage particulier, riche et complexe, bercé par une lenteur, une tolérance de l’autre et un humanisme à toute épreuve.