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Des Cleek et des claques spécial Halloween : ces livres qui font peur

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Spécial Halloween : ces livres qui nous ont foutu les jetons

 

Chez Cleek, nous sommes des passionnés, aux passions différentes. Cependant, si nous avons bien une chose en commun (parmi tant d’autres), c’est notre amour pour l’univers Geek au sens très large du terme. Jeux vidéo, films, séries, romans, comics, mangas, technologie et j’en passe. C’est avec cette passion commune que nous avons décidé il y a quelques temps maintenant de vous proposer une série d’articles un peu particulière, « Des Cleek et des claques », afin de partager avec vous nos avis sur certaines thématiques.

Pour rappel, nous avions abordé avec vous ces jeux que nous prenons plaisir à regarder (#1 et #2). Puis, nous vous avions préparé un article spécial manga. Vous pouvez d’ailleurs retrouver deux autres de nos articles sur nos personnages de jeux préférés : voici le premier opus juste ici et le second juste là. Au début de l’année, nous vous avions parlé des sorties cinéma les plus attendues de 2016, des meilleurs films de l’année passée, de nos séries préférées sans oublier leurs génériques qui nous ont fait rêver. Nous vous avons également parlé de ces musiques que l’on écoute en jouant ainsi que des sorties jeux vidéo les plus attendues de l’année 2016.  Enfin, nous avions abordé avec vous ces réalisateurs qui nous marquent.

Plus récemment, nous vous parlions de ces jeux vidéo dits violents auxquels nous avons plaisir à jouer. ainsi que de nos théories sur la prochaine saison de Game of Thrones, mais aussi, pour célébrer l’automne, de nos avis sur les films signés Tim Burton. Aujourd’hui pour fêter Halloween, nous vous proposons un article sur des livres qui nous ont bien fait peur, sans manquer de vous rappeler nos articles sur le même thème, comme nos Des Cleek et des Claques sur les jeux vidéo et quelques films qui nous ont empêchés de dormir, d’autres conseils de Roxane « Lenvy » Saint-Anne pour vos lectures nocturnes, et nos critiques du jeu The Evil Within, de la nouvelle saison d’American Horror Story et des films d’horreur récents, The Witch et The Conjuring 2.

 

[divider] Laurianne « Caduce » Angeon : Âmes Perdues – Le Corps Exquis[/divider]

 

 

Je vais pour ma part aller du côté des terres underground de Poppy Z. Brite, et plus particulièrement parler de deux de ses œuvres – Âmes Perdues et Le Corps Exquis – qui, sans être à première vue des ouvrages spécialement horrifiques nous offrent pourtant quelques passages à faire frissonner les plus vaillants d’entre nous.

Le premier livre, Âmes Perdues – 1992 – est un peu le livre signature de l’auteure : une histoire de romance et d’errance aux alentours de la Nouvelle-Orléans, des vampires, de l’inceste, des créatures et des entités inquiétantes. La base donc pour une écriture toute en figures de style et en contemplation du pire. Ici, chaque détail de moisissure, chaque goutte de sang, chaque limite morale franchie constitue une raison de plus de s’émerveiller des histoires tourmentées de deux de ses protagonistes récurrents : Ghost et Steve. Pour ce qui est de l’horreur, bien des passages pourront s’y prêter, malgré une lecture divertissante et plutôt rêveuse, à l’exception d’un endroit particulier qui, pour moi, avait réussi à faire naître un certain malaise. La jeune femme évoque à un moment donné deux entités, des jumeaux malins, sortes de fantômes éthérés dotés du pouvoir d’absorber la vie de leur victime pour que resplendisse à jamais leur jeunesse de vampires « spirituels ».

 

Nothing s’allongea dans les ténèbres et but à même le goulot, les yeux fixés aux étoiles de son plafond. Au bout d’un temps, les constellations se mirent à ondoyer. Je dois foutre le camp d’ici, se dit-il juste avant l’aube, et des milliers de spectres d’enfants américains ayant vécu dans l’horreur de la complaisance, de la stagnation et du réconfort de la mort défilèrent lentement devant son visage, lui murmurant leur accord.

