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Le chat, un pacha du net

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What-chat reading ?

 

Le chat est à Internet ce que la chute sur une plaque de verglas est à Vidéo Gag : c’est un peu la clé du succès, de la célébrité, de la richesse, et donc par extension (et par opérations), celle de la beauté. Et avec le mot « chat », je ne parle pas ici des services de messagerie instantanée, mais bien de l’animal préféré de Schrödinger. En effet, à la façon de cette théorie scientifico-philosophique des plus célèbres, à chaque instant T, une image d’un tout petit chat tout mignon se trouve et ne se trouve pas sur la page internet que vous vous apprêtez à ouvrir. Et il s’avère qu’il est aujourd’hui plutôt difficile d’échapper à l’omniprésence virtuelle de ce petit animal. Idolâtrie que l’on peut soutenir ou exécrer, on ne peut cependant passer à côté de ce phénomène dont l’ampleur ne cesse de croître et de nous dépasser de jour en jour. Simple FOTM ou complot mondial voire interplanétaire menant à la domination prochaine de l’univers par la race féline ? Petit retour sur cette relation bien étrange, teintée de « Je t’aime… moi non plus », que partagent chats et geeks.

 

[divider]Chat s’en va et Chat revient[/divider]

 

Le chat a toujours entretenu une relation très particulière avec la race humaine (quand ce n’est pas cette dernière qui entretient l’animal, mais c’est une autre question). Telle la courbe de poids des afficionados de régimes, ou la côté de popularité de certains présidents, cette relation aura connu des hauts et des bas et aura joué au yo-yo (ce que je vous déconseille si vous avez un chat à proximité, cela étant). Le chat, certains l’aiment pour sa viande, d’autres pour sa fourrure, et certains pauvres fous pour ses câlins. Et puis il y a ceux qui ne l’aiment pas du tout.

On ne peut pas parler du chat sans se pencher sur la culture égyptienne antique. Sorte de collocation culturelle dans la mémoire collective, l’intérêt que nourrissait cette civilisation au chat est plus que légendaire. Il faut dire que l’archéologie, la génétique et l’histoire de l’art ont longtemps corroboré l’idée que l’Égypte ancienne ait été le berceau de la domestication du chat. Sculpture, peinture, pratiques funéraires et religieuses ont permis de confirmer et nourrir auprès du grand public le fantasme d’une sacralité du chat. Le caractère divin du chat par l’incarnation de la déesse Bastet sous les traits d’un félin ainsi que les momies de chats retrouvées y ont sans doute grandement contribué. L’interdiction du culte de Bastet signe d’ailleurs la fin de ce statut particulier, le chat devenant dès lors un simple animal domestique parmi d’autres.

 

Heeeelp ! J’ai une Bastet haut cul – euuh, au cul !

 

Des découvertes archéologiques puis génétiques dans les années 2000 ont cependant révélés que les égyptiens n’étaient pas les premiers à avoir domestiqué la bête. Les restes d’un chat ont ainsi été retrouvés aux côtés de ceux d’un homme dans une tombe datant du Néolithique (soit il y a très très longtemps… près de 9 500 ans, en gros), ce qui font dire aux scientifiques que les chats ont sans doute été domestiqués dans la région du Croissant Fertile (la Viennoiserie des cours d’histoire) à l’époque où les hommes se familiarisaient à l’agriculture. Côté asiatique, c’est il y a un peu plus de 5 000 ans que le félin aurait rejoint nos foyers. Quoi qu’il en soit, c’est pour ses qualités de chasseurs (et donc, d’une certaine façon, de vaccin préventif contre certaines maladies telles que la peste, ou la famine) que le chat domestique (ou Felis silvestris catus) s’est fait une place dans le cœur des civilisations passées et qu’il s’est répandu, d’abord à travers l’Empire Romain, puis au delà des mers pour les Amériques.

Mais je le disais, cette affection que nourrissait le chat envers l’homme n’était pas toujours réciproque (en partant du postulat que le chat puisse s’attacher à l’homme, ce qui n’est pas dit). Il y a certaines époques où il ne faisait pas bon d’être un chat et d’être pris en flagrant délit de « félinité ». On peut notamment évoquer la grande période qu’était le Moyen-Âge. Loin d’être aussi primitive qu’on aime à le dire, la société médiévale n’était cependant pas très tendre à l’égard du chat : si ses capacités de chasseur de nuisible en faisait un fidèle compagnon des fermes, sa tendance à être l’incarnation du diable et l’allié de la sorcière ne le rend pas si mignon que ça, et lui vaut un bien triste sort. L’homme médiéval qui aime jouer avec le feu n’hésite donc pas à faire brûler la bête maléfique qu’est le chat, dans une sorte de filet que l’on suspendait au dessus d’un grand feu, ou à le lancer du haut d’une tour. Ces pratiques, aussi archaïques et superstitieuses soient-elles, ont ainsi duré jusqu’au début du 19e siècle, et l’on célèbre par exemple toujours de nos jours en mémoire de cette tradition du lancer le Kattenstoet (ou Cortège des chats) à Ypres (Belgique) durant le mois de mai.

