Générique de The Walking Dead – La terreur mise en musique

Laurianne « Caduce » Angeon

Générique de The Walking Dead – La terreur mise en musique

Générique de The Walking Dead – La terreur mise en musique

Laurianne « Caduce » Angeon
Autopsie du générique de The Walking Dead : comment l'opening de la série nous donne-t-elle un tel avant-goût de l'horreur ?

Bonjour à tous et bienvenue dans ce quinzième numéro de votre chronique musicale, fraîchement déménagée chez VonGuru. Vous l’aurez compris, il sera question ici de musique, et plus particulièrement des musiques qui ont bercé et qui continuent de bercer l’univers geek, qu’il s’agisse de jeux vidéo, de films ou d’animés. Le format de cette chronique pourra varier d’un numéro à l’autre selon les musiques qui vous seront proposées. Présentations, analyses, extraits de partitions seront autant d’éléments que vous pourrez retrouver dans la Boîte à Musique.

Aujourd’hui, et à l’approche de la sortie de sa nouvelle saison, nous reviendrons sur l’une des plus emblématiques des séries actuelles, The Walking Dead, pleine de promesses pour sa reprise imminente ce mois-ci. Si la série n’a cessé, au cours des derniers mois (voire des dernières années) de nous surprendre et de nous tenir en haleine par ses cliffhangers saisissants, nous nous attacherons aujourd’hui à disséquer le générique de cette dernière, afin de comprendre en quoi la musique et les images qui y sont associées distillent à cet opening tous les codes de l’angoisse et de l’horreur. Let’s go !

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Au commencement


 

Si les excellentes séries pullulent à l’heure actuelle, peu d’entre elles constituent un réel gage de qualité en ce qui concerne leur générique. En dehors de quelques American Horror Story, Vikings et True Detective, où l’empreinte esthétique impose le respect, d’autres openings, comme celui de Game of Thrones, ou encore The Walking Dead se chargent plutôt d’instaurer un climat, une ambiance et surtout des émotions représentatives du show. Au départ, et comme premier jet du générique, l’opening de The Walking Dead devait se résumer en portraits des personnages principaux, dans des gouttes pourpres pour le moins suggestives :

 

 

Bien qu’efficace et très orienté 90′, dans la présentation concrète des portraits de personnages, le projet de générique fut finalement et entièrement remanié, pour laisser place à une empreinte beaucoup plus caractéristique, celle que l’on connait désormais. Sur un camaïeu de couleur sépia, comme un souvenir d’ores et déjà révolu, le générique nous expose le monde post-apocalyptique : lieux publics désertés, nature qui reprend ses droits, ombres menaçantes… Chaos et désolation s’inscrivent dans cette trame visuelle et musicale, pour mieux nous dresser le tableau de ce que nous allons voir tout au long de la série.

 

Des images…


 

En dehors de la première saison, qui fait clairement allusion aux protagonistes principaux et à l’intrigue initiale au sein même du générique (un shérif blessé, une photo de sa femme et de son coéquipier marquant ainsi le triangle amoureux Rick/Lori/Shane), les openings de The Walking Dead laisseront par la suite une place de choix au symbolisme et à des décors et mises en situation puissantes. À l’exception de quelques clins d’œil (les flèches de l’arbalète lors de l’apparition de Norman Reedus (Daryl), ou encore, le récent fer à repasser laissé près des flammes pour souligner le nom de Jeffrey Dean Morgan (Negan)), peu de choses sont mises en avant pour dévoiler du concret quant à l’intrigue de la saison.

 

             

 

Bien loin de tout cela, l’opening de The Walking Dead se concentre davantage sur des plans statiques ou en mouvement sur des images de décors fixes (comme pour souligner le côté immortel de la brique face au déclin de l’Homme) ou sur des détails qui eux, au contraire, seront mis en mouvement pour créer un décalage. Ces éléments, souvent synonymes de danger ou de malaise (le mille-pattes, les aiguilles de l’horloge, l’œil du zombie ou encore les flammes) viennent distiller quelques notions fugaces mais pourtant bien concrètes d’un danger imminent et omniprésent.

 

… À la musique


 

Signée par Bear McCreary (Black Sails, Outlander…), la trame musicale du générique est, bien entendu, dans la lignée visuelle qui nous est proposée. Plus important encore – et cela ne vous aura sans doute pas échappé – la musique de The Walking Dead prend corps quelques secondes avant le début même du générique, laissant entendre les premières notes dans un fondu en ouverture, au cœur de l’action dans la série. Ce stratagème, bien qu’assez classique, inscrit en fait la bande-originale dans l’action même, au lieu d’en faire un élément à part. Le thème résonne ainsi dans la continuité des dernières images proposées au spectateur, induisant alors le malaise et l’angoisse au travers de nombreux éléments musicaux :

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Le tempo : si la vitesse de la musique n’est en soi pas effarante, les notes courtes, répétées et homorythmiques constituent un vecteur de stress. Ce sont majoritairement des cordes qui instaurent donc un motif en doubles-croches, arpégées de façon ascendantes et descendantes.

 

 

 

Les percussions et la métrique : des coups percussifs viennent rythmer les temps forts de la musique, écrite en une mesure asymétrique. À l’inverse de la majorité des musiques « grand public » écrites dans un aspect cyclique de la musique (deux, trois, ou quatre temps qui s’enchaînent sans heurts), la musique de The Walking Dead présente une métrique que l’on pourrait écrire en 8/8, divisé en 3+3+2 : ce « deux » donne un côté bancal et imprévisible à la musique, la rend agitée et angoissante, bien loin du rythme cyclique d’un autre thème musical lambda.

La tonalité : on est pas chez les bisounours ici. Ce sera du sol mineur, tonalité grave, solennelle, sombre et puissante. Point.

La longue note tenue et la transposition du motif principal : notre motif, visible sur l’image ci-dessus est accompagnée, à partir de 0’09 dans la première vidéo par un son à la guitare électrique, une longue note tenue et relativement aiguë en comparaison du reste de la composition. Cette note glissera sur des intervalles très courts, afin de suivre la transposition du motif principal. Kézako ? La cellule des violons sera en fait reproduite strictement à l’identique une tierce majeure en dessous, puis une tierce mineure encore en-dessous. L’intérêt de ce procédé ? Utilisé des écarts entre les différentes cellules qui induisent le malaise et l’effroi, bien loin des grilles typiques de la variété en chanson. Résonnant ainsi sur cette grille d’accord (descendante), la longue note apparaît à nos oreilles comme une sorte d’écho d’un cri désespéré, laissant cette sensation de fuite en avant vers l’inconnu, le danger, le vide et la mort.

 

 

 

Les bruitages : tout comme la musique du générique qui débute avant les images de l’opening, certains éléments et bruitages viennent accompagner la trame musicale et les images, renforçant ainsi l’immersion sur que l’on est en train de voir, d’entendre. C’est le cas par exemple des bruits métalliques qui accompagnent la porte du placard qui tremble sous les coups des zombies (à 3’19 dans la première vidéo). Là encore, la musique devient diégétique (c’est à dire qu’elle souligne un élément concret de l’action, sans y être extérieure) et s’inscrit donc pleinement dans une action visuelle qu’elle souligne, au lieu de simplement l’accompagner.

 

 

 

C’est en fait tout cela qui vient perturber notre oreille, avec des éléments angoissants, des intervalles dérangeants et des métriques bancales, car à l’image de la série, rien dans The Walking Dead ne garantie la survie jusqu’au prochain épisode. Le danger guette, Lucille a soif, et Negan vous attend très bientôt pour de nouvelles aventures !