 

 

Le Corps Exquis – 1996 – est un livre qui fit polémique en raison de ses thématiques plus que borderline : le cannibalisme, le meurtre, la nécrophilie, sans parler du sida et de l’homosexualité latente ont rendu un peu cet ouvrage persona non grata, à ne pas mettre en toutes les mains. Le Corps Exquis raconte donc en parallèle l’histoire de deux tueurs en série, cannibales et nécrophiles, jusqu’à leur rencontre providentielle, la découverte et la mesure du monstre que constitue l’Autre, et les jeux qui en découlent. Question horreur, vous serez ici servis, dans un univers beaucoup plus réaliste et transgressif qu’Âmes Perdues (qui n’était pourtant pas en reste en terme de transgression, malgré son approche fantastique). Si ce dernier abordait des thèmes sensibles tels que l’inceste ou le meurtre avec un regard complaisant, Le Corps Exquis nous livre ici une autopsie froide et implacable de deux esprits malades, et pourtant faits l’un pour l’autre.

 

J’aimais mes garçons tels qu’ils étaient, de grands poupons morts pourvus d’une ou de deux bouches supplémentaires à la salive cramoisie. Je les conservais auprès de moi pendant une bonne semaine, jusqu’à ce que l’odeur devienne trop perceptible. Le parfum de la mort ne me déplaisait pas. Il m’évoquait des fleurs coupées ayant trop longtemps séjourné dans une eau stagnante, une senteur lourde et maladive qui colle aux cloisons nasales et s’insinue au fond de la gorge à chaque souffle.

 

 

[divider]Marine « Reanoo » Wauquier : Simetierre[/divider]

 

 

Peu importe le format, le nom de Stephen King finit forcément par être prononcé lorsqu’il est question de peur, d’épouvante, et donc d’Halloween. Si j’ai d’abord découvert et détesté l’œuvre de King grâce aux adaptations cinématographiques de ses œuvres (The Shining, l’enfant en moi frissonne toujours à l’idée d’ouvrir un rideau de douche), je me suis réconciliée avec lui grâce à ses livres (The Shining, je te pardonne). Si l’horreur est bien évidemment bien moins visuelle, et donc d’une certaine façon plus supportable, dans les livres, le malaise est là. Et ce malaise, si je l’ai rencontré dans certaines nouvelles de Richard Matheson, je l’ai réellement embrassé avec Simetierre de Stephen King.

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Simetierre, ou Pet Sematary pour les anglophones, sorti en 1983, relate l’histoire d’un médecin américain qui arrive, avec sa famille (pour le moment) parfaite, dans le Maine, pour prendre ses fonctions dans une université, et qui découvre un cimetière pas comme les autres derrière chez lui, qui a le don de faire revenir à la vie ce qu’on y enterre. Si la notion de mort, effrayante pour certains, est abordée de façon relativement tragique dans cet ouvrage (les morts auxquelles on assiste au fil des pages ne sont pas des plus joyeuses), c’est surtout la résurrection qui nous met mal à l’aise. Qui, pourtant, n’a pas souhaité récupéré son cher animal de compagnie disparu trop tôt à ses yeux ?

 

 

Le malaise distillé par King, mot après mot, s’installe de façon progressive. Dès le début, le lecteur se rend compte que quelque chose cloche, et à mesure que l’histoire se déroule, il reste l’une des rares personnes dans la confidence. Nous seuls savons le pourquoi du comportement du chat, puis de l’enfant, et nous seuls, impuissants, nous rendons compte de l’horreur qui s’immisce petit à petit dans cette vie pourtant si banale. Si l’escalade de l’horreur est sans nul doute liée à Gage, feu le petit dernier de la famille qui fait un retour fracassant, les lignes qui m’ont sans doute le plus glacé le sang sont les dernières du livres. Le livre se termine effet sur ce que je qualifierai de cliffhanger des plus sinistres mais des plus efficaces. Et s’il y a bien une chose dont j’ai horreur, ce sont les cliffhanger sinistres et trop efficaces.

Simetierre n’est pas un livre qui vous fera vous retourner au moindre bruit, ou craindre de savoir si quelqu’un se cache de l’autre côté du canapé, mais sa lecture ne vous laissera pas indifférent.