Objet de superstition, donc, notamment à cause du fameux pelage noir, mais aussi de revendication sociale et politique : on peut ainsi parler du chat noir comme symbole de l’anarcho-syndicalisme (dont le symbole nous vient de Ralph Chaplin), ou du massacre de chats perpétués par des apprentis du monde de l’imprimerie dans les années 1930 afin de se révolter contre leurs conditions de travail (en s’en prenant aux chats adorés des patrons). Enfin, plus proche de nous, l’on pourrait évoquer le commerce de fourrure, dont les défenseurs des chats se font les ardents opposants, ou encore les traditions culinaires de certains pays asiatiques, mais aussi sud-américains et même certaines régions rurales de Suisse (eh oui) !

 

Deux chats noirs à ne pas confondre : revendications littéraires pour l’un, politiques pour l’autre

 

De par cet historique parfois un peu compliqué, mais globalement à son avantage, le chat tient une place toute particulière dans nos vies et cultures. Outre des jeux de mots parfois voire souvent pathétiques, sa contribution est donc multiple.

 

[divider]Tout le monde veut devenir un Cat[/divider]

 

Le chat fait donc depuis longtemps partie de nos vies et donc de la faune culturelle de nos civilisations, même plus récente: on le retrouve ainsi partout, que ce soit dans les films, dans les livres, dans les bandes dessinées ou encore dans les dessins animés. Qu’il soit un personnage d’arrière plan, comme le chat de Blodfeld dans James Bond, Madchat  dans Inspecteur Gadget, ou Patterond dans Harry Potter ou un personnage à part entière, comme le chat de Cheshire dans Alice au pays des merveilles, ou Garfield dans la bande-dessinée du même nom, ou même Tom dans Tom et Jerry (j’ai ri), il montre le bout de sa queue quand l’envie lui vient. « Et les Aristochats ? », me direz-vous, « et le Chat Potté ? et le Chat ? Et … ». Je pourrais faire la liste exhaustive de tous les chats et toutes les œuvres mettant en scène des chats que j’en oublierais sans doute encore un nombre non négligeable. Folkore régional, marque commerciale (Salut Minette !) ou grande littérature, il ne s’interdit rien : le chat est tantôt craint, tantôt admiré, tourné en ridicule ou bien encore héroïsé… Une chose est sûre, c’est qu’il a su conquérir un univers pourtant plus impitoyable que celui de Dallas : l’Internet.

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C’est à travers le Lolcat que la frimousse des chats s’est imposée sur nos écrans. L’origine de cette incroyable success-story demeure bien obscure : personne n’arrive réellement à se mettre d’accord sur une date ni même sur un site internet précis. Ce qui est certain, c’est que le phénomène photographique est bien plus ancien qu’on aime à le penser. Vous apprendrez donc que c’est dans les années 1870 qu’un photographe anglais dénommé Harry Pointer fut le premier à mettre en scène des petits chatons (mais aussi d’autres animaux de compagnie), rapidement suivi par Harry Whittier Frees notamment (mais qui lui utilisait des animaux empaillés… Moins mignon, tout de suite).

 

Le « I CAN HAS A CHEEZBURGER? » du 19e siècle par Harry Whittier Frees

 

C’est donc un retour bien surprenant, et légèrement inattendu, que le chat fait dans le courant des années 2000. La première image moderne de chat accompagné d’un texte serait, selon la légende, apparue sur 4 chan entre 2005 et 2006. Le terme « Lolcat » apparaît quant à lui officiellement en 2006 (au même titre que le nom de domaine du même nom – LOLcat.com). De telles images tournaient déjà depuis 2005, et leur circulation ne fait qu’accroître, pour connaître un vrai pic de popularité en 2007, avec la diffusion de la première image affublée de la légende « I Can Has Cheezburger » (et un site internet du même nom, encore une fois) qui popularise alors le mouvement Lolcat. Ce mouvement se définit principalement par l’utilisation d’une image de chat (en général un chat tout mignon et tout fluffy) et par l’ajout d’un texte écorchant l’anglais, à la manière d’un jeune enfant. Les contraintes sont donc minimes, et le champ des possibles particulièrement vaste, ce qui contribue à expliquer pourquoi ce phénomène a alors explosé sur le net.