 

[divider]Siegfried « Moyocoyani » Würtz : Danse Macabre, de Stephen King [/divider]

Grand amateur des Chair de poule dans ma jeunesse, je suis naturellement passé comme tant d’autres au Maître Stephen King à la pré-adolescence, ce qui est en l’occurrence presque regrettable, puisque je me rappelle trop vaguement l’impression durable laissée par les volumes de R.L. Stine, et que lisant peu de romans d’épouvante, je me vois dans l’obligation de vous parler d’un auteur non seulement déjà assez connu, mais de surcroît évoqué juste au-dessus.

King est cependant un incontournable, si associé au genre qu’il est immanquablement l’un des premiers noms à nous venir à l’esprit, et sa double-mention dans cet article me paraît plus révélatrice de ce fait que dommageable, d’autant que mes sueurs froides qu’il a le mieux su m’infliger viennent d’une oeuvre assez différente des romans auxquels on pense habituellement, puisqu’il s’agit de son premier recueil de nouvelles, Danse macabre (Night Shift dans la langue de Lovecraft).

King y explore une variété passionnante de facettes de l’horreur, de l’enquête très gothique sur une malédiction liée au manoir familial à la métamorphose organique, des terreurs nocturnes au campus slasher, la menace venant des jouets, des machines, des agents mutagènes, des enfants, des vampires, de la folie humaine, du vide, des camions, des animaux… À cette diversité thématique il faut ajouter une hétérogénéité des points de vue, le journal, la confession, les pensées du tueur, pouvant remplacer le temps d’une nouvelle une narration à la troisième personne, tantôt omnisciente, tantôt très externe… Vous ne savez jamais à quoi vous attendre en passant à la nouvelle suivante, si le thème abordé et son traitement particulier toucheront précisément votre point faible ou s’il faudra attendre l’histoire suivante, mais cette surprise constante instille très vite une peur stimulante, présente donc dans le procédé du recueil autant que dans les fictions elles-mêmes.

 

 

C’est que King manie comme peu d’écrivains ce qu’il convient d’appeler l’art de la nouvelle. Il en maîtrise les principes et a saisi le subtil dosage entre nouvelles développées et nouvelles courtes, présentant le fait fantastique sans explications et se clôturant aussi sec ; entre fins ouvertes, fins mystérieuses, bonnes et mauvaises fins ; entre nouvelles cyniques, ironiques, et nouvelles impliquant le spectateur. Pour en avoir mieux conscience, je recommande chaleureusement son essai Anatomie de l’horreur, pourtant publié au début de sa carrière d’écrivain, où il analyse avec finesse les différents types d’horreur en fonction des sentiments que l’on cherche à provoquer, aussi bien au cinéma (genre dans lequel évidemment le livre est un peu dépassé quant aux exemples) qu’en littérature.

Je conseillerais particulièrement pour leur force psychologique les nouvelles où l’on reconnaît la patte de Richard Bachman (le pseudonyme adopté par King quand il souhaitait écrire des textes sans que la perception du public influe sur leur réception, à l’instar de Running Man), notamment La Corniche, Le Printemps des baies, Chambre 312 et surtout Desintox IncEn matière de visions horrifiques, La Pastorale et Le Croque-mitaine devraient faire impression. Naturellement, le point culminant du recueil est la nouvelle Les Enfants du Maïs, dont la popularité a largement dépassé celle du recueil, et qui raconte l’arrivée d’un couple, perdu sur une route du Nebraska, dans une ville déserte dont ils découvrent vite qu’elle est peuplée par une société d’enfants…

Danse macabre contribue à faire de King un véritable héritier de Lovecraft, un auteur avec lequel il a de nombreux points communs, en plus d’une origine géographique assez proche, dont celui d’avoir été très peu adapté avec succès malgré de nombreuses tentatives, ce qu’on pourrait considérer comme un gage de qualité parce que cela prouve un talent pour susciter de manière profondément littéraire des atmosphères qu’il est malaisé ou vulgaire de traduire visuellement. Même si King n’a pas le même souci pour une mythologie à peu près cohérente d’œuvre en œuvre il partage avec le créateur de Cthulhu un talent pour faire baigner les situations qu’il décrit dans une ambiance calmement terrifiante – ce dont quelques passages de L’Affaire Charles Dexter Ward et La Couleur tombée du Ciel vous convaincront bien vite.

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