Le chat est donc célébré sur Internet, et l’on en mange donc à toutes les sauces (si je puis me permettre l’expression). La classe féline devient ainsi une célébrité du net. Pas étonnant, donc , que certains chats bien spécifiques soient à leur tour hissés au rang de célébrités comme fiers représentants cette grande famille. Nombreux sont les chats à être devenus des références et des sortes de classiques à l’impact bien plus large que d’être une simple image de chat. Ainsi, le meme Heavy breathing (mettant en scène un chat, bien évidemment) accompagne de nombreuses images de nourriture ou d’objets désirés. Et il n’est qu’un des innombrables memes faisant le succès de la toile. Mais le succès le plus flagrant est sans doute l’histoire de Grumpy Cat qui a su charmer les internautes grâce à son sourire aussi boudeur que particulier.  Grumpy Cat, Tardar Sauce de son vrai nom, a fait une entrée fracassante sur Reddit en 2012 lorsque son maître y publie des photos. Les détournements par les internautes conquis seront très nombreux, et le chat (enfin, la chatte, soyons précis) devient l’idole du net. Meme, page internet, récompenses, films, poupées à son effigie, elle ne se refuse rien : sa vie et sa moue déchaînent les passions.

 

 

Le chat, une mode ? Sans nul doute. Outre les memes, le chat se décline sous toutes ses formes sur le net. On peut notamment citer les innombrables vidéos de chats sur Youtube, des phénomènes comme Nyancat ou  Simon’s Cat, et j’en passe. Les qualités (mais surtout les défauts) des chats sont mis à l’honneur, et le filon est bon : sachez que plusieurs biographies de chats ont été publiées, comme celle de Choupette, chatte de Karl Lagerfeld (prière de ne pas rigoler) dans Choupette, la vie enchantée d’un chat fashion, et même des biographies de chats beaucoup plus ordinaires, comme dans Monsieur Chatastrophe par Chris Pascoe et L’odyssée d’Homère par Gwen Cooper.

 

[divider]Chat va couper, chérie ![/divider]

 

Alors, chat et geekitude, un couple aussi convaincant à l’écran qu’en vrai ? Il faut dire que l’ordinateur est un animal de compagnie que l’on trouve de nos jours presque aussi couramment dans les foyers et ménages qu’un chat. Il est donc inévitable que les deux finissent par se rencontrer, et qu’une cohabitation se mette en place. Internet, et par extension l’internaute, et donc, si je puis me permettre une généralisation encore plus outrageuse, le geek, aime le chat, et le chat le lui rend bien.  Alors que le sado-masochisme est plus que jamais à l’honneur avec certaines oeuvres dont je m’abstiendrai de parler, on peut souligner cette dualité presque oxymorique désormais popularisée (mais pas trop) comme étant au centre de l’histoire d’amour entre geek et chat. Car les propriétaires de chat le savent : plaisir et souffrance sont souvent de mèche lorsque l’on parle chat. Surtout lorsque l’on est un geek.

S’il est de notoriété publique que le chat, lunatique, peut se laisser caresser (plaisir) pour vous arracher la main de ses griffes la minute d’après (souffrance… Si si), la cohabitation avec les félins est un enfer bien plus dantesque, parsemé d’embûches, de fils rongés et de poils. Votre ventilo va effectivement vite se sentir étouffé par ces poils que le chat aime à parsemer généreusement sur votre table, votre sol, vos objets, sur tout ce qui vous appartient, en somme.L’avantage, c’est que vous pourrez vous faire un pull avec ses poils si vous avez froid l’hiver. Et votre chat ? Il a froid lui aussi ? Votre ordinateur portable fera l’affaire. Ou votre clavier. Voyez le bon côté de la chose, cela vous fera toujours une excuse lorsque vous taperez d’innombrables lapsus et fautes d’orthographe le soir où vous seriez trop imbibé. Les jouets de votre chat ont tous mystérieusement disparus sous votre canapé durant la journée ? Pas de soucis, le chat sait s’adapter. En bon félin moderne du 21e siècle, il jouera avec les fils à sa disposition (ça lui fait les dents, c’est tout bénef’ !) ou se postera devant (oui, juste devant, le nez dessus même) un écran, et participera même aux différentes activités proposées. Jeux vidéo, films, traitement de textes, votre chat voudra souvent y mettre du sien et de la patte. Priez pour qu’il se soit fait les griffes avant. Dernier signe (s’il en fallait plus) que le chat est fait pour l’informatique ? La souris. Dois-je vraiment développer ?

 

Oui, le geek maudit le chat, mais il ne peut s’empêcher de l’aimer. Les multitudes de photos et d’anecdotes circulant sur le net ne peuvent que l’attester, et il est difficile de ne pas tomber sur une image de chat. Preuve de son influence : il existe depuis 2007 le LOLCODE, un langage de programmation exotique se basant sur l’anglais des lolcats.

Alors, lavage de cerveau bien maîtrisé, ou simple fait du moment ? Dur de croire que le chat, si mignon avec ses p’tits yeux ronds et ses ‘tites moustaches puisse être aussi vile. Et si c’était là leur plan ? Le youtubeur Bruce Benamran semble avoir sa petite idée…

 

 

 

2 Commentaires

  1. […] pour le message qui est dès lors instinctivement reconnu de tous. Toute personne tombant sur le meme de Grumpy Cat, par exemple, saura tout de suite de quoi il s’agit. Et pour chaque meme qui disparaît, un […]